Smotrich accepte finalement de verser les fonds aux villes arabes – sous supervision
Selon le ministre des Finances, un tel contrôle est nécessaire pour empêcher l'argent de passer aux mains des groupes criminels dans un contexte de vague de violences
Lors d’une réunion organisée dimanche soir en présence de responsables de localités arabes et du chef du Shin Bet, Ronen Bar, le ministre des Finances Bezalel Smotrich a accepté de verser les fonds alloués aux municipalités arabes, des fonds qu’il avait récemment gelés. Il a toutefois exprimé son inquiétude quant au fait que ces fonds ne tombent entre les mains des organisations criminelles.
Smotrich a indiqué que les 200 millions de shekels seraient transférés, au cours des prochaines semaines, au ministère de l’Intérieur et qu’il chercherait lui-même à mettre en place un mécanisme permettant de mieux superviser l’utilisation de cette enveloppe financière.
Il a annoncé que le gouvernement, dans les deux semaines à venir, devrait développer et approuver des protocoles permettant d’empêcher les organisations criminelles de profiter de l’afflux des fonds et une fois que ces protocoles seraient mis en œuvre, alors le ministère de l’Intérieur pourrait verser l’argent aux municipalités arabes.
Dans un communiqué qui a été diffusé lundi matin, le bureau de Smotrich a déclaré que la coalition fera aussi avancer une enveloppe législative qui définira de nouveaux outils de lutte contre le crime organisé. Le bureau du ministre des Finances a annoncé que cette décision était conforme à une directive donnée par le Premier ministre Benjamin Netanyahu.
De plus, le Trésor va augmenter les fonds versés à la police israélienne « de dizaines de millions de shekels », a fait savoir le bureau de Smotrich. Objectif : renforcer les technologies requises pour améliorer la sécurité dans la société arabe, et consolider les forces chargées de faire appliquer la loi.
Le chef de la police, Kobi Shabtai, et le ministre de l’Intérieur Moshe Arbel étaient aussi présents lors de cette rencontre. La police et le Shin Bet ont accepté de coopérer avec les autres autorités pour empêcher une détournement des subventions.
Les ministères des Finances et de l’Intérieur ont fait savoir qu’ils alloueraient des fonds et qu’ils prendraient des mesures pour lutter contre le crime organisé dans la société arabe, qui serait à l’origine d’un nombre d’homicides qui a grimpé en flèche dans la communauté.
La réunion a aussi porté sur les menaces faites aux candidats aux élections municipales dans le cadre de cette vague de violences, des menaces émanant des gangs criminels.
La semaine dernière, la chaîne publique Kan a indiqué qu’il y avait entre 15 et 20 municipalités arabes où des candidats et des responsables actuellement en fonction ont été menacés par des organisations criminelles.
Un candidat aux élections municipales de Kafr Yasif, dans le nord d’Israël, s’est retiré de la course dimanche, citant les récents meurtres survenus dans sa ville et des coups de feu tirés en direction de son habitation.
« C’est un échec terrible de la part de l’État », a dit Hilal Khouri. « Je voulais apporter le changement, mais ce n’est pas sur la table et j’ai donc ainsi décidé de me retirer. »
Le ministre de la Sécurité nationale d’extrême-droite Itamar Ben Gvir, en charge de la police, n’avait pas été convié à la rencontre, ont confié des responsables proches du dossier au site Walla. Selon le site, Ben Gvir s’était opposé à cette réunion.
Ben Gvir avait fait campagne sur la promesse de renforcer la sécurité publique. À la tête du ministère chargé de superviser la police, il s’avère qu’il est dans l’incapacité d’endiguer la vague criminelle croissante.
Il avait été largement critiqué, la semaine dernière, pour avoir déclaré que « la plus grande menace » représentée par cette vague de violences était sa possible propagation aux communautés juives.
Les leaders de l’opposition ont appelé le Premier ministre Benjamin Netanyahu à renvoyer le ministre qui, selon eux, est vraisemblablement inapte à son poste.
Dans la journée de dimanche, Smotrich, selon des informations qui ont circulé dans les médias, se serait âprement disputé avec le ministre de l’Éducation Yoav Kisch pendant la réunion hebdomadaire de cabinet. Ce dernier l’aurait accusé « d’écraser la société arabe » en refusant de verser les fonds qui lui sont destinés.
Le ministre des Finances aurait rétorqué que Kisch disait « n’importe quoi » et qu’il ne maîtrisait pas les détails du dossier.
Intervenant dans la querelle, Netanyahu aurait indiqué qu’il y avait une « urgence impossible à ignorer » concernant le transfert des fonds, tout en réclamant, comme Smotrich, un système de supervision. « Faites-nous une proposition et nous la mettrons en œuvre », a-t-il dit.
Un nouveau plan qui a été récemment présenté au cabinet cherche à garantir que les fonds versés aux municipalités arabes ne finiront pas entre les mains des organisations criminelles. Ce nouveau système classerait les municipalités arabes en fonction du risque potentiel de leur infiltration par les groupes criminels organisés. Avancé par Smotrich et par le ministre de l’Égalité sociale, Amichai Chikli, le plan, qui a été discuté lors d’une réunion du cabinet, la semaine dernière, aurait le soutien de Netanyahu.
La décision prise de retenir les fonds avait suscité les critiques féroces de l’opposition et même de membres de la coalition, avec parmi eux le ministre de l’Intérieur, Moshe Arbel.
Suite à cette controverse, le bureau de Netanyahu avait annoncé, le 9 août, qu’un mécanisme de contrôle non-précisé serait mis en place avant le transfert effectif des fonds. Récemment, Smotrich a rencontré les leaders des municipalités arabes et le Shin Bet pour discuter des options visant à garantir que les fonds ne seront pas mal utilisés.
Selon la dernière proposition présentée par Smotrich et Chikli, les municipalités arabes seront classées selon un système à trois niveaux, sur le modèle d’un « feu de signalisation ».
Les localités « vertes » recevront des fonds sans conditions, les « jaunes » recevront des fonds sous surveillance et les « rouges » verront leurs fonds gelés dans l’attente d’une solution garantissant qu’ils ne finiront pas entre les mains d’organisations criminelles. Le classement sera décidé par le ministère de l’Intérieur, la police et le Shin Bet, selon la chaîne publique israélienne Kan.
Les détails de ce système de supervision sont encore discutés, a indiqué un porte-parole de Smotrich au Times of Israel.
Alors que les élections locales devraient avoir lieu dans deux mois, certains experts ont averti que certains criminels étaient susceptibles de menacer des responsables locaux pour obtenir leurs faveurs, recourant pour cela de manière occasionnelle à la violence, ou de leur faire du chantage.
Selon le groupe de veille anti-violences Abraham Initiatives, 157 membres de la communauté arabe israélienne ont été tués depuis le début de l’année, majoritairement par arme à feu. Il y avait eu 71 homicides pendant la même période, l’année dernière.
Parmi les récents meurtres, un quadruple homicide choquant qui est survenu mardi dans la ville arabe d’Abu Snan. L’une des victimes, Ghazi Saab, se présentait à la tête de la mairie lors du prochain scrutin et il avait annoncé le lancement de sa campagne quelques heures seulement avant sa mort. Cette attaque meurtrière avait eu lieu vingt-quatre heures après le meurtre du directeur-général de la municipalité de Tira, Abdu Rahman Kashua.