Saar : La solution à deux Etats est « une illusion »
Attaquant le Premier ministre, son challenger a blâmé ses "concessions sans fin", qui ont aidé à perpétuer l'idée qu'un Etat palestinien était la seule solution
Gideon Saar, seul challenger de Benjamin Netanyahu dans la prochaine course à la direction du Likud, a expliqué dimanche qu’une solution à deux Etats avec les Palestiniens était une « illusion », attaquant au passage le Premier ministre pour avoir accordé une crédibilité à cette option au cours de la dernière décennie.
« A travers le monde, on ne cesse de dire qu’une solution à deux Etats reste le parcours à suivre pour un accord », a dit Saar, s’exprimant lors d’une conférence. « Il faut que je vous le dise : Ce positionnement n’aide personne. Deux Etats, c’est une illusion ».
Saar a indiqué qu’il était apparu clairement, au cours de décennies de négociations autour d’une solution de deux Etats, que la paix avait été impossible. Il a également blâmé les Palestiniens qui n’ont « jamais été capables d’accepter un compromis malgré des offres très généreuses ».
Saar a fustigé Netanyahu pour avoir perpétué l’idée que deux Etats étaient la seule solution, l’accusant d’avoir fait des « concessions sans fin » au président de l’Autorité palestinienne (AP), Mahmoud Abbas, au cours de la dernière décennie avec notamment un gel des implantations en Cisjordanie.
Il a également fait référence au fameux discours prononcé par Netanyahu à l’université de Bar-Ilan en 2009, dans lequel le Premier ministre avait exprimé son soutien à la création d’un Etat palestinien. Netanyahu a, depuis, déclaré que les conditions nécessaires à la création d’un Etat n’existaient plus dans ce qui est devenu la réalité actuelle du Moyen-Orient.
Saar a indiqué qu’il fallait mettre en place une entité palestinienne autonome liée à la Jordanie dans le cadre d’une fédération.
« Entre le fleuve Jourdain et la mer Méditerranée, il ne peut y avoir un autre Etat », a-t-il dit.
Netanyahu a toutefois, ces dernières années, pris ses distances face au soutien tacite qu’il apportait à une solution à deux Etats, allant jusqu’à promettre d’annexer la vallée du Jourdain en Cisjordanie s’il était réélu.
La députée du Likud Sharren Haskel a fait savoir dimanche qu’elle soutiendrait Saar, devenant la quatrième législatrice à endosser publiquement sa candidature. La majorité des députés du Likud ont annoncé soutenir Netanyahu, et quelques parlementaires notables ont choisi, pour leur part, de garder le silence.
Malgré les défections et les inculpations dont il fait l’objet, Netanyahu devrait l’emporter haut-la-main face à Saar.
Ce vote marque le premier défi réel lancé au leadership de Netanyahu en 14 ans passés à la tête de la formation réputée très loyale vis-à-vis de son chef. Lui et Saar sont les seuls concurrents à avoir annoncé qu’ils se présenteraient aux primaires.
Saar clame que Netanyahu est une personnalité clivante et qu’il a prouvé qu’il était incapable de rassembler une coalition après avoir échoué à rassembler une majorité de gouvernement suite aux deux élections nationales qui ont eu lieu au mois d’avril et au mois de septembre.
L’Etat juif retournera aux urnes le 2 mars.
Saar a fait part de son opposition à la solution à deux Etats dans le passé. Au début de l’année, il a figuré parmi un groupe de députés de droite ayant envoyé une missive aux législateurs américains qui mettait en garde sur le fait que les appels à une solution à deux Etats étaient « bien plus dangereux » pour l’Etat juif que les initiatives de boycott à son encontre, leur recommandant vivement de s’abstenir d’émettre de tels appels à l’avenir.
« Nous pensons que la proposition de résolution contient une erreur grave parce qu’elle exprime, entre autres choses, un soutien pour ce qu’on appelle une ‘solution à deux Etats’, ce qui signifie l’établissement d’un ‘Etat palestinien’ au cœur d’un Israël minuscule… Nous voulons établir clairement que l’établissement d’un Etat palestinien serait finalement beaucoup plus dangereux pour Israël que le BDS », avaient-ils écrit.
Le courrier avait été envoyé aux bureaux des quatre membres du Congrès qui avaient co-parrainé une résolution condamnant le BDS mais appelant également à la mise en place d’une solution à deux Etats – Brad Schneider, Lee Zeldin, Jerry Nadler et Ann Wagner. Il avait été écrit et envoyé à l’initiative du chef du conseil régional de Samarie, Yossi Dagan, du caucus de la terre d’Israël à la Knesset et de la conférence nationale du Likud, un groupe informel de faucons au sein du parti au pouvoir.
Créer un Etat palestinien dans la région « nuirait gravement » à la sécurité nationale d’Israël comme à celle des Etats-Unis, avaient écrit les députés israéliens.
Ces dernières années, l’administration Trump s’est écartée du soutien traditionnel apporté à la solution à deux Etats.
Le mois dernier, le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo a annoncé que les Etats-Unis assouplissaient leur positionnement sur les implantations israéliennes en Cisjordanie. Pompeo a rejeté un avis juridique qui avait été émis en 1978 par le département d’Etat, et selon lequel les implantations civiles, dans les territoires occupés, « contredisaient la loi internationale ».
Parmi les initiatives prises par les Etats-Unis qui ont affaibli les efforts des Palestiniens à obtenir l’Etat auquel ils aspirent, la décision prise par le président Donald Trump de reconnaître Jérusalem en tant que capitale d’Israël, le déplacement de l’ambassade dans la ville sainte et la fermeture du bureau diplomatique palestinien à Washington – des démarches largement saluées en Israël.
Jared Kushner, le gendre de Trump qui est aussi responsable du processus de paix au Moyen-Orient, a indiqué que le plan de paix de l’administration – qui doit encore être révélé – éviterait d’évoquer l’expression de solution à deux Etats.
« Je réalise que [cette formulation] signifie des choses différentes pour des gens différents », a-t-il expliqué au début de l’année. « Si vous dites ‘deux Etats’ aux Israéliens, cela signifie une chose et si vous dites ‘deux Etats’ aux Palestiniens, ça signifie autre chose. Alors on s’est dit : ‘On ne va pas employer cette formulation’. Et juste travailler sur les détails de ce qu’elle veut dire ».