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Abbas : le comportement des Juifs a entraîné la Shoah, pas l’antisémitisme

Dans un discours décousu, le président de l'AP a donné une "leçon d'histoire" dans laquelle il nie le lien des Juifs à Israël et accusé les sionistes d'avoir coopéré avec Hitler

Le président palestinien Mahmud Abbas, à gauche, durant une rencontre du conseil national palestinien à Ramallah, le 30 avril 2018 (Crédit : AFP PHOTO / ABBAS MOMANI)
Le président palestinien Mahmud Abbas, à gauche, durant une rencontre du conseil national palestinien à Ramallah, le 30 avril 2018 (Crédit : AFP PHOTO / ABBAS MOMANI)

Le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas a déclaré lundi que l’Holocauste n’avait pas été causé par l’antisémitisme mais par le « comportement social » des Juifs, notamment les prêts financiers.

Dans un discours long et décousu prononcé à Ramallah lors d’une session exceptionnelle du Conseil national palestinien (CNP), Abbas a eu recours à un certain nombre de théories conspirationnistes antisémites durant une « leçon d’histoire », selon ses propres termes, au cours de laquelle il a tenté de prouver que le lien ancien de 3000 ans des Juifs avec Israël était mensonger.

Abbas a expliqué que son récit était soutenu par trois points établis par des auteurs et historiens juifs, le premier étant la théorie souvent étiquetée d’antisémite selon laquelle les Juifs ashkénazes ne seraient pas des descendants des Israélites de l’antiquité.

Evoquant le livre écrit par Arthur Kessler, La Treizième tribu, qui affirme que les Juifs ashkénazes descendent des Khazars, Abbas a estimé que les Juifs européens n’avaient donc « aucun lien historique » avec la terre d’Israël.

Il a clamé que la Shoah n’était pas le résultat de l’antisémitisme mais plutôt du « comportement social, de [l’imposition] d’intérêts et d’affaires financières ».

Abbas a également affirmé qu’Israël avait été depuis le début un projet européen, expliquant que des responsables européens tels que le britannique Lord Arthur Balfour avaient restreint l’immigration des Juifs dans leurs pays tout en faisant simultanément la promotion de l’immigration des Juifs sur la terre d’Israël.

La déclaration Balfour, qui date de 1917, soutenait l’idée d’un Etat juif sur la terre d’Israël.

Lord Arthur James Balfour, secrétaire aux Affaires étrangères du Royaume-Uni en 1917, et le texte de la déclaration qui porte son nom et soutient l’établissement d’un foyer national juif en Palestine. (Crédit : Domaine public/Wikipédia)

« Ceux qui voulaient un Etat juif n’étaient pas Juifs », a-t-il dit, répétant une affirmation qu’il avait déjà faite au mois de janvier lorsqu’il avait déclaré que l’Etat d’Israël avait été un « projet colonial qui n’avait rien à voir avec le judaïsme » et ne visait qu’à sauvegarder les intérêts européens.

Dans ce discours du mois de janvier, il avait indiqué que les Juifs européens avaient choisi, durant la Shoah, de subir « la mort et les massacres » plutôt que d’émigrer dans la Palestine sous mandat britannique.

Néanmoins, lundi, Abbas a déclaré qu’Adolf Hitler, dont le régime nazi a été responsable de la mort de 6 millions de Juifs durant l’Holocauste, avait facilité l’immigration des Juifs vers Israël en passant un accord avec la Anglo-Palestine Bank (aujourd’hui la banque Leumi) sous les termes duquel les Juifs ayant émigré en Palestine sous mandat britannique pourraient y transférer, via l’établissement bancaire, tous leurs avoirs.

Hitler accueille le Grand Mufti Haj Amin al-Husseini en 1941 en Allemagne (Crédit : Heinrich Hoffmann Collection/Wikipedia)

Le leader palestinien a de longs antécédents de négationnisme. Sa thèse de doctorat était intitulée « De l’autre côté : La relation secrète entre le nazisme et le sionisme » et il a été accusé dans le passé de nier l’ampleur de la Shoah. La thèse aurait prétendu que le chiffre de six millions de victimes de l’Holocauste aurait été largement exagéré et que les leaders sionistes auraient coopéré avec les nazis.

Abbas, dans son discours de lundi, n’a fait aucune mention de la présence historique et des périodes de souveraineté en terre sainte des Juifs. Israël est le seul territoire où les Juifs ont été souverains ou où ils ont cherché à avoir la souveraineté.

Nous n’accepterons pas les Etats-Unis

Abbas a également évoqué longuement le processus de paix manqué, disant que l’enquête de corruption qui avait abattu l’ancien Premier ministre Ehud Olmert avait pour objectif de l’empêcher de souscrire un accord de paix. Olmert a lancé des accusations similaires.

Abbas avait déclaré avoir rejeté l’offre de paix soumise à Abbas, il y a une décennie. La proposition d’Olmert prévoyait un retrait israélien presque total de la Cisjordanie et des quartiers arabes de Jérusalem-Est et aurait placé la Vieille Ville – où se trouvent les lieux saints les plus sensibles de Jérusalem – sous contrôle international.

Abbas a également rejeté de manière anticipée le plan de paix sur lequel travaille actuellement l’administration Trump dans un contexte de rupture profonde et continue avec les Etats-Unis.

Abbas a indiqué au CNP qu’il prévoyait de prendre rapidement des « mesures dures » contre Israël et les Etats-Unis dont il n’a pas précisé la nature.

Abbas a dit aux centaines de délégués présents qu’il s’en tenait à son rejet des propositions américaines en vue d’un accord de paix israélo-palestinien suite à la reconnaissance par l’administration Trump de Jérusalem comme capitale d’Israël au mois de décembre et à la décision d’y transférer l’ambassade américaine à la mi-mai.

