17ᵉ jour de procès : « Baissez d’un ton », dit le juge à Netanyahu qui s’est emporté
Le Premier ministre a tapé du poing sur la table et s'est énervé lorsqu'on lui a dit d'accélérer son témoignage, estimant qu'il devrait pouvoir répondre en détail aux accusations

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a exprimé son mécontentement et s’en est pris aux juges qui ont ordonné à son avocat de se hâter de poser ses questions mercredi, lors de son 17ᵉ jour de témoignage dans le cadre de son procès pour corruption.
Netanyahu a tapé du poing sur la table du tribunal de Tel Aviv, exigeant que les juges lui accordent plus de temps pour contrer les allégations portées à son encontre. On lui a alors dit de baisser d’un ton. Il a également accusé les procureurs de « lui faire vivre un enfer ».
L’emportement du Premier ministre a eu lieu après que son avocat, Me Amit Hadad, l’a interrogé sur le 46ᵉ élément d’une liste de plus de 300 tentatives illicites présumées de sa part ou de celle de ses collaborateurs d’intervenir dans la couverture du site d’information Walla.
L’acte d’accusation contre Netanyahu dans l’Affaire 4 000 affirme que ces tentatives présumées étaient au cœur d’un accord de corruption avec le propriétaire de Walla, Shaul Elovitch, qui aurait promis au Premier ministre une couverture médiatique positive en échange d’avantages réglementaires pour ses autres entreprises.
L’élément litigieux serait une demande faite au site d’information de publier un article sur la famille Netanyahu se rendant, à l’occasion de Yom HaZikaron, sur la tombe du défunt frère du Premier ministre, Yoni, tué alors qu’il dirigeait l’Opération Entebbe en 1976. Cette opération a permis de sauver plus de 100 otages en Ouganda après que des terroristes eurent détourné un avion.
« Je n’étais pas impliqué » dans cette demande, a insisté Netanyahu. « Ce n’est pas une exigence, cela frôle la supplique. »

Lors de son deuxième jour de témoignage cette semaine, Netanyahu a reconnu qu’il avait appelé Elovitch à faire pencher l’orientation politique de Walla davantage vers la droite, et était même allé jusqu’à lui conseiller de licencier son personnel. Il a néanmoins soutenu que le média ne l’avait jamais favorisé et lui était activement hostile, en réalité.
Il a poursuivi en disant aux juges : « Mesdames et Messieurs les juges, après dix ans, je suis autorisé à dire ceci : tant de choses ici sont absurdes, et pourtant, comment cela a-t-il pu être inclus dans l’acte d’accusation ? L’accusation prend ici une direction différente, elle n’est pas dirigée contre moi. »
Après que les juges eurent demandé à plusieurs reprises à Me Hadad de se dépêcher et de faire l’impasse sur ce qu’ils considéraient comme des réponses répétitives à certaines des questions de la liste, Netanyahu s’en est pris à eux. Il a exprimé son mécontentement de ne pas avoir assez de temps pour répondre en détail aux accusations.
Netanyahu a tapé plusieurs fois sur la table pendant l’échange, ce qui a incité la juge Rivka Friedman-Feldman à lui demander de baisser la voix.

« Je suis généralement une personne très réservée », a-t-il rétorqué.
« Mais c’est inacceptable. Ils ont pris nos vies et les ont ruinées. J’exerce mes fonctions de Premier ministre [même] en ce moment. Je viens ici deux fois par semaine ! Mais j’ai le droit de réfuter ces [allégations] absurdes et de prouver que tout est basé sur un mensonge ! »
Il a accusé les enquêteurs « d’imprudence malveillante » pour ne pas l’avoir interrogé sur certaines allégations. « Cela ne peut pas passer inaperçu », a poursuivi Netanyahu. Il a également visé les procureurs de l’État, affirmant qu’ils « vivent dans un univers parallèle » , les accusant de lui faire « vivre un enfer ».
Après avoir cessé de crier sur les juges, le Premier ministre a reçu une enveloppe, en a lu le contenu et a demandé une pause de 40 minutes, qui lui a été accordée.
Il y a deux semaines, les juges ont confirmé que Netanyahu ne témoignerait que deux fois par semaine, au lieu de trois, pendant les deux prochains mois.
Netanyahu est jugé dans le cadre de trois affaires de corruption. Il est accusé de fraude et d’abus de confiance dans les Affaires 1 000 et 2 000 et de corruption, de fraude et d’abus de confiance dans l’Affaire 4 000.
Dans l’Affaire 1 000, Netanyahu et son épouse, Sara, sont accusés d’avoir reçu des cadeaux coûteux de manière illicite de la part du magnat hollywoodien Arnon Milchan – des cadeaux à hauteur de 700 000 shekels. Netanyahu aurait par ailleurs violé les lois sur les conflits d’intérêts en offrant son aide à Milchan quand ce dernier avait dû renouveler son visa de résidence à long-terme aux États-Unis, cherchant aussi à l’aider lorsqu’il avait rencontré des problèmes fiscaux.
Dans l’Affaire 2 000, le Premier ministre doit répondre de fraude et d’abus de confiance. Il avait semble-t-il tenté de conclure un accord avec le propriétaire du journal Yedioth Aharonoth, Arnon (Noni) Mozes, dans lequel le journal s’engageait à couvrir de manière positive l’actualité liée à Netanyahu et à sa famille. En échange, le chef du gouvernement aurait fait avancer une réglementation qui aurait affaibli le principal rival du quotidien, le journal gratuit Israel Hayom.
L’Affaire 4 000, qui est également connue sous le nom d’Affaire Bezeq-Walla, est la plus grave des dossiers touchant le Premier ministre. Ce dernier y est en effet accusé d’avoir autorisé des réglementations qui avaient bénéficié financièrement à Shaul Elovitch, actionnaire principal du géant des télécommunications Bezeq, qui avait ainsi engrangé des centaines de millions de shekels. En retour, Netanyahu aurait semble-t-il profité d’une couverture favorable sur le site d’information Walla, dont Elovitch était également propriétaire.
Netanyahu ne cesse de clamer son innocence, affirmant que ces accusations ont été créées de toutes pièces dans le cadre d’un coup d’État politique mené par la police et des responsables judiciaires israéliens.