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Interview

Sharansky veut une « Knesset consultative » pour se réconcilier avec la Diaspora

L'état juif et la Diaspora, souvent, ne se comprennent pas. Cela menace "notre capacité à vivre comme un seul peuple", prévient le chef sortant de l'Agence juive

David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).

Le président entrant de l'Agence juive Isaac Herzog avec le président sortant Natan Sharansky, à la conférence du conseil d'administration de l'Agence juive, à l'hôtel Orient à Jérusalem, le 24 juin 2018. (Hadas Parush/Flash90)
Le président entrant de l'Agence juive Isaac Herzog avec le président sortant Natan Sharansky, à la conférence du conseil d'administration de l'Agence juive, à l'hôtel Orient à Jérusalem, le 24 juin 2018. (Hadas Parush/Flash90)

Natan Sharansky, le président sortant de l’Agence juive, a appelé à la création d’un conseil public permanent – « une sorte de Knesset consultative » – où les dirigeants israéliens et ceux de la Diaspora discuteraient et chercheraient à résoudre les points de désaccord.

Sharansky, ancien prisonnier de Sion et icône du mouvement pour la libération des Juifs soviétiques, qui est devenu plus tard député et ministre du gouvernement israélien, quitte la direction de l’Agence cette semaine au bout de neuf ans, au milieu de frictions profondes entre Israël et certaines parties de la diaspora juive sur des questions comme les dispositions concernant la prière non orthodoxe au mur Occidental et les règles israéliennes sur la conversion au judaïsme.

Le chef de l’Agence juive, qui avait prévenu l’année dernière que la crise du mur Occidental avait conduit certaines communautés et individus juifs à reconsidérer la possibilité de se rendre en Israël ou de faire des dons, a déclaré dans une interview accordée au Times of Israel que la distance entre Israël et la Diaspora provient du simple fait que « nous ne nous parlons pas directement les uns avec les autres ».

Pour ce faire, Sharansky, 70 ans, a proposé la création d’un forum où les dirigeants israéliens et ceux de la Diaspora « peuvent se rencontrer et discuter publiquement de leurs désaccords ».

Il a souligné qu’il ne pouvait avoir qu’un rôle consultatif et ne pouvait donc pas être décrit comme un Sénat ou un Parlement. Mais simplement en se réunissant régulièrement et en tenant des débats publics, a-t-il dit, cela pourrait réduire les tensions.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu avec le chef de l’Agence juive Natan Sharansky à New York, le 7 mars 2018. (Haim Zach/GPO)

Il a fait observer que l’idée n’était pas originale. Elle a été proposée par les présidents Ezer Weizman et Moshe Katsav, entre autres.

Weizman a réussi à réunir les dirigeants de la Diaspora pour un premier dialogue de ce genre en 1994, mais la première chose qui s’est produite, c’est que Weizman leur a demandé pourquoi ils n’avaient pas fait leur alyah, se souvient Sharansky, et « c’était la fin de la conversation ».

Citant des sondages d’opinion qui indiquent que les Juifs américains ont largement soutenu le président Barack Obama et n’aiment pas le président Donald Trump, alors qu’avec les Israéliens c’est l’inverse, il a fait valoir que les deux seules communautés juives fortes de plusieurs millions de personnes dans le monde ont souvent des priorités très différentes et des besoins très différents – ce qui exige un dialogue constant et une compréhension mutuelle.

Ces attitudes opposées vis-à-vis d’Obama et de Trump, a-t-il précisé, n’ont « rien à voir avec ‘l’arrogant Bibi [Netanyahu]’ ou ‘les impulsions suicidaires des juifs réformés' ».

Le président élu Donald Trump avec son prédécesseur Barack Obama dans le bureau ovale de Washington DC le 10 novembre 2016 (Win McNamee/Getty Images/AFP).

Au contraire, selon Sharansky, « Israël considère la menace nucléaire de l’Iran comme la plus grande menace » et Netanyahu est soutenu par la plupart des Israéliens pour y faire face, tandis que le fait qu’Obama était prêt à transformer le régime iranien en une superpuissance locale « sans même exiger qu’ils cessent de menacer Israël », le rendait « objectivement impopulaire » en Israël.

D’autre part, a poursuivi Sharansky, la survie des juifs américains exige qu’ils renforcent « la société américaine libérale, qui est tolérante envers les minorités. Pour eux, Trump est devenu un symbole de la menace pour la société dans laquelle ils peuvent, en tant que Juifs, vivre heureux et prospérer. »

Plutôt que de permettre que ce genre d’asymétrie devienne une menace inéluctable pour la capacité des Juifs à vivre comme un seul peuple, il a exhorté : « nous devons comprendre qu’il y aura toujours des choses sur lesquelles nous ne sommes pas d’accord, et essayer tout le temps d’élargir la plate-forme sur laquelle nous sommes d’accord sur ce qui doit être fait pour la survie du peuple juif ». D’où l’impératif d’un dialogue permanent, ouvert et à un degré élevé.

