Vendôme : une cérémonie en hommage à des Justes repoussée à juin par peur d’amalgame
Invoquant d'abord le calendrier électoral, la mairie a finalement dit craindre que des amalgames ne soient faits avec la guerre en cours entre Israël et le Hamas à Gaza

Une cérémonie d’hommage à des Justes français a été annulée par la mairie de Vendôme (Loir-et-Cher) alors qu’elle devait avoir lieu le 28 mai prochain. Une première en France, d’après une information publiée dans Le Point.
Paul Sebaoun, délégué régional du Comité français pour Yad Vashem, avait été reçu par le maire UDI de la ville, Laurent Brillard, mi-mars, pour discuter de l’organisation d’une cérémonie en hommage à Jean et Jeanne Philippeau, un couple reconnu « Justes parmi les nations » pour avoir caché Arlette Testyler-Reimann et sa sœur à partir de 1942, les sauvant ainsi de la déportation.
Mais, le 26 mars dernier, la mairie fait volte-face et décide du report de la cérémonie à une date ultérieure aux élections municipales de mars 2026. « La proximité des élections locales, qui risque de limiter la pleine mobilisation de la municipalité et de la population locale autour de cet événement majeur » et le « contexte géopolitique actuel, marqué par le conflit opposant l’État d’Israël et le Hamas, qui suscite des sensibilités particulières au sein de nos différentes communautés » comptent parmi les raisons invoquées.
Paul Sebaoun est resté perplexe face à la décision de la municipalité, notamment parce que les élections locales n’auront pas lieu avant un an. Le Comité français pour Yad Vashem a, par ailleurs, tenté de faire valoir le fait que « pour Arlette Testyler-Reimann, âgée de 92 ans, le temps est compté et son témoignage, très valorisant pour Vendôme, précieux ».
Enfin, l’association a indiqué que « dans un contexte national et international marqué par la résurgence inquiétante d’un antisémitisme totalement désinhibé – l’agression récente du rabbin d’Orléans nous le rappelle – le courage dont ont fait preuve les Justes, dans des circonstances bien plus périlleuses, et les valeurs universelles dont ils sont porteurs sont aussi une façon d’affirmer, en étant présents en première ligne, notre attachement aux principes fondateurs de notre République et aux valeurs universelles ».
Finalement, la mairie a choisi, le 7 avril, d’annuler la tenue de la cérémonie dans la ville. Interrogé par le journal, l’équipe du maire évoque des enjeux de sécurité et la crainte d’un amalgame entre le conflit actuel entre le Hamas et Israël et la cérémonie de remise de médailles au couple Philippeau.
Cet amalgame pourrait être fait, selon la mairie, car lors de ce type de cérémonie, un drapeau israélien est dressé à côté du drapeau français et l’hymne de l’État hébreu est joué.

Patrick Klugman, le président du Comité français pour Yad Vashem a indiqué que « les Justes sont honorés partout où ils ont œuvré et ils sont reconnus jusqu’au Panthéon. Pour le respect que nous devons à l’histoire et à la mémoire, j’espère que l’injuste précédent né à Vendôme ne sera plus jamais répété ailleurs ».
Arlette Testyler-Reimann, qui est par ailleurs présidente de l’Union des déportés de France, a quant à elle promis : « On ne me fera pas reculer. Je ne suis pas du genre à faire des vagues, mais je ne baisserai pas la tête, je ne me coucherai pas. Cela fait quinze ans que je témoigne, je vais dans toute la France, qui est magnifique, mais je vois bien qu’en ce moment la frilosité est en train de monter, qu’on a peur d’honorer des Français qui ont aidé des juifs parce qu’ils étaient juifs. Pour la première fois en quinze ans, deux enseignants de la banlieue parisienne qui devaient m’accueillir m’ont avertie qu’ils étaient lâchés par leur hiérarchie ».

La rescapée de la Shoah a alors interpellé le cabinet du Premier ministre François Bayrou, qui aurait fait pression sur la mairie de Vendôme. La cérémonie devrait finalement avoir lieu au mois de juin dans les salons de la sous-préfecture.