Après l’attaque meurtrière de Tel Aviv, la retenue face aux Houthis n’était plus une option
Les chefs de la sécurité espéraient qu'un accord sur les otages pourrait entraîner une désescalade, notamment dans le nord d'Israël. Après la frappe de vendredi et l'inévitable réponse israélienne, ils se préparent dorénavant à la possibilité d'un conflit plus large
David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).
Les rebelles Houthis du Yémen, l’un des proxies de l’Iran qui affirme ouvertement chercher à détruire Israël, avait rapidement pris pour cible le pays après le pogrom effectué par le Hamas dans le sud d’Israël, le 7 octobre. Et Israël, jusqu’à présent, avait choisi de ne pas riposter, même lorsqu’un missile avait frappé directement Eilat, au mois de mars dernier.
Mais vendredi, aux premières heures de la matinée, un drone Houthi apparemment plus perfectionné que les autres a échappé aux systèmes de défense antiaérienne du pays – la raison en aurait été, a indiqué l’armée, une « erreur humaine » – et il a explosé à Tel Aviv, touchant une résidence d’appartements dans une frappe qui a fait un mort, un Israélien âgé de 50 ans, Yevgeny Ferder. Les Houthis ont annoncé que cette attaque marquait « une nouvelle phase » dans les opérations lancées par le groupe rebelle à l’encontre d’Israël.
A ce moment-là, les responsables de la sécurité israéliens ont dit, semble-t-il, aux ministres qui s’étaient réunis en urgence dans le cadre d’une rencontre du cabinet de sécurité – ce qui est très inhabituel à Shabbat – que la retenue n’était plus une option.
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L’armée de l’air israélienne vient de frapper le port de Hodeida, sur la mer Rouge, a déclaré le Premier ministre Benjamin Netanyahu à la nation dans une déclaration filmée enregistrée après la fin de Shabbat, parce que ce port est le point d’entrée des armes iraniennes qui sont utilisées par les Houthis dans leur combat contre Israël et contre les autres ennemis de la république islamique dans la région. La coalition qui tente de déjouer les attaques commises par les rebelles yéménites sur les navires commerciaux, une coalition dirigée par les États-Unis, n’avait pas mené jusque-là d’opérations directes visant Hodeida, ville portuaire située à l’Ouest du Yémen, dans la mesure où il est aussi utilisé à des fins civiles.
S’en prenant à des structures qui se trouvaient à plus de 1 800 kilomètres de distance, cette frappe a été l’une des plus compliquées à avoir été effectuée par Israël et ce, dans toute son histoire, a pour sa part commenté le porte-parole de Tsahal, Daniel Hagari.
L’État d’Israël est tout à fait conscient du fait que cette première riposte directe contre les Houthis est susceptible de créer une nouvelle escalade. Jérusalem a averti les États-Unis, samedi, de ce qui allait se passer et aurait aussi prévenu d’autres pays de la région.
La procureure-générale Gali Baharav-Miara aurait, semble-t-il, insisté sur la nécessité de rassembler les ministres siégeant au cabinet de sécurité – même à Shabbat – pour qu’ils approuvent officiellement l’opération, dans la mesure où elle a considéré que le soutien apporté par l’instance à cette frappe était essentiel au vu du potentiel de cette dernière à provoquer un conflit plus large.
Ces derniers mois, les responsables militaires israéliens indiquaient, en privé, que l’un des problèmes qui se posaient, s’agissant des Houthis, était qu’ils ne paraissent guère être sensibles à la dissuasion. Et en effet, après la frappe israélienne de samedi, un chef des rebelles a juré qu’Israël en « paiera le prix » et que « nous répondrons à toute escalade par une nouvelle escalade ».
Toutefois, samedi soir, l’armée a annoncé qu’elle ne donnait aucune instruction supplémentaire au public en matière de sécurité.
Samedi soir encore, Netanyahu prévoyait toujours de s’envoler, cette semaine, pour les États-Unis – où il rencontrera le président Joe Biden si ce dernier s’est rétabli de la COVID-19 et où il espère s’entretenir avec l’ancien président et candidat du parti républicain dans la course à la Maison Blanche, Donald Trump. Il prendra aussi la parole devant une session conjointe au Congrès.
Parmi les thèmes qu’il devrait aborder dans son allocution, Netanyahu devrait souligner les efforts livrés par l’Iran pour détruire Israël, des efforts qui ne cessent de s’intensifier ; les ambitions voraces du régime de Téhéran pour la région toute entière et l’accélération apparente des initiatives prises par ce dernier pour enfin se doter de l’arme atomique.
Trois mois après l’attaque directe et sans précédent aux missiles et aux drones qui avait été lancée par l’Iran contre Israël – et qui avait été presque entièrement déjouée par l’État juif et par une coalition dirigée par les États-Unis – les événements qui sont survenus ce week-end transmettent un message qui gagne en résonance et dont le caractère d’urgence est accru. « Tous ceux qui souhaitent voir un Moyen-Orient stable et sûr », a déclaré Netanyahu dans la soirée de samedi, « doivent se dresser contre l’axe du mal de l’Iran et soutenir le combat mené par Israël contre l’Iran et contre ses proxies – au Yémen, à Gaza, au Liban, partout ».
Alors qu’il parlait, les manifestants à Tel Aviv et ailleurs – et notamment des proches des 116 otages détenus par le Hamas depuis le massacre du 7 octobre – l’exhortaient à ne pas effectuer le voyage prévu aux États-Unis ou tout du moins, à ne pas le faire avant la finalisation d’un accord otages contre cessez-le-feu qui, pensent-ils, pourrait entraîner une désescalade dans le conflit tout entier et notamment de l’autre côté de la frontière nord d’Israël – où un troisième proxy de l’Iran, le Hezbollah, tire des dizaines de roquettes vers le territoire israélien quotidiennement.
Les chefs de l’establishment sécuritaire israélien et le propre ministre de la Défense de Netanyahu, Yoav Gallant, partageraient le même point de vue et demanderaient avec force au Premier ministre de faire tout ce qui est en son pouvoir pour conclure un accord. Samedi soir, néanmoins, ils se sont aussi préparés à la possibilité qu’après neuf mois de guerre, le conflit n’en vienne encore à s’élargir.
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David Horovitz, rédacteur en chef et fondateur du Times of Israel