Refonte judiciaire, guerre : la double peine pour les marchés israéliens en 2023
Les actions locales ont sous-performé cette année par rapport aux actions mondiales et elles restent moins chères que les autres - et tout rebond en 2024 dépendra de la stabilité sécuritaire et politique
Sharon Wrobel est journaliste spécialisée dans les technologies pour le Times of Israel.
Les marchés financiers israéliens, cette année, se sont détachés de la tendance mondiale, touchés à la fois par le plan de refonte radicale du système judiciaire qui était avancé par le gouvernement dans le pays et par la guerre qui oppose actuellement l’État juif au Hamas, dans la bande de Gaza.
Les actions locales, en 2023, ont sous-performé par rapport aux indices boursiers mondiaux – qui ont augmenté d’environ 20 % malgré un environnement caractérisé par un taux d’intérêt élevé – tandis que les introductions en bourse ont connu un coup d’arrêt et que les capitaux et les emprunts faits par les sociétés ont ralenti, a fait savoir la Bourse de Tel Aviv dans son rapport annuel qui a été rendu public dimanche.
Ces dernières années, les actions israéliennes et le shekel étaient fortement liés à l’indice S&P 500 et aux actions technologiques mondiales, ce qui signifie que si l’indice boursier était en hausse aux États-Unis, le marché local suivait la même direction et que le shekel gagnait de la valeur et vice-versa.
En 2023, l’indice TA-35 des grands groupes a légèrement augmenté (1,4 %) et l’indice de référence TA-125 a connu une hausse de 1,8 % tandis que l’indice S&P 500 s’est élevé de presque 23 % et que le Nasdaq 100 a grimpé de 51 % pendant la même période.
Au début de l’année, le marcher boursier local avait essuyé les conséquences d’une incertitude politique croissante qui avait été entraînée par le projet très controversé de refonte radicale du système judiciaire qui était avancé par le gouvernement et par les craintes induites par les changements prévus dans le système de la justice qui, selon ses critiques et, parmi eux, d’éminents experts, menaçaient l’indépendance des tribunaux et rendaient moins prévisibles les affaires et les investissements.
L’indice boursier local, pour les huit premiers mois de l’année, a augmenté de 2 % à 3 % – un pourcentage à comparer avec les hausses à double chiffre enregistrées par les indices boursiers américain et européen, a noté le TASE. Au cours de l’année, le capital total soulevé auprès du public a plongé, atteignant environ 8,2 milliards de shekels – il s’élevait à 21,7 milliards en 2022 – tandis que la moyenne quotidienne du volume des transactions a baissé de 12 % d’une année sur l’autre.

Dans ce contexte d’incertitude politique, le public, en 2023, a retiré 30 milliards de shekels des fonds qu’il investit dans les actions et dans les obligations à la Bourse de Tel Aviv et il a placé 20,5 milliards de shekels dans des fonds investissant dans des titres, à l’étranger, ainsi que 53 milliards de shekels sur le marché monétaire, ont révélé les données divulguées par la Bourse.
Après que la guerre a éclaté – dans le sillage du massacre perpétré par 3 000 terroristes du Hamas qui, après avoir franchi la frontière, avaient semé la désolation dans les communautés du sud d’Israël, tuant 1 200 personnes, des civils en majorité – le shekel a plongé à son niveau le plus bas depuis plus d’une décennie.
Les actifs israéliens se sont rétablis depuis la fin du mois d’octobre, alors même que l’armée lançait sa campagne militaire visant à détruire le Hamas, à l’écarter du pouvoir à Gaza et à obtenir la libération des 240 otages approximativement qui avaient été enlevés sur le territoire israélien par les hommes armés du groupe terroriste. Depuis l’assaut terroriste sans précédent du 7 octobre, l’indice TA-125 a baissé de 0,7 %, a noté la Bourse.
Pour financer les coûts de la guerre qui sont estimés à environ 200 milliards de shekels, le gouvernement israélien, cette année, a soulevé près de 85 milliards de shekels grâce à la vente d’obligations au public – plus de deux fois le montant de l’émission de dette de 2022.
Alors que nous approchons 2024, Yanov Pagot, responsable des transactions à la Bourse de Tel Aviv, dit être optimiste – quoique prudent – en notant la sous-performance relative des titres locaux, la suppression du risque d’une éventuelle avancée du plan de refonte du système judiciaire avant la fin de la guerre et l’espoir que le taux d’intérêt, en Israël, devrait commencer à baisser. Des conditions qui rendront le marché israélien attractif pour les investisseurs.
« Le point de départ, début 2024, est favorable que ce soit concernant les prix du marché des actions ou la tendance future qui va s’amorcer pour le taux d’intérêt », déclare Pagot. « Les actions locales sont peu chères mais combler l’écart vis-à-vis du monde dépendra de la situation sécuritaire et de la stabilisation de la réalité politique ».

Alors que la guerre fait rage et que les combats à Gaza sont loin d’être terminés, il y a encore des risques pour les investisseurs et les traders qui veulent placer leur argent dans les entreprises israéliennes, avertit Pagot.
« La dette gouvernementale va connaître une hausse nette en présumant que le déficit budgétaire, dans l’économie israélienne, atteindra les 5 % à 6 % du produit intérieur brut – ce qui signifie que le ministère des Finances devra soulever environ 200 milliards de shekels en 2024, ce qui représente plus de deux-tiers de l’argent soulevé pendant toute l’année 2023 et quatre fois le montant de 2022 », continue Pagot. « L’adhésion à la responsabilité fiscale sera déterminante pour que le gouvernement puisse garantir que l’augmentation forte survenant dans le rapport dette-PIB n’aura pas d’impact négatif sur le coût de l’emprunt public ».
Terminant sur une note plus positive, Pagot souligne que la mise en place d’un gouvernement plus large, après la fin de la guerre, viendrait soutenir le marché local et aurait « des conséquences très favorables sur l’économie israélienne et sur le marché boursier israélien ».