Israël en guerre - Jour 428

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Témoignage

A grandes foulées : L’envoyé des EAU en Israël, le marathonien et moi

Mohamed Al Khaja, accompagnant le coureur aveugle Avi Solomon en entraînement pour le marathon d'Abou Dhabi, évoque les liens entre les EAU et Israël, - une course de fond

Lazar Berman est le correspondant diplomatique du Times of Israël

  • L'ambassadeur émirati en Israël, Mohamed Al Khaja (3è à gauche),l e coureur Avi Solomon (eu centre) et le correspondant diplomatique du Times of Israel Lazar Berman (deuxième à partir de la droite) avant leur entraînement de course à pied à Tel Aviv, le 18 novembre 2021. (Crédit : Maria Troyanker/UAE Embassy)
    L'ambassadeur émirati en Israël, Mohamed Al Khaja (3è à gauche),l e coureur Avi Solomon (eu centre) et le correspondant diplomatique du Times of Israel Lazar Berman (deuxième à partir de la droite) avant leur entraînement de course à pied à Tel Aviv, le 18 novembre 2021. (Crédit : Maria Troyanker/UAE Embassy)
  • L'ambassadeur des Émirats arabes unis en Israël, Mohamed al Khaja (à droite), reçoit en cadeau un kit de voyage pour le Shabbat de la part du coureur israélien aveugle Avi Solomon (au centre), après leur course à Tel Aviv, le 18 novembre 2021 (Lazar Berman/Times of Israel).
    L'ambassadeur des Émirats arabes unis en Israël, Mohamed al Khaja (à droite), reçoit en cadeau un kit de voyage pour le Shabbat de la part du coureur israélien aveugle Avi Solomon (au centre), après leur course à Tel Aviv, le 18 novembre 2021 (Lazar Berman/Times of Israel).
  • L'ambassadeur émirati en Israël Mohamed al Khajah (à droite) et le correspondant diplomatique du Times of Israel Lazar Berman, à gauche, après un entraînement de course à pied à Tel Aviv, le 18 novembre 2021. (Crédit :  Maria Troyanker/UAE Embassy)
    L'ambassadeur émirati en Israël Mohamed al Khajah (à droite) et le correspondant diplomatique du Times of Israel Lazar Berman, à gauche, après un entraînement de course à pied à Tel Aviv, le 18 novembre 2021. (Crédit : Maria Troyanker/UAE Embassy)

La promenade du bord de mer de Tel Aviv est prise d’assaut par les coureurs en cette fin d’après-midi de jeudi – comme chaque jour d’ailleurs à cette heure où le soleil commence à se coucher derrière les voiliers, illuminant le ciel de tons orange et violet.

Mais un groupe de sportifs en train de courir sur la promenade, au nord du port de Jaffa, se démarque en particulier – il faut dire que sa formation aurait été inimaginable il y a encore un peu plus d’un an.

L’ambassadeur des Émirats arabes unis en Israël, Mohamed Al Khaja, est venu s’entraîner avec le coureur israélien aveugle Avi Solomon, huit jours avant que l’athlète né en Éthiopie ne participe au marathon d’Abou Dhabi.

Ils sont accompagnés de Daniel, le partenaire de course de Solomon, et de membres de l’équipe personnelle de Khaja.

Et accessoirement du journaliste que je suis.

Des reporters de guerre renommés, comme Winston Churchill pendant la guerre des Boers et Martin Bell à Sarajevo, avaient prouvé qu’ils étaient prêts à endurer de profondes privations pour pouvoir témoigner de l’Histoire devant leurs lecteurs. Quant à moi, me voilà prêt aujourd’hui à parcourir les six kilomètres le long du front de mer de Tel Aviv – et six kilomètres pour revenir à ma voiture – pour raconter aux lecteurs ce récit inspirant.

L’ambassadeur émirati en Israël Mohamed al Khajah (à droite) et le correspondant diplomatique du Times of Israel Lazar Berman, à gauche, après un entraînement de course à pied à Tel Aviv, le 18 novembre 2021. (Crédit : Maria Troyanker/UAE Embassy)

Solomon, qui a quitté l’Éthiopie à l’âge de 6 ans en 1990, est clairement ému par la présence de l’ambassadeur.

« C’est un grand honneur qu’il ait pu trouver du temps à me consacrer, à consacrer à mon projet », déclare-t-il. « Cela montre vraiment que l’ambassadeur est un homme généreux et chaleureux ».

« Cela révèle aussi quelque chose sur la population d’Abou Dhabi », poursuit Solomon, « que ces gens sont chaleureux, qu’ils se préoccupent de nous, qu’ils cherchent vraiment la paix et qu’ils respectent la création. Des gens comme ça, un endroit comme ça… J’attends avec impatience d’y être, » s’exclame-t-il.

