Netanya aurait mis en danger l’écosystème fragile des plages pour les Maccabiades
Les habitants et la Société pour la protection de la nature soutiennent que la ville a violé les règles du comité national de planification. Le comité des Maccabiades nie en bloc

Les habitants soucieux de l’environnement de Netanya, une ville au centre du littoral israélien, affirment que la construction d’infrastructures pour les Maccabiades, au milieu d’un corridor écologique reconnu pourrait causer des dommages irréversibles à un écosystème sablonneux déjà soumis à une pression intense du fait du développement voisin.
La compétition sportive a lieu habituellement tous les quatre ans, mais elle a été reportée l’année dernière à cause de la pandémie de COVID-19. Considéré comme les Jeux olympiques juifs, il rassemble 10 000 athlètes juifs du monde entier. La cérémonie d’ouverture officielle a eu lieu jeudi à Jérusalem.
Plus tôt cette année, allant à l’encontre de la position du ministère de la Protection de l’environnement, la commission nationale de planification a autorisé la municipalité de Netanya à ignorer la procédure de permis de construire afin de lui permettre de bâtir rapidement des structures temporaires sur la plage de Poleg pour accueillir les sports de plage et divers événements de divertissement des Maccabiades.
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La municipalité a fait valoir que le cas relevait d’une disposition spéciale qui permet la construction de structures temporaires dans des « circonstances exceptionnelles », lorsqu’elles sont nécessaires pour des raisons « d’importance nationale urgente ».
Les habitants, qui ont été rejoints par la Société pour la protection de la nature en Israël (SPNI), accusent la ville d’avoir enfreint les conditions fixées par la commission nationale de planification en endommageant les sables à l’intérieur et à l’extérieur de la zone où ils ont été autorisés à construire.
Les Maccabiades et la municipalité de Netanya ont rejeté ces allégations.
Les structures de la plage se trouvent en grande partie à l’intérieur d’une bande de terre censée servir d’espace vert non perturbé permettant la circulation des animaux entre les zones protégées.

L’espace vert, qui fait partie d’un corridor écologique s’étendant du ruisseau Poleg à une importante réserve d’iris au nord, a été déclaré corridor écologique par la commission nationale pour la protection des environnements côtiers en septembre.
Les habitants de la région se sont déjà opposés à un projet de grand complexe hôtelier qui, selon eux, empièterait sur un corridor beaucoup plus large que celui qui a été approuvé.
Ofir Yuval, qui a coordonné les efforts des habitants pour faire déplacer le site de la plage des Maccabiades, a déclaré que les responsables de la ville auraient pu organiser l’événement dans des sites de bord de mer existants à proximité, mais qu’ils ont choisi cet endroit pour « établir les faits sur le terrain et détruire la faune existante afin de mettre en œuvre le plan pour les hôtels très, très laids. C’est comme un coup de pied délibéré dans la fourmilière. »

Selon les écologistes, les dunes et la plage de la zone constituent un habitat important pour tous les animaux, des rongeurs aux petits reptiles en passant par les gazelles et, en ce moment, en particulier pour les tortues de mer qui viennent pondre leurs œufs sur le rivage.
L’Autorité israélienne de la nature et des parcs (INPA) s’est engagée à faire en sorte que le site retrouve son état antérieur après la fin des jeux, le 26 juillet. La commission de planification a donné à Netanya jusqu’au 1er août pour faire disparaître tous les signes de l’événement.
Un porte-parole de l’INPA a déclaré que, bien que cette section de la côte ne soit ni une réserve naturelle ni un parc national, mais sous l’autorité de Netanya, elle avait supervisé les travaux des Maccabiades dans une optique de protection de la nature, notamment pour garantir une section de plage propre et non éclairée où les tortues de mer pourraient pondre leurs œufs.
A la connaissance de l’INPA, « aucun dommage matériel ou irréversible » n’a été causé à la plage du fait de la construction, a-t-il ajouté.
Mais le professeur Avigdor Abelson, écologiste marin de l’université de Tel Aviv, a rétorqué qu’il s’agit « d’un écosystème avec une variété de créatures et dès que vous venez le modifier, vous ne pouvez pas revenir un mois plus tard, le recouvrir de sable et dire que tout est redevenu normal. Le changement est dommageable. »
La zone finira par se réhabiliter, a-t-il ajouté, mais il est impossible de dire dans combien de temps.
Il a déclaré qu’il était « scandaleux » d’autoriser la tenue des Maccabiades dans une zone où il est établi que les tortues de mer pondent leurs œufs, expliquant que le bruit et la lumière pouvaient dissuader les femelles de venir sur la plage, tandis que les changements dans l’état du sable pouvaient renvoyer à l’eau celles qui s’aventuraient sur la terre ferme avant de pondre leurs œufs.
Les tortues s’approchent de la plage à tout moment à partir du début de la soirée, a-t-il ajouté.
Le programme de divertissement de Netanya prévoit des concerts de stars locales en début de soirée.