Sharansky a cité plusieurs autres exemples du non-dialogue destructeur actuel. En ce qui concerne les politiques relatives aux 38 000 migrants en Israël, par exemple, il a dit : « Pour certaines personnes, c’est si clair : nous devons défendre notre État démocratique juif ; il est important de ne rien leur donner ». Mais « d’autres disent qu’en tant qu’État démocratique juif, nous sommes obligés de leur donner la citoyenneté. Les deux camps ont leurs propres arguments, liés à différentes facettes de notre tradition. Mais comme nous vivons si différemment, nous ne faisons pas assez d’efforts pour comprendre l’autre camp. »

De même, en ce qui concerne les tensions entre les différents courants du judaïsme, notamment à propos des prières au mur Occidental, a-t-il dit, nombreux sont ceux qui, en Israël, « pensent que les réformés sont une sorte de secte » alors que « la plupart des Juifs libéraux américains pensent que tout cela est simplement une capitulation devant un petit groupe de fanatiques ultra-orthodoxes, et que si seulement le Premier ministre était moins faible, cela aurait pu être très différent ».

Le fait est, a-t-il dit, qu’il existe un « type différent de mentalité » sur ces questions entre Israël et la diaspora, et combler les écarts « nécessite une discussion permanente ».

Sharansky a qualifié la décision de Netanyahu l’année dernière de geler l’accord laborieusement négocié qu’il a lui-même supervisé entre Israël et la Diaspora pour la création d’une zone de prière pluraliste permanente au mur Occidental, de « très dramatique… voire tragique ». Mais il a fait valoir que le processus progressait toujours « dans la bonne direction ».

« Cela ressemble à un grand échec, a-t-il admis, mais c’est un succès, même si nous n’avons pas encore atteint une fin heureuse ».

« Parce que le gouvernement est toujours vulnérable au regard des considérations de la coalition, ce ne sera jamais facile », a expliqué Sharansky, mais il s’est dit convaincu que Netanyahu irait de l’avant et construirait l’espace permanent, sans toutefois respecter les engagements gelés de l’accord concernant une entrée commune à toute la zone du mur Occidental et un rôle formel pour les représentants juifs non orthodoxes dans la supervision de la zone. Ces deux autres engagements sont prisonniers de la politique de coalition israélienne, a-t-il reconnu, mais il a ajouté : « Mon objectif est qu’à un moment donné, le Premier ministre décidera que son leadership n’est pas en danger [des partis de coalition ultra-orthodoxes qui menacent de démissionner], et que c’est important ».

Des rabbins conservative et réformés américains et des membres des Femmes du Mur brandissent des rouleaux de la Torah durant une manifestation contre l’absence de construction d’un nouvel espace de prière, au mur Occidental, dans la Vieille Ville de Jérusalem, le 2 novembre 2016. (Crédit : Hadas Parush/Flash90)

En attendant, « j’ai dit aux réformés et aux libéraux, nous devons accepter ce que nous pouvons obtenir. Il ne s’agit pas de dire, cela nous suffit. Bien sûr que non. C’est une violation de l’accord. Mais soyons de vrais sionistes. Prenez ce que vous pouvez obtenir et continuez à négocier. »

Sharansky a rappelé qu’il était entré en fonction en tant qu’allié du Premier ministre et qu’il croyait que Netanyahu le voyait toujours sous cet angle, même s’ils étaient en désaccord public sur des questions telles que la prière au mur Occidental.

Il s’est dit fier que l’Agence juive, pendant son mandat, ait agi comme « une voix indépendante, représentant les intérêts et les opinions des juifs du monde entier dans le dialogue avec le gouvernement ».

Mais en même temps, il avait servi de « partenaire stratégique du gouvernement pour représenter les intérêts d’Israël et du peuple juif dans le monde entier ». Cela a été souligné, a-t-il dit, par l’augmentation spectaculaire de la participation du gouvernement israélien aux projets de l’Agence juive et de son financement.

Il a également souligné sa satisfaction de voir que l’alyah annuelle au cours de son mandat est passée de 16-17 000 à 29-31 000.

« Cette augmentation, a-t-il expliqué, est due principalement aux personnes qui ont participé au programme MASA (le programme phare de l’Agence pour l’étude et le bénévolat en Israël, d’une durée de 5 à 12 mois) et qui sont ensuite revenues pour rester, qui étaient dans nos séminaires, dans nos camps d’été.

De jeunes adultes juifs venus du monde entier participant au programme Taglit Birthright célèbrent les 10 ans du programme lors d’un événement au Centre de conférence international à Jérusalem (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Surtout, a-t-il ajouté, il y a eu un débat fondamental sur la question de savoir si Israël, en cherchant à encourager l’alyah, devrait allouer des fonds pour renforcer les communautés juives de diaspora et l’éducation juive dans ces pays.

Sharansky a affirmé qu’il croyait fermement en cette approche et qu’elle a prévalu. « L’essentiel est de renforcer l’identité juive », a-t-il poursuivi. « Pour qu’il y ait plus d’alyah, il faut qu’il y ait plus de Juifs. Et pour avoir plus de Juifs, il faut des communautés plus fortes. Cette idée a été perçue comme extrêmement discutable et problématique. » Mais, a-t-il dit, les faits et les chiffres ont montré qu’elle était juste.

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