Arnon Milchan nie toute aide de Netanyahu dans le projet de fusion Keshet-Reshet
Dans son témoignage, le magnat a indiqué que Sara Netanyahu ne s'était jamais plainte de ne pas recevoir de champagne, ajoutant qu'elle avait offert des cadeaux à sa famille à lui
Arnon Milchan s’est exprimé dimanche dans le cadre du procès pour corruption du Premier ministre Benjamin Netanyahu, disant que le Premier ministre n’était pas intervenu en sa faveur lors de l’avancée de la fusion proposée des deux chaînes de télévision Keshet et Reshet – une initiative dont il aurait profité financièrement.
Interrogé par l’avocat de la défense de Netanyahu, Milchan a déclaré que cette proposition de fusion entre les deux chaînes n’avait été qu’une vague idée qui ne s’était jamais développée de manière significative, et que le Premier ministre ne lui avait, de toute façon, apporté aucune aide.
D’autres témoins déterminants comme Shlomo Filber, ancien conseiller de premier plan de Netanyahu, avaient néanmoins fait savoir dans leurs témoignages que le Premier ministre avait tenté de venir en aide à Milchan, son ami – qui lui avait offert des cadeaux de luxe à hauteur de centaines de milliers de shekels – dans le cadre de la fusion envisagée.
Dans l’Affaire 1000, Netanyahu est accusé d’avoir abusé de son pouvoir pour privilégier les intérêts de Milchan – il l’aurait aidé à obtenir un visa de résidence à long-terme aux États-Unis, d’avoir promu une législation qui aurait permis au producteur de Hollywood d’avoir droit à des allègements fiscaux et d’avoir soutenu également la fusion Keshet-Reshet, alors même qu’il recevait des cadeaux luxueux de la part du milliardaire.
C’est la deuxième semaine du témoignage de Milchan, une deuxième semaine qui est largement consacrée au contre-interrogatoire de l’avocat de la Défense de Netanyahu, Amit Hadad. Le milliardaire témoigne actuellement par visioconférence depuis l’Old Sea Hotel de Brighton, au Royaume-Uni, devant la Cour de district de Jérusalem, où Netanyahu est actuellement sur le banc des accusés pour fraude et pour abus de confiance dans trois dossiers distincts et pour pots-de-vin dans l’un d’entre eux.
Milchan — homme d’affaires bien connu et producteur à Hollywood qui est également actionnaire de la Dixième chaîne (devenue depuis la Treizième chaîne) exploitée par Reshet – a affirmé, dimanche, que le projet de fusion entre Keshet et Reshet n’était finalement pas allé bien loin.
« Je vais raconter toute l’histoire de Reshet et Keshet très simplement, je n’avais pas envie de devenir investisseur avant qu’il y ait une fusion », a dit Milchan, dimanche.
Alors que le juge Moshe Baram lui demandait s’il y avait eu des négociations commerciales entre les deux parties, Milchan a déclaré que l’actionnaire majoritaire de Reshet, Udi Angel, n’était pas intéressé à l’idée d’une fusion.
« Il n’y a pas eu de négociations, il n’y a pas eu de prix, il n’y rien eu – juste des idées vagues », a-t-il dit.
Dans un témoignage livré devant le tribunal, l’année dernière, Filber avait indiqué que Netanyahu lui avait demandé d’aider Milchan sur des questions de régulation en lien avec la fusion.
Milchan a précisé dans son témoignage, dimanche, qu’il avait informé Netanyahu de l’idée « par rapport à sa casquette de ministre des Communications » – le Premier ministre était en charge de ce portefeuille à l’époque – et que Netanyahu avait été intéressé par cette idée, mais il a noté que la proposition n’était jamais allée suffisamment loin pour qu’une approbation en matière de régulation soit nécessaire.
Poursuivant son témoignage, le magnat d’Hollywood Arnon Milchan a aussi déclaré dimanche à la Cour que les cadeaux échangés l’ont été mutuellement, dans un esprit de camaraderie.
En quelques mots, Arnon Milchan a confirmé la version des faits exposée par l’avocat de la défense, Me Amit Hadad, qui cherche à réfuter les accusations selon lesquelles l’acceptation par le Premier ministre de luxueux cadeaux de la part du producteur, et d’autres personnes, constituerait une fraude et un abus de confiance.
Me Hadad a affirmé que Netanyahu et son épouse Sara, ainsi que Milchan et sa femme Amanda, étaient de grands amis. « Vous étiez là pour tous les grands événements de la vie. Vous étiez là pour voir grandir vos enfants respectifs », a-t-il dit.
« Confirmez-moi que vous pensiez que les cadeaux étaient réciproques », a demandé Me Haddad, ce à quoi Milchan a répondu : « Il y avait une certaine réciprocité ».
Me Haddad : Jusqu’à ce que les enquêtes commencent, vous n’avez jamais pensé à combien coûtaient les cadeaux.
Milchan : Jamais.
Me Hadad : Confirmez-nous que le Premier ministre ne s’est jamais plaint que vous ne veniez pas avec des cigares.
Milchan : Ce n’est jamais arrivé.
Me Hadad : Confirmez-nous que vos conversations étaient empreintes de proximité et d’amitié.
Milchan : Absolument.
Me Hadad a ensuite offert au tribunal un long soliloque portant sur le fait que tout le monde savait que Netanyahu et Milchan sont les meilleurs amis du monde, ce que Milchan a également confirmé (« comme une famille »), ajoutant comme une cerise sur le gâteau qu’il n’a pas caché les cadeaux parce qu’il n’y avait pas de raison de les cacher.
Quant aux mots codés donnés aux « cadeaux », Milchan les a expliqués en les qualifiant de « bêtises entre amis ».
Ce témoignage semble contredire le précédent récit de Milchan, qui se disait frustré par la façon systémique dont on attendait de lui qu’il abreuve les Netanyahu de cigares, de champagne et de bijoux, sans aucun cadeau en retour.
Milchan a confirmé que l’épouse du Premier ministre, Sara, avait donné des cadeaux à son épouse, Amanda, et à ses enfants.
Interrogé sur la raison pour laquelle il avait précédemment dit au tribunal qu’il n’était pas ami avec Netanyahu, Milchan a parlé d’une « phrase étrange ».
« Je ne sais pas pourquoi j’ai dit cela. C’est un ami à ce jour », a-t-il déclaré.
« Je ne sais pas exactement pourquoi je l’ai dit ni comment [cela s’est produit]. »
Me Hadad a proposé une théorie selon laquelle lorsque les policiers sont venus frapper à sa porte et lui ont présenté un portrait peu élogieux de Netanyahu, il se serait peut-être énervé et se serait dit ‘comment mon bon ami Bibi a-t-il pu en arriver là’. « Et vous avez donc ajouté des détails qui ne se sont jamais produits. »
« Je ne sais pas pourquoi je l’ai dit ni comment cela s’est produit. J’étais sous pression », a répondu Milchan.