Les dunes abritaient une multitude de petites créatures qui s’y cachaient, a poursuivi Abelson. « Ils ont certainement porté atteinte aux plantes et aux animaux qui s’y trouvaient », a-t-il dit, en faisant référence à la création d’une route d’accès.
Les sables compactés par la terre lourde et les installations de jeux étaient situés au-dessus de tunnels souterrains pour des créatures telles que les crabes des sables et les vers, a-t-il poursuivi.
Le plus aggravant est le « mépris de l’environnement », a-t-il poursuivi. Si les procédures de planification appropriées avaient été suivies, une évaluation environnementale de l’ensemble de la zone aurait été réalisée avant toute approbation.
Sans cela, la ville aurait pu prétendre après coup qu’il n’y avait rien ou presque rien d’important pour l’environnement à cet endroit.
La SPNI a documenté, avec les résidents, ce qu’elle considère comme des violations des conditions fixées par le Conseil national de planification.
Les violations présumées comprennent le déversement de grandes quantités de terre mélangée à des pierres pour soutenir l’infrastructure temporaire à l’intérieur du complexe des Maccabiades ; la création de routes d’accès en dehors de la zone autorisée en creusant dans les dunes et la plage et en versant une couche de mélange de terre et de pierres par-dessus ; et l’autorisation pour les véhicules lourds de circuler entre le complexe et le littoral sans autorisation, compactant le sable, laissant des traces de pneus et endommageant le fragile écosystème.
Selon la SPNI, il sera difficile de retirer complètement la terre et les pierres une fois les jeux terminés.
Les responsables de la ville ont déclaré à l’organisation de protection marine EcoOcean, lors d’une visite au début de l’année, qu’ils interdiraient les véhicules sur la bande de sable bordant la mer et qu’ils n’autoriseraient pas l’éclairage nocturne, sauf en cas d’urgence ou d’événement ponctuel, auquel cas il serait « minimal, orienté vers un but précis et non vers la mer », selon une lettre, consultée par le Times of Israel, adressée par un haut responsable d’EcoOcean au directeur des opérations de la ville de Netanya.

Mais le 8 juillet, un résident a photographié le complexe éclairé à 4h30 du matin.

La pollution lumineuse peut affecter le déplacement, la recherche de nourriture, la reproduction et la chasse des insectes, l’orientation des tortues qui se dirigent vers la mer et la capacité des oiseaux à éviter de voler dans les bâtiments.
Alors que les préparatifs des installations pour la 21e édition des Maccabiades se poursuivaient depuis des années dans tout le pays, Netanya n’a décidé qu’en novembre qu’elle voulait participer aux jeux.
Rika Eidelman, une militante locale également impliquée dans la bataille contre l’hôtel, a déclaré que les résidents étaient ravis d’accueillir la compétition.
« Notre problème est l’emplacement », a-t-elle souligné.
« Ils disent qu’ils vont remettre en état le site, mais personne ne sait combien de temps il faudra pour le réhabiliter », a-t-elle ajouté. « Ça revient à abattre un arbre et planter un jeune arbre à la place. La vraie question est de savoir pourquoi il faudrait le détruire. Ils ne comprennent tout simplement pas l’importance de la nature. »

