Avec une armée de 27 000 hommes, le chef terroriste du Hamas prépare Gaza à la guerre
Le régime islamiste de la bande de Gaza ne souhaite peut-être pas de conflit maintenant, mais son “chef d'Etat-major” s’y prépare, et certains pensent qu’il est mieux préparé au conflit qu’en 2014
Avi Issacharoff est notre spécialiste du Moyen Orient. Il remplit le même rôle pour Walla, premier portail d'infos en Israël. Il est régulièrement invité à la radio et à la télévision. Jusqu'en 2012, Avi était journaliste et commentateur des affaires arabes pour Haaretz. Il enseigne l'histoire palestinienne moderne à l'université de Tel Aviv et est le coauteur de la série Fauda. Né à Jérusalem , Avi est diplômé de l'université Ben Gourion et de l'université de Tel Aviv en étude du Moyen Orient. Parlant couramment l'arabe, il était le correspondant de la radio publique et a couvert le conflit israélo-palestinien, la guerre en Irak et l'actualité des pays arabes entre 2003 et 2006. Il a réalisé et monté des courts-métrages documentaires sur le Moyen Orient. En 2002, il remporte le prix du "meilleur journaliste" de la radio israélienne pour sa couverture de la deuxième Intifada. En 2004, il coécrit avec Amos Harel "La septième guerre. Comment nous avons gagné et perdu la guerre avec les Palestiniens". En 2005, le livre remporte un prix de l'Institut d'études stratégiques pour la meilleure recherche sur les questions de sécurité en Israël. En 2008, Issacharoff et Harel ont publié leur deuxième livre, "34 Jours - L'histoire de la Deuxième Guerre du Liban", qui a remporté le même prix

Comme si les choses n’étaient pas assez difficiles pour les résidents de la bande de Gaza, la mer, le seul endroit où ils pouvaient échapper à la chaleur et à leurs souffrances, a été déclarée interdite d’accès aux baigneurs sur une grande partie du territoire. La décision a été prise par la municipalité de Gaza, en raison de la forte pollution des plages. Les usines de traitement des égouts de Gaza ont été fermées à cause du manque actuel d’électricité et, en conséquence, les eaux usées non traitées se retrouvent maintenant dans la mer.
« Le seul endroit où je pouvais m’amuser a aussi été fermé », a déclaré T., un résident de la ville de Gaza, dans un entretien téléphonique. « Il y a quelques plages au nord de la bande de Gaza où il est encore possible de nager, mais c’est loin. Alors jusqu’où irons-nous ? Pas de salaires, pas d’électricité, pas de plage. On nage dans la m*rde », a-t-il ajouté en riant avec amertume.
Quiconque en Israël pouvant être tenté de se réjouir des souffrances de Gazaouis ferait mieux d’y réfléchir à deux fois. Les courants méditerranéens pourraient facilement déplacer les eaux usées des Gazaouis vers les plages d’Ashkelon, d’Ashdod et plus au nord.
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T. a indiqué que le désespoir augmente chaque jour. « Nous sommes dans le mois de Ramadan. Certaines années, les rues étaient remplies tous les soirs avec des personnes qui allaient et venaient, comme à Ramallah ». Cette année, au contraire, même si les plus jeunes Gazaouis se pressent dans les cafés, « les gens n’ont pas d’argent pour consommer, a déclaré T. Il n’y a pas de violence et la situation est relativement calme, mais je ne serais pas surpris si, un jour, on voyait des gens marcher par désespoir vers le point de passage d’Erez. »

Le Hamas a également parlé d’une possible marche massive vers la frontière israélienne. Le groupe terroriste a organisé un « jour de colère » vendredi ; il a déclaré qu’il continuerait cette semaine et, dans ce cadre, les résidents de Gaza marcheraient en masse vers la frontière. L’intention du Hamas est de canaliser la colère de la population vers Israël tout en envoyant un message aux Israéliens : si la pénurie d’énergie n’est pas rapidement résolue, la situation pourrait rapidement se détériorer à grande échelle.
Pourtant les informations en provenance de Gaza ne sont pas toutes négatives.
Tout d’abord, Israël n’a pas réduit, le 1er juin, le volume d’électricité qu’il fournit à la bande de Gaza, même si l’Autorité palestinienne (AP) a demandé à Israël, qui collecte l’argent des impôts pour le compte de l’AP et le lui transfère ensuite, de diminuer le montant qu’il déduit de cette somme pour payer la facture électrique de Gaza.
L’habitant moyen de la bande de Gaza bénéficie d’environ quatre à six heures d’électricité chaque jour. Si Israël avait réduit le volume d’électricité qu’il fournit, ce chiffre aurait été réduit de deux à quatre heures par jour. Bien évidemment, avec la pression du ministre de l’Infrastructure, de l’Energie et des Ressources en eau, Yuval Steinitz, les responsables de la défense ont décidé d’arrêter la diminution prévue et d’attendre.

