Netanyahu balaie les critiques de Nides et appelle au « respect » des démocraties
S’adressant aux dirigeants juifs américains au sujet de la réforme judiciaire, l’ambassadeur américain a précisé : « Je n’ai pas dit d'arrêter, mais de ralentir »
Carrie Keller-Lynn est la correspondante politique et juridique du Times of Israël.

Face aux responsables américains qui, en nombre, mettent en garde contre le projet de réforme judiciaire de son gouvernement, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a déclaré dimanche aux dirigeants juifs américains, réunis en Israël, que l’Etat juif resterait démocratique et que ses réformes devaient être respectées.
« Israël est une démocratie et le restera, avec la règle de la majorité et des garanties appropriées pour les libertés civiles », a déclaré Netanyahu à la Conférence des présidents des principales organisations juives américaines lors de leur événement annuel à Jérusalem.
« Les démocraties devraient respecter la volonté des autres peuples libres, tout comme nous respectons leurs décisions démocratiques », a ajouté le Premier ministre, en écho sans doute aux propos de l’ambassadeur américain, Tom Nides, qui a déclaré qu’Israël ferait bien de « freiner » son projet de concentration du pouvoir entre les mains de l’exécutif aux dépens du pouvoir judiciaire.
Le Premier ministre a également dénoncé un discours qui, selon lui, incite à la violence – notamment politique -, et a donné lieu à des avertissements du chef de la police israélienne et du Conseil des ministres.
Apres avoir souligné cette menace, Netanyahu a déclaré : « Nous sommes un peuple, avec un destin, un pays, une foi », ajoutant : « Ne vous attendez pas à la guerre civile, il n’y en aura pas. »
Netanyahu a confié sa frustration de ne pas pouvoir leur en dire plus à propos de la réforme, se disant contraint par un « ridicule… embargo », allusion à l’engagement qu’il a pris en 2020 en matière de conflits d’intérêts, qui lui permet de continuer à être Premier ministre durant son procès, mais pas de traiter de sujets susceptibles d’avoir une incidence sur son déroulement.
Nides, qui a pris la parole lors de la Conférence des présidents juste avant Netanyahu, a réitéré les propos qui ont fait la une des journaux, tout en soulignant qu’il n’appelait pas à l’arrêt complet de la réforme judiciaire.

« Je n’ai pas dit d’arrêter, mais de ralentir », a-t-il précisé.
« Il nous arrive d’exprimer notre point de vue… J’ai simplement dit que nous avions foi dans le consensus », a-t-il dit, rappelant que le président Isaac Herzog avait lancé des appels en ce sens.
Toutefois, « je n’ai rien à voir dans la façon dont les Israéliens choisissent leur Cour suprême », a-t-il ajouté. « C’est une démocratie pleine de vie, vraiment pleine de vie. »
S’exprimant au moment-même où il est apparu que les États-Unis étaient parvenus à convaincre l’Autorité palestinienne de retirer sa plainte, au Conseil de sécurité de l’ONU, contre les autorisations données aux implantations israéliennes, Nides a souligné que « ce qui nous lie, c’est l’amour de la démocratie et des institutions », et c’est « ce qui nous permet de défendre Israël à l’ONU, toujours et encore. Et nous continuerons à le faire. »
En Israël, un vote très controversé est prévu ce lundi, avec la première lecture à la Knesset du principal projet de loi concernant la réforme judiciaire.
Netanyahu, actuellement sous le coup de ce qu’il a décrit comme une « injonction au silence », qui lui interdit d’évoquer la réforme judiciaire, conformément à l’accord sur les conflits d’intérêts lié à ses procès pour corruption, avait dit que la réforme « rééquilibrerait » le pouvoir entre les représentants élus et le pouvoir judiciaire.
Les opposants à cette réforme estiment qu’elle met littéralement en péril la démocratie israélienne, en supprimant tout contrôle du pouvoir politique et en accordant la priorité à la majorité sur le devoir de protection des libertés civiles.
S’agissant de Netanyahu, Nides a déclaré « ne par remettre en question ses objectifs, ni ceux de quiconque au sein de sa coalition. Ils veulent tous la démocratie; Ils veulent tous la même chose. »
Même si la réforme judiciaire focalise l’attention de son gouvernement, le Premier ministre a rappelé ses deux grandes priorités internationales, à savoir l’inclusion de l’Arabie saoudite au sein des accords d’Abraham et la lutte contre la menace nucléaire iranienne.

Réaffirmant que son gouvernement travaillait activement à la conclusion d’un accord de paix avec l’Arabie saoudite, comme l’a rapporté vendredi Bloomberg, Netanyahu a déclaré qu’un tel succès, avec la principale puissance arabe sunnite, constituerait un véritable « saut quantique » diplomatique.
Netanyahu a expliqué que l’établissement de relations chaleureuses avec Riyad changerait les relations d’Israël avec le reste du monde arabe, entraînerait la « fin du conflit israélo-arabe, et non palestinien » et serait de nature à normaliser les relations d’Israël avec le monde musulman au sens large.
Netanyahu a évoqué son souhait que des infrastructures relient un jour la péninsule arabique au port de Haïfa, via un chemin de fer ou un oléoduc passant en Jordanie.
S’agissant des aspirations nucléaires de Téhéran, le Premier ministre a déclaré que « si l’Iran obtient l’arme nucléaire, il mettra Israël en danger, il mettra même en péril la paix dans le monde. Les dirigeants sont chaque jour plus nombreux – et c’est également vrai aux États-Unis et en Israël – à comprendre le danger que représente l’Iran. »
Il a ajouté qu’Israël « fera ce qu’il faut pour empêcher l’Iran d’obtenir l’arme nucléaire ».
Nides a par ailleurs confirmé que l’accord nucléaire iranien, dont les États-Unis se sont retirés en 2018, était toujours gelé, les États-Unis refusant de négocier – indirectement – avec l’Iran tant que la République islamique fournira à la Russie des drones utilisés contre l’Ukraine.

« Les Iraniens fournissent des drones à la Russie et ces drones tuent des Ukrainiens innocents. Il est hors de question que nous retournions à la table des négociations dans ces circonstances », a déclaré Nides.
« Comme l’a dit le président Biden, premièrement, nous ne regarderons pas l’Iran obtenir l’arme nucléaire, les bras croisés. Deuxièmement, toutes les options sont sur la table. Troisièmement, Israël peut et doit faire tout ce qu’il faut et nous sommes là pour le soutenir », a ajouté Nides.
« Un Iran nucléaire ne menace pas seulement Israël, mais tout le Moyen-Orient et même l’Amérique. C’est notre priorité », a poursuivi l’ambassadeur.
« La coopération entre Israël et les États-Unis vis-à-vis de l’Iran est parfaite, jour après jour. »