37 militants anti-refonte arrêtés alors que le chaos éclate à l’aéroport Ben Gurion
Après plusieurs heures, la police a déclaré la manifestation illégale et a utilisé la garde montée et des canons à eaux pour disperser les manifestants
Des milliers de manifestants opposés à la refonte judiciaire soutenue par la coalition Netanyahu ont envahi lundi l’aéroport Ben Gurion, situé près de Tel Aviv, se heurtant à la police et défiant les appels à modifier leurs plans.
La police a déclaré que 37 manifestants avaient été arrêtés pour avoir troublé l’orde public en franchissant des barricades, bloquant des routes et en pénétrant au sein du terminal 3.
Des agents de police ont utilisé la force pour empêcher les manifestants de bloquer la chaussée et ont traîné les gens hors du hall des arrivées alors que les slogans « démocratie » et « ce gouvernement est criminel » résonnaient.
Après plusieurs heures, la police a déclaré la manifestation illégale et se préparait à la disperser à l’aide d’agents de la garde montée. La police a déclaré qu’en plus de s’agglutiner sur la chaussée, les manifestants ont traîné des pots de plantes dans les rues pour créer des barricades de fortune.
The scene from Israel’s Ben-Gurion airport. Absolute chills. The patriotism on display here today will live in the Israeli memory for years to come. pic.twitter.com/YXAnBN66ZH
— Blake Flayton (@blakeflayton) July 3, 2023
Selon la presse israélienne, quelque 15 000 manifestants se trouvaient dans l’établissement, lors de manifestations qui ont commencé en fin d’après-midi et se sont poursuivies dans la soirée.
La foule a provoqué d’énormes embouteillages à l’entrée de l’aéroport ainsi que sur les routes adjacentes. Certains vols ont été retardés de plusieurs heures mais de nombreux passagers ont raté leur avion. Quelque 93 000 voyageurs devaient arriver et repartir dans la journée, sur quelque 550 vols en tout.
Tout en soulignant qu’elle respecterait le droit des manifestants à manifester, la police s’est engagée à agir pour maintenir l’ordre ainsi que les routes d’accès ouvertes aux véhicules d’urgence.
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La manifestation s’est déroulée alors que la police avait averti que le blocage des routes à l’intérieur et autour de l’aéroport pourrait entraîner une « catastrophe » en cas d’urgence, une justification rejetée par les critiques comme un prétexte astucieux. La police avait dans un premier temps déclaré qu’elle limiterait la manifestation à une zone désignée du terminal 1, avant de céder, après que les manifestants se sont engagés à manifester au terminal 3 dans tous les cas.
Les manifestants avaient également été appelés à annuler le rassemblement, en raison d’une importante opération antiterroriste israélienne menée ce même jour en Cisjordanie.
Les organisateurs de la manifestation et des personnalités issues de l’opposition avaient quant à eux déclaré que la manifestation se poursuivrait à moins que la coalition du Premier ministre Benjamin Netanyahu n’interrompe les délibérations d’une commission de la Knesset sur un projet de loi visant à empêcher les juges d’exercer un réexamen judiciaire sur le « caractère raisonnable » des décisions du gouvernement.
Le député Simcha Rothman, chef de la commission de la Constitution de la Knesset, a toutefois tenu une session lundi comme prévu. L’élu d’extrême droite a déclaré que le projet de loi serait approuvé par le panel parlementaire et présenté mardi à la Knesset avant la première lecture prévue début de semaine prochaine.
Les manifestations ont constitué un accueil difficile pour de nombreux touristes arrivés sur le sol israélien. Émergeant dans le brouhaha de klaxons et de tambours, un groupe d’étudiants universitaires britanniques visitait Israël pour la première fois via le programme Taglit-Birthright.
« J’ai terriblement peur. Je n’ai jamais rien vécu de tel auparavant », a déclaré Ella Cohen, 18 ans, de Londres.
מאות מפגינים פורקים מהרכבת ומצטרפים. יש כאן כבר אלפים. בואו!!
כוח קפלן בנתב"ג ????✈️ https://t.co/Kw2S73M5y4 pic.twitter.com/kaeiXqrGKk
— Yoav Glasner (@Yoglas74) July 3, 2023
Eleopold, un visiteur de 75 ans de New York, a déclaré qu’il avait entendu parler de la refonte judiciaire par le biais des médias américains, mais qu’il ne savait pas comment contextualiser la manifestation. « On dirait qu’Israël est une démocratie, mais pour quoi manifestent-ils ? ».
« Nous devons montrer que la protestation ne dort pas, nous sommes là, nous sommes éveillés », a déclaré à l’AFP Smadar Bonne, un manifestant de 46 ans. « La mobilisation a vraiment montré qu’ils ne peuvent pas faire tout ce qu’ils veulent, pas si facilement », a-t-il ajouté.
Ruth Regev, une retraitée de la ville de Ramat Gan, dans la banlieue de Tel-Aviv, s’est dite « très inquiète ». « Je pense que c’est un moment critique pour la société israélienne, pour la démocratie israélienne, pour mes enfants, pour mes petits-enfants », a-t-elle déploré.
De nombreux voyageurs sont arrivés plus tôt que d’habitude, y compris un groupe de près de 150 jeunes athlètes israéliens qui devaient s’envoler pour la Corée du Sud à minuit.
« Cela a gâché les choses pour nous, mais nous nous en sommes remis », a déclaré l’un des parents des athlètes. « Nous aimons notre pays et nous aimons notre démocratie. »
Des membres de la famille Haroush, également arrivés avec plus de cinq heures d’avance pour un vol à destination de la Thaïlande, ont qualifié les manifestations de « honte et d’embarras ». Une des filles de la famille s’est plainte que la bruyante manifestation « avait détruit [s]es oreilles ». « C’est l’accueil que nous réservons aux touristes ? Que vont-ils dire sur Israël », a interrogé la matriarche de la famille.
Les manifestants se rassemblent chaque semaine depuis six mois, dans un des plus grands mouvements de contestation de l’histoire d’Israël.
Formé fin décembre avec le soutien de partis d’extrême droite et de formations ultra-orthodoxes juives, le gouvernement Netanyahu tente de faire passer une réforme de la justice très controversée visant à accroître le pouvoir des élus sur celui des magistrats.
Le gouvernement estime que la réforme est nécessaire pour assurer un meilleur équilibre des pouvoirs, mais ses détracteurs y voient une menace pour la démocratie israélienne et ses garde-fous institutionnels.
Netanyahu, qui avait annoncé fin mars une pause dans le projet pour permettre des discussions avec l’opposition, a dit fin juin avoir abandonné la clause dite « dérogatoire », qui devait permettre au Parlement d’annuler à la majorité simple une décision de la Cour suprême.