Deuxièmement, le Hamas fait tout ce qui est en son pouvoir pour empêcher l’éclatement d’un nouveau conflit avec Israël. Si l’on observe attentivement son comportement depuis l’Opération Bordure protectrice qui s’est achevée en août 2014, le Hamas – une organisation qui a juré la destruction de l’Etat d’Israël – agit presque comme la propre police aux frontières d’Israël. Alors que l’objectif des positions qu’il a établies le long de la frontière d’Israël sert peut-être à surveiller l’ennemi, ils ont aussi empêché des hommes armés qui pouvaient perpétrer des attaques terroristes contre des cibles israéliennes de s’approcher de la barrière.
Le Hamas tente à la fois d’éviter les attaques terroristes et les tirs de roquettes contre Israël. Lorsqu’il n’a pas pu empêcher des tirs de roquettes, il a arrêté et même torturé des membres de groupes djihadistes responsables de ces tirs. Les groupes qualifiés de « rebelles » ont été responsables de tous les incidents de tirs de roquettes qui se sont produits, 40 en tout, depuis la fin de la guerre il y a presque trois ans.
Les responsables du Hamas contrôlent les conducteurs qui arrivent au point de passage de Kerem Shalom du côté palestinien afin de contrecarrer toutes les attaques terroristes possibles. Ils parlent aussi avec des pêcheurs palestiniens avant qu’ils ne partent en mer pour s’assurer qu’ils ne quittent pas les eaux où la pêche est autorisée.
C’étaient les bonnes nouvelles. Voici la suite.
L’armée de Deif
Même si le Hamas essaie d’éviter un conflit maintenant, il se prépare intensivement pour la prochaine guerre.
Et certains pensent que sa situation est plus forte aujourd’hui qu’à l’été 2014.
Le Hamas est organisé comme une armée, dans tous les sens du terme. Il dispose de 27 000 hommes armés et divisés en six brigades régionales, avec 25 bataillons et 106 compagnies.

Parmi ces soldats, 2 500 sont membres de la Nuhba, l’unité d’élite du Hamas. Un tiers de ces troupes sont préparés pour mener des attaques à l’intérieur du territoire israélien. Ces hommes armés sont supposés attaquer par le mer (des commandos marins), par les airs (en utilisant de petits drones ou des planeurs motorisés, par exemple), et, bien sûr, au sol, principalement à travers les tunnels transfrontaliers, d’où ils pourraient sortir pour mener des raids contre une communauté résidentielle israélienne ou une base de l’armée afin d’enlever des personnes ou de les tuer.
Les tunnels sont le point de focalisation des efforts militaires du Hamas.
Le Hamas investit plus dans des tunnels « défensifs », ceux qu’il utilise dans la bande de Gaza, que dans les tunnels d’attaque qui sont conçus pour entrer dans le territoire israélien. Il dispose de tunnels à l’intérieur de Gaza qui seraient longs de dizaines de kilomètres : une ville sous la ville qui permettra toutes les opérations de tirs de roquettes, tout comme la gestion des différents échelons de contrôle et de commandement du Hamas, pour continuer à fonctionner même lors des bombardements aériens intensifs par Israël.
C’est Mohammed Deif, chef terroriste aux neuf vies, qui est responsable de tous ces efforts. Né dans le camp de réfugiés de Khan Younis il y a 52 ans, Deif est un homme recherché depuis les années 1980, lorsqu’il était de ceux qui ont créé la branche armée du Hamas.
Deif a été blessé à plusieurs reprises dans des tentatives d’assassinats. Une de ses épouses et deux de ses enfants ont été tués dans une tentative israélienne de l’éliminer pendant l’opération Bordure protectrice en 2014.

Non seulement il est revenu à son poste malgré ses blessures, mais Deif est également considéré comme le commandant suprême de la branche armée du Hamas, et est responsable de la création d’une armée forte et de la préparation à la guerre. Alors que Yahya Sinwar, le chef du Hamas à Gaza, est considéré comme une sorte de « ministre de la Défense », Deif se concentre sur la dimension militaire. Il a mis en place un petit quartier général dont les membres incluent son assistant, Marwan Issa, le chef du renseignement militaire Ayman Nofal, et plusieurs commandants des brigades du Hamas.
Deif et son « ministre superviseur » Sinwar – les deux étant considérés comme des radicaux, même selon les standards du Hamas – sont prudents et peu pressés de commencer une guerre avec Israël, malgré la situation qui se détériore dans la bande de Gaza, la fermeture actuelle du point de passage de Rafah, et les menaces de l’AP de forcer des milliers de fonctionnaires à prendre leurs retraites et à réduire les salaires de ceux qui restent.
En ce qui concerne le nouveau-ancien Hamas dirigé par Ismaïl Haniyeh, Sinwar et Deif, l’objectif principal, au moins pour le moment, n’est pas d’entrer dans un autre conflit avec Israël, mais plutôt de permettre la survie du régime du Hamas à Gaza et une future prise des pouvoirs palestiniens centraux – en Cisjordanie et dans l’OLP – dans leur intégralité.

S’adapter
Le Hamas n’a pas envie d’entrer dans un autre conflit tout de suite car la population de Gaza a subi son lot de catastrophes et de guerre. Les Gazaouis se sont adaptés à la nouvelle situation de coupures prolongées d’électricité, aux réductions de salaires et ainsi de suite. Comme toujours, ils ont appris à survivre.
Par exemple, après l’iftar et le tarawih, le repas de fin de jeûne et le service de prière qui suit, les jeunes gens se précipitent dans les fameux cafés de Gaza, comme le Gahwetna, sur la plage polluée du quartier de Sheikh Ajlin, et Habiba. Le narghilé est l’élément le plus demandé là-bas, avec le café, le thé et le jus de fruit. Ces établissements sont réservés aux jeunes hommes, les shabab. D’autres établissements, comme le café Al-Deira (sur la plage Rimal), le Roots adjacent et le Level Up au onzième étage d’un bâtiment dans la section Rimal, ont une clientèle mixte.
Les menaces de l’AP à Ramallah de diminuer les transferts de fonds à Gaza se profilent toujours. T. est très critique. « Je ne sais pas ce qu’Abu Mazen [Mahmoud Abbas] essaie de faire avec les baisses des paiements pour l’électricité. Il veut punir le Hamas, mais en réalité il punit deux millions de Gazaouis. »
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