Réformes judiciaires, postes ministériels : les dessous des accords de coalition
Les accords émergents donnent l'image d'une mosaïque d'arrangements politiques visant à satisfaire les idéologies diverses et parfois conflictuelles au sein de la coalition
Raoul Wootliff est le correspondant parlementaire du Times of Israël
Le leader de Yesh Atid, Yair Lapid, a donc informé mercredi le président Reuven Rivlin qu’il était parvenu à former un gouvernement dans lequel lui et le chef de Yamina, Naftali Bennett, se relaieront en tant que Premier ministre, à la tête d’une coalition de partis du centre, de gauche et de droite, ainsi que du parti islamiste Raam.
Avant la prestation de serment du nouveau gouvernement, Lapid doit, selon la loi, présenter au public les accords de coalition signés entre les différents partis de sa coalition hétéroclite. Il ne l’a pas encore fait, et les accords ne sont pas encore finalisés, mais la plupart des questions ont fait l’objet d’un accord.
Les déclarations générales annonçant les accords, les affirmations de divers législateurs sur les résultats des négociations et les multiples reportages sur les accords émergents donnent l’image d’une mosaïque d’arrangements politiques visant à satisfaire les idéologies diverses et parfois conflictuelles au sein de la coalition.
Qui a obtenu quoi ?
Selon les termes de la nouvelle coalition, Bennett sera Premier ministre jusqu’en août 2023, date à laquelle Lapid lui succédera jusqu’à la fin du mandat de la Knesset en novembre 2025.
Le gouvernement Lapid-Bennett envisagé est soutenu par huit des 13 partis qui ont remporté des sièges lors des élections du 23 mars, pour un total attendu de 61 voix dans la Knesset de 120 membres : Yesh Atid (17 sièges), Kakhol lavan (8), Yisrael Beytenu (7), Labor (7), Yamina (6 de ses 7 députés), Tikva Hadasha (6), Meretz (6) et Raam (4).
En termes de postes ministériels de premier plan, en vertu des accords de coalition qui se dessinent, Lapid occupera le poste de ministre des Affaires étrangères au cours des deux premières années du gouvernement, le chef de Kakhol lavan, Benny Gantz, restera ministre de la Défense et le Trésor sera confié au chef d’Yisrael Beytenu, Avigdor Liberman. Le leader de Tikva Hadasha, Gideon Saar, sera ministre de la Justice, tandis qu’Ayelet Shaked, de Yamina, sera ministre de l’Intérieur. La travailliste Merav Michaeli a reçu le portefeuille des Transports et son collègue Omer Barlev sera ministre de la Sécurité intérieure. Le leader du parti Meretz, Nitzan Horowitz, sera nommé ministre de la Santé, tandis que sa collègue Tamar Zandberg sera ministre de la Protection de l’environnement.
Yesh Atid commencera avec quatre postes ministériels, et Yamina en obtiendra trois. Tikva Hadasha et Kakhol lavan auront chacun quatre ministères, tandis qu’Yisrael Beytenu, Labor et Meretz en auront chacun trois.
Le cabinet de sécurité de haut niveau comprendrait trois membres de Yamina – Bennett, Shaked et Matan Kahana. Il y aura trois membres de Tikva Hadasha – Sa’ar et Elkin et Yoaz Hendel, ainsi que Liberman de Yisrael Beytenu. Yesh Atid n’aura qu’un seul membre du cabinet de
sécurité : Lapid. Il y aura également deux représentants du parti travailliste – Michaeli et Bar-Lev ; un représentant du parti Kakhol lavan – Gantz ; et un du parti Meretz – Horowitz.
Yamina et Tikva Hadasha
En signant le nouveau gouvernement en dernier, quelques minutes avant que Lapid ne s’entretienne avec Rivlin, les partis de droite Tikva Hadasha et Yamina ont déclaré qu’ils s’étaient mis d’accord avec Yesh Atid sur « une série de réformes et de réalisations socio-économiques ».
Les partis ont déclaré qu’ils étaient parvenus à des accords pour que le prochain gouvernement scinde le poste de procureur général, qui est actuellement le principal conseiller juridique du gouvernement et le chef du ministère public ; qu’il introduise des réformes pour les suspects criminels faisant l’objet d’une enquête ; qu’il transfère la responsabilité de l’éducation de la petite enfance au ministère de l’Education, qui sera contrôlé par Tikva Hadasha ; la création d’une université en Galilée ; la validation de la construction de 300 000 logements à des prix abordables ; la conduite d’une réforme du cannabis et la régulation du marché local de la marijuana ; la mise en place d’un système de supervision pour l’entretien de la zone C de la Cisjordanie, qui est sous le contrôle direct d’Israël.
Yamina a également obtenu une concession clé de la part du centre-gauche au cours des dernières heures des négociations : Shaked sera la représentante de la coalition au sein de la commission des nominations judiciaires pour les deux premières années du gouvernement, à la place de Merav Michaeli, du Parti travailliste, qui occupera ce poste pour les deux dernières années.
Yisrael Beytenu
Le parti Yisrael Beytenu de Liberman, parti laïc convaincu, a déclaré qu’il était parvenu à une série d’accords sur la religion et l’État et sur les directives du gouvernement en la matière.
En outre, un accord a été conclu sur la promotion d’une loi sur les projets nationaux comme « l’un des moteurs de croissance prévus pour l’économie israélienne. »
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Les travaillistes
Bien que le Parti travailliste ait été contraint de céder à Yamina sur la commission de nomination des juges, il en a été largement récompensé.
Le parti présidera la commission du travail, du bien-être et de la santé de la Knesset et la commission de la constitution, du droit et de la justice ; un représentant du parti siégera au comité judiciaire pendant toute la durée du mandat du gouvernement (mais pas en tant que représentant de la coalition) ; un membre du parti sera nommé ministre adjoint, mais on ne sait pas encore de quel ministère ; deux membres du parti siégeront au puissant cabinet de sécurité.
Mariage gay : Meretz promet que la coalition y est favorable ; Raam nuance
Raam
Selon un communiqué du parti musulman dirigé par Mansour Abbas, Naftali Bennett, chef de Yamina, et Lapid ont promis 30 milliards de shekels sur cinq ans pour stimuler l’économie, et 2,5 millions de shekels supplémentaires pour lutter contre la violence et le crime organisé au sein de la société arabe.
20 millions de shekels supplémentaires seront investis au cours des 10 prochaines années pour réparer les infrastructures en ruine dans les villes et villages arabes, a déclaré Raam.
Trois villages bédouins non reconnus – Abda, Khashm al-Zena et Rakhma – devraient être légalisés dans une décision du gouvernement, selon Raam.
Quant à la loi controversée de Kaminitz de 2017 ciblant les constructions arabes illégales, Raam dit qu’il y aura des discussions sur sa modification au cours des six prochains mois. En attendant, une décision déjà en place consistant à geler certaines parties de la loi sera prolongée jusqu’en 2024.