Solomon, qui avait perdu une partie de la vue lorsqu’il était enfant en Éthiopie avant de devenir complètement aveugle après une intervention chirurgicale ratée en Israël, ne sait pas encore s’il s’alignera sur la ligne de départ du semi-marathon ou du marathon complet à Abou Dhabi. Cela dépendra des conditions météorologiques, explique-t-il.

L’ambassadeur des EAU en Israël Muhammad Al Khajah avec le Premier ministre Naftali Bennett, le 19 octobre 2021 (Crédit : Haim Tzah/GPO)

Mais indépendamment de la longueur de la course, un maître-mot s’imposera tout au long de l’épreuve pour lui et pour son partenaire : la concentration.

« Dès que nous mettons le bracelet à nos poignets, nous devons être totalement synchronisés en termes de mouvements du corps, des bras, des jambes. Il doit parler beaucoup pendant la course, pour me décrire ce qui se passe sur la piste », explique Solomon.

De la vision à l’expérience

La rencontre a été organisée par le forum des femmes Golfe-Israël, cofondé par Fleur Hassan-Nahoum, adjointe au maire de Jérusalem, et Justine Zwerling.

« Notre forum s’efforce de créer davantage d’opportunités pour les personnes en situation de handicap dans les pays signataires des accords d’Abraham », indique Hassan-Nahoum. « Le sport est un élément important dans ce plan visant à améliorer la qualité de vie de cette catégorie de la population. Avi est un modèle pour tout le monde et Justine joue un rôle important en veillant à ce que ce message soit bien transmis. »

Le groupe se dirige vers le nord, le long du parc Charles Clore, avec la mer sur la gauche et les hôtels et la mosquée historique Hassan Bek sur la droite.

Khaja, coureur et cycliste passionné, explique que la course à pied reste un élément déterminant de son quotidien depuis son arrivée en Israël en tant qu’ambassadeur au mois de février.

« Le premier jour de mon arrivée, je suis allé courir le matin le long de la plage de Tel Aviv », indique-t-il, « et je ne manque aucune occasion de courir, surtout si j’ai l’occasion de le faire avec une personne douée, dont le courage m’inspire, et qui va courir à Abou Dhabi prochainement. »

Il ajoute considérer la diplomatie « sportive » comme un moyen efficace permettant de renforcer encore les relations entre Israël et les Émirats arabes unis, des liens qui se développent rapidement : « Nous sommes très entreprenants là-dedans. Le sport est sans aucun doute un domaine dans lequel les gens peuvent entrer en relation les uns avec les autres. En passant d’une vision, de quelque chose de symbolique, à quelque chose de très concret, que les gens vivent. »

« Il y a eu beaucoup de rumeurs concernant une organisation de la Coupe du monde conjointe entre nos deux pays », note-t-il de manière énigmatique, sans en dire davantage.

De manière générale, déclare Khaja, les EAU cherchent à investir dans des « projets modèles ou structurants » qui façonneront l’avenir de la relation.

En septembre 2020, Israël a établi des liens diplomatiques officiels avec les EAU et Bahreïn, suivis par le Maroc et par un accord de normalisation avec le Soudan. En juillet, Israël a ouvert son ambassade à Abou Dhabi.

« Tout le monde est avenant en Israël », s’exclame Khajah. « Les Israéliens sont très curieux, comme nous le sommes aussi ».

« [L’envoyé israélien aux Émirats arabes unis] Amir Hayek et moi nous plaignons toujours l’un à l’autre de la vitesse à laquelle les choses évoluent, et de la difficulté à suivre le rythme, » s’amuse-t-il.

Alors que nous courons aux côtés de Solomon, la conversation s’oriente vers la religion et l’extrémisme.

« La religion est la relation entre un individu et le Tout-Puissant », réfléchit Khaja. « Toutes les religions demandent la paix, la tolérance, la coexistence. Jamais je n’ai lu de textes, dans toutes les religions, appelant à la violence, à la haine, au racisme. Mais notre région souffre d’un manque d’éducation assorti, malheureusement, de faibles perspectives économiques. Il y a donc des gens qui succombent à l’influence de personnes qui tentent, d’une certaine manière, de les manipuler à des fins politiques ou d’emprise ».

Mais Khaja pense qu’il est possible de surmonter les obstacles.

L’ambassadeur des Émirats arabes unis en Israël, Mohamed al Khaja (à droite), reçoit en cadeau un kit de voyage pour le Shabbat de la part du coureur israélien aveugle Avi Solomon (au centre), après leur course à Tel Aviv, le 18 novembre 2021 (Lazar Berman/Times of Israel).