« C’est complètement inacceptable », a-t-il dit durant le discours inaugural d’une réunion de quatre jours organisée en Cisjordanie. « Nous n’accepterons pas cet accord et nous n’accepterons pas les Etats-Unis comme seuls intermédiaires ».

Le président américain Donald Trump, à gauche, et le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas pendant une conférence de presse conjointe au palais présidentiel de Bethléem, en Cisjordanie, le 23 mai 2017. (Crédit : Mandel Ngan/AFP)

Abbas a paru écarter les informations transmises via les médias citant le puissant prince héritier saoudien, Mohammed bin Salmane, qui aurait déclaré que les Palestiniens devaient cesser de se plaindre et accepter ce qui était offert par l’administration Trump.

Abbas n’a pas fait spécifiquement référence à ces informations mais a indiqué avoir été assuré que l’Arabie saoudite continuait à offrir son soutien aux Palestiniens. « On entend beaucoup de rumeurs », a-t-il déclaré aux délégués. « Ne leur offrez pas de crédibilité ».

Abbas, âgé maintenant de 82 ans, a averti qu’il pourrait « prendre des mesures dures dans un futur proche en ce qui concerne nos relations avec nos voisins (Israël) et les Américains ». Il n’a pas donné de détails mais affirmé qu’elles seraient importantes et de grande envergure.

Le Hamas et Gaza

Cette rencontre du Conseil national palestinien survient à un moment de profonde division entre Abbas et son rival, le groupe terroriste du Hamas qui contrôle la bande de Gaza.

Le Hamas a accru sa visibilité ces dernières semaines en organisant des mouvements de protestation massifs sur la frontière que partage l’enclave côtière avec Israël. Lors de ces manifestations hebdomadaires, des milliers de Palestiniens se sont réunis aux abords de la clôture frontalière, de plus petits groupes s’en approchant, jetant des pierres ou des grenades artisanales et brûlant des pneus.

Plus de 40 manifestants ont été tués et plus de 1700 ont été blessés par des tirs de l’armée israélienne au cours du mois qui vient de s’écouler, selon le ministère de la Santé de Gaza dirigé par le Hamas. Israël, de plus en plus critiqué à l’international pour son usage de la force létale contre les manifestants, affirme avoir le droit de défendre sa frontière. L’Etat juif accuse le Hamas d’utiliser le mouvement de protestation comme couverture pour commettre des attentats et a montré les images de groupes tentant d’ouvrir des brèches à la frontière. Le Hamas a reconnu que cinq des personnes tuées le premier vendredi des émeutes appartenaient à son groupe, et a depuis gardé le silence sur le nom d’éventuelles victimes qui seraient membres de son organisation.

L’Etat juif fait valoir que 6 000 résidents des communautés israéliennes voisines seraient menacés de mort si les Palestiniens dirigés par le Hamas parvenaient à traverser la frontière.

Les Palestiniens participent à des manifestations aux abords de la frontière avec Israël, à l’est de Jabalia, dans le nord de la bande de Gaza, le 30 mars 2018 (Crédit : AFP/Mohammed Abed)

Abbas a salué ses « frères du Hamas » pour avoir adopté sur le tard ce qu’il a qualifié de « résistance pacifique ».

« Grâce à Dieu, il (le Hamas) a finalement accepté et c’est efficace », a-t-il déclaré tout en recommandant vivement aux organisateurs de conserver leurs enfants à l’écart des manifestations le long de la frontière, mettant en garde contre une génération « handicapée ».

« Tenez les jeunes éloignés de la frontière, faites partir les enfants, nous ne voulons pas devenir des handicapés », a-t-il dit.

Les responsables du Hamas ont déclaré que les manifestations avaient pour objectif d’effacer la frontière et de libérer la Palestine et certains ont suggéré qu’il pourrait y avoir une rupture massive de la frontière.

Malgré cet éloge rare de ses rivaux, Abbas a établi des conditions rigoureuses pour que prenne fin le clivage interne entre l’AP et le groupe terroriste qui était apparu en 2007 lorsque le Hamas avait écarté de Gaza les forces loyales à Abbas, un an après avoir remporté les élections parlementaires. Depuis la prise du contrôle du Hamas, Israël et l’Egypte ont imposé un blocus frontalier sur Gaza qui a pour objectif de stopper l’afflux de roquettes et d’armes.

Les membres de la brigade Al-Qassam, participant au défilé marquant les 27ème de la création du mouvement islamiste le 14 décembre à Gaza (Crédit : AFP/Mahmud Hams)

Les médiateurs égyptiens ont proposé qu’Abbas assume les responsabilités gouvernementales à Gaza pour mettre un terme au blocus. Abbas a noté lundi qu’il ne le ferait que si le Hamas renonçait à toute son autorité – une perspective improbable dans la mesure où le groupe terroriste refuse d’abandonner le contrôle sur ses armes.

« Soit ils nous donnent tout, soit ils prennent tout », a précisé Abbas en évoquant le Hamas.

Un nouveau leadership

A la fin de la semaine, le Conseil national palestinien doit élire un nouveau comité exécutif de l’OLP, un groupe de direction fort de 18 membres qui a servi, ces dernières années, à entériner les décisions prises par Abbas.

Le scrutin, étroitement contrôlé par Abbas, devrait permettre d’installer un nouveau groupe de loyalistes au sein du comité.

Le président palestinien Mahmud Abbas, à gauche, durant une rencontre du conseil national palestinien à Ramallah, le 30 avril 2018 (Crédit : AFP PHOTO / ABBAS MOMANI)

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