Lors de l’examen de la demande par le comité de planification, le représentant du ministère de la Protection de l’environnement a noté que si la ville avait suivi le processus normal pour obtenir un permis de construire, elle se serait certainement vu opposer un refus en raison de la législation côtière. Dans cette zone, ne sont autorisés que de petits événements sur la plage.
La représentante, Ayala Geldman, s’est opposée à l’installation de stands commerciaux, bureaux, murs d’escalade, équipement pour un parcours d’obstacles « ninja » et terrains de basket-ball sur le sable à moins de 100 mètres du rivage, proposant de les transférer à l’est de la plage, dans une zone déjà assignée à des projets de développement.
L’utilisation de la plage, a-t-elle insisté, devrait être limitée aux installations, stands y compris, pour le beach-volley, le beach soccer, la natation et le surf. Ceux-ci devraient être implantés à une distance d’au moins 30 mètres de l’eau pour permettre au public de continuer à profiter du sable et de la mer, a-t-elle précisé.

Défendant le plan, l’ingénieur de la ville de Netanya, Tal Erez, a indiqué que les considérations écologiques avaient été examinées par un expert, en coordination avec l’INPA.
Rejetant la proposition de Geldman, le comité a voté par 13 voix contre 2 pour exempter la municipalité du permis de construire, ce que la ministre de l’Intérieur, Ayelet Shaked, a approuvé en janvier.
Les installations que Geldman voulait relocaliser ont depuis été construites sur la plage.
En mars, la SPNI et les résidents ont fait appel de l’exemption devant la Cour Suprême. Le tribunal a décidé de ne pas intervenir.
On ne sait toujours pas dans quelle mesure les organes compétents de l’État ont contrôlé les travaux ou fait en sorte d’interrompre ceux susceptibles d’enfreindre les conditions fixées par les autorités.
La semaine dernière, le conseiller juridique de la SPNI, Asaf Rosenbloom, en a appelé au ministère de la Protection de l’environnement, à l’Autorité israélienne de la nature et des parcs et à l’ingénieur de la ville de Netanya pour faire stopper des travaux qui, selon lui, violent les conditions fixées par le conseil de planification.
Le directeur de l’environnement marin au ministère de la Protection de l’environnement, Rani Amir, a répondu que l’organisation devait contacter le ministère de l’Intérieur, le comité national de planification et leurs organes de surveillance.

Le ministère de l’Intérieur a renvoyé le Times of Israel au Comité national de planification. Le comité de planification a adressé le procès-verbal de la réunion en question et renvoyé ce rapporteur au ministère de la Protection de l’environnement. Ce dernier a déclaré avoir contacté la municipalité de Netanya et l’INPA dès le début des travaux afin de s’assurer que tout était conforme, et a réitéré l’engagement de l’INPA de veiller à ce que le site soit remis dans son état initial à l’issue des jeux.
Le comité des Maccabiades a déclaré : « Les accusations de dégâts occasionnés à la plage sont fausses et ne reflètent aucunement la réalité. »
« Les travaux à Poleg Beach sont effectués sous étroite surveillance et en pleine coordination avec l’Autorité de la nature et des parcs, qui inspecte toutes nos actions sur le terrain, avec un grand soin pour l’environnement et les animaux, sans l’ombre d’une entorse aux consignes. »
Préalablement aux travaux, l’INPA avait retiré des plantes protégées et des dizaines de bénévoles, plus de 12 tonnes de déchets, poursuit le communiqué.
Il se terminait ainsi : « Nous invitons la SPNI à nous contacter directement et entamer un dialogue honnête et authentique pour évoquer leurs revendications. »
La municipalité de Netanya a déclaré s’aligner sur les propos tenus par le comité des Maccabiades.
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