« Nous pensons que nous devons toujours être optimistes, nous concentrer sur les champs d’intérêt et redoubler d’efforts sur ce que nous partageons en commun. C’est la seule façon de mettre en place une paix durable et chaleureuse, une paix pérenne. »

Le commerce est un secteur qui constitue une base claire pour les relations bilatérales. Lors d’une cérémonie marquant le premier anniversaire des accords d’Abraham, le ministre émirati de l’Economie, Abdulla bin Touq Al-Marri, a déclaré qu’Israël et les EAU avaient déjà signé des accords commerciaux bilatéraux à hauteur de plus de 1,8 milliard de shekels pour le premier semestre de cette année dans des domaines tels que l’alimentation, l’agriculture, la santé, l’aviation, l’eau et l’énergie, ainsi que des dizaines de protocoles d’accord qui définissent les accords existants et futurs.

« Nous cherchons à créer plus de mille milliards de dollars d’activité économique avec Israël au cours de la prochaine décennie », a ajouté le ministre.

Alors que les Israéliens entretiennent depuis longtemps des liens commerciaux et sécuritaires discrets avec les EAU, l’accord de normalisation a été considéré comme une aubaine économique potentielle, avec un accès accru au centre d’affaires et de transport maritime mondial qu’est Dubaï, en plus du tourisme et de l’énergie.

« Les Émirats arabes unis sont une plate-forme commerciale pour toute la région, et il est tout à fait naturel d’entretenir cette relation », a déclaré Khaja. « Il y a déjà des Israéliens très actifs dans la communauté d’affaires des EAU ».

« Et il est tout à fait naturel que les échanges commerciaux puissent encore se développer et se multiplier à travers la région MENA », continue-t-il.

Les EAU cherchent à être au cœur de la relation croissante entre l’Inde et Israël, alors que New Delhi commence à développer un réseau logistique et commercial vers l’Europe via le Golfe et Israël. Les liens étroits entre les EAU et la Serbie peuvent également favoriser l’expansion des relations commerciales d’Israël dans les Balkans.

Façonner l’avenir

Khaja, 40 ans, a suivi des études universitaires à Boston et parle couramment l’anglais. Il a commencé à apprendre l’hébreu avec un professeur particulier lorsqu’il s’est installé en Israël – mais il reconnaît ne pas avoir eu beaucoup de temps pour étudier.

Il a occupé plusieurs postes dans le secteur privé aux Émirats arabes unis et a été chef de cabinet du ministère des Affaires étrangères.

Sa femme et ses quatre enfants continuent de vivre à Abou Dhabi, tandis que lui consacre son temps à s’efforcer de gérer l’expansion de nos relations bilatérales.

Alors que nous atteignons la zone portuaire de Tel Aviv – Solomon court toujours avec aisance et sans effort, c’est un peu plus compliqué de mon côté – Khaja reconnaît que la direction et le rythme du développement des liens entre les Émirats arabes unis et Israël ont des implications importantes pour la région.

Le président américain Donald Trump, au centre, avec, de gauche à droite, le ministre des Affaires étrangères de Bahreïn Abdullatif al-Zayani, le Premier ministre Benjamin Netanyahu et le ministre des Affaires étrangères des Émirats arabes unis Abdullah bin Zayed Al Nahyan, lors de la cérémonie de signature des accords d’Abraham sur la pelouse sud de la Maison Blanche, le 15 septembre 2020, à Washington. (Alex Brandon/AP)

« La paix est une condition préalable à la prospérité et à la sécurité », dit-il. « Et avec les accords d’Abraham, et les relations bilatérales, et la façon dont ça se développe, je pense que nous avons aujourd’hui, devant nos yeux, un modèle qui devrait fonctionner et être bénéfique pour tout le monde. Bien sûr, il s’agissait pour nous d’une décision souveraine, avec des perspectives d’avenir, et je ne peux pas faire de commentaires sur les autres pays. Je suis sûr que ce modèle fera réfléchir d’autres pays. »

« Nous devons réfléchir à ce à quoi notre voisinage devrait ressembler », ajoute l’ambassadeur. « Nous ne devons pas être otages de menaces, de problématiques régionales. Nous devons toujours penser à ce qui compte pour nous et nos populations, à ce qui est favorable à la sécurité de la région. »

« Il faut qu’à terme, lorsqu’on parle du Moyen-Orient, la première chose qui vienne à l’esprit, ce soit les accords d’Abraham, la paix, la prospérité, le développement et les technologies futures. Pourquoi pas ? Il faut toujours penser au type d’avenir que nous voulons façonner pour la génération future. »

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