Biden, 1er président US à emprunter un vol direct entre Israël et l’Arabie saoudite
Dans un article du "Washington Post", le leader américain dit que ce voyage sans escale est un "petit symbole" du réchauffement des liens entre l'État juif et le royaume
Le président américain Joe Biden a noté qu’il sera le tout premier leader des États-Unis à prendre en vol direct, cette semaine, entre Israël et l’Arabie saoudite quand il se rendra dans les deux pays dans le cadre d’une visite officielle dans la région – un « petit symbole » du réchauffement des liens entre l’État juif et le monde arabe et des « avancées vers la normalisation », a-t-il dit.
Dans une tribune parue samedi dans le Washington Post et intitulée « Pourquoi je vais me rendre en Arabie saoudite », Biden explique qu’il fera « le voyage d’Israël jusqu’à Jeddah, en Arabie saoudite », où « tous les dirigeants de la région vont se rassembler, attirant l’attention sur la possibilité d’un Moyen-Orient plus stable, plus intégré et où les États-Unis joueront un rôle vital de leadership« .
Le président américain a ajouté qu’il sera « le tout premier président à prendre un vol direct entre Israël et Jeddah… un petit symbole des relations naissantes et des avancées en cours de la normalisation entre Israël et les pays arabes, une normalisation que mon administration œuvre à approfondir et à élargir ».
Biden doit se rendre mercredi au sein de l’État juif pour une visite de 48 heures qui comprendra également un déplacement sur les territoires de l’Autorité palestinienne. Il partira vendredi pour l’Arabie saoudite pour assister à une réunion, samedi, avec les leaders régionaux du Moyen-Orient dans le cadre du sommet GCC+3 (Conseil de coopération du Golfe – avec le Bahreïn, le Koweït, Oman, le Qatar, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis en plus de l’Irak, de l’Égypte et de la Jordanie).
En Arabie saoudite, Biden devrait réclamer une augmentation de la production pétrolière dans le royaume dans l’espoir de calmer la hausse en spirale des prix du carburant et l’inflation aux États-Unis – un changement dans son attitude à l’égard de Ryad, qu’il avait promis de traiter en « paria » pendant sa campagne électorale en raison des antécédents du royaume en matière de droits de l’Homme et de l’assassinat, en 2018, de Jamal Khashoggi — un résident saoudien né aux États-Unis connu pour ses articles critiques de la dynastie saoudienne au pouvoir dans le Washington Post.
Les conclusions tirées par les services de renseignement américain, rendues publiques par l’administration Biden, avait déterminé que le cerveau de cet assassinat avait été le prince héritier Mohammed ben Salman, connu sous le surnom de MBS.
Mais les événements qui se sont abattus sur le monde au cours de l’année passée – et particulièrement l’invasion de l’Ukraine par la Russie – ont obligé Biden à revoir son approche du royaume en raison de l’importance de ce dernier sur le marché du pétrole et du potentiel offert de renforcer l’intégration d’Israël dans la région.
Le mois dernier, Biden a cherché à prendre ses distances face à la rencontre avec MBS à venir, à Jeddah, lors du sommet GCC+3, soulignant devant les journalistes qu’il allait s’entretenir avec le roi Salman et son équipe.
Mais la Maison Blanche a confirmé, au début de la semaine, qu’il rencontrerait bien MBS, qui fait partie de la délégation saoudienne, au cours de ce déplacement.
Biden a noté dans le Washington Post qu’avec cette visite, il sera le premier président des États-Unis à effectuer un voyage au Moyen-Orient depuis le 11 septembre « sans troupes américaines engagées dans une mission de combat dans la région », ajoutant que pendant tout le déplacement, il conservera à l’esprit « les millions d’Américains qui ont servi dans la région » – c’était notamment le cas de son propre fils, Beau – « et les 7 054 soldats de l’armée des États-Unis morts durant des conflits au Moyen-Orient et en Afghanistan depuis le 11 septembre 2001 ».
Beau Biden était allé sur le front en Irak et est mort d’un cancer en 2015 à l’âge de 46 ans.
Dans sa tribune de samedi, Biden a remarqué que la région avait changé et qu’un « Moyen-Orient sûr et intégré bénéficiait aux Américains de nombreuses manières ».
« Les voies navigables de la région sont essentielles pour le commerce mondial et pour les chaînes d’approvisionnement sur lesquelles nous nous appuyons. Ses ressources énergétiques sont vitales pour alléger l’impact sur l’approvisionnement mondial de la guerre de la Russie en Ukraine. Et il est moins probable qu’une région qui se rassemble par le biais de la diplomatie et de la coopération – plutôt que de se déchirer suite aux conflits – donne naissance à l’extrémisme violent qui menace notre pays ou donne naissance à de nouvelles guerres qui pourraient placer un nouveau fardeau sur les épaules de nos militaires américains et de leurs familles. »
Le président américain indique que le Moyen-Orient dans lequel il arrivera, cette semaine, « est plus stable et plus sûr que celui dont mon administration avait hérité, il y a 18 mois ». Sans le nommer, Biden écrit que sous l’administration de son prédécesseur, Donald Trump, les attaques contre les militaires et contre les diplomates américains avaient augmenté dans la région, que la guerre au Yémen s’était intensifiée, et que l’Iran avait accéléré rapidement son programme nucléaire après que les États-Unis « se sont retirés d’un accord qui fonctionnait » – en référence à l’accord sur le nucléaire de 2015 conclu entre Téhéran et six grandes puissances, et notamment les États-Unis placés, à ce moment-là, sous l’autorité de l’administration Obama.
Biden précise, dans le journal, avoir travaillé avec les dirigeants de toute la région, notamment avec le roi d’Arabie saoudite, pour parvenir à « poser les fondations » d’une trêve au Yémen de manière à pouvoir faire entrer des aides humanitaires vitales, et qu’il a « réuni nos alliés et nos partenaires en Europe et dans le monde entier » concernant la problématique iranienne « pour renverser notre isolement ».
« Maintenant, c’est l’Iran qui sera isolée jusqu’à ce qu’elle réintègre l’accord sur le nucléaire qui avait été abandonné par mon prédécesseur sans aucun plan permettant de le remplacer », a-t-il poursuivi.
Concernant Ryad, Biden explique que son objectif est de « réorienter – mais pas de rompre – les relations avec un pays qui est un partenaire stratégique des États-Unis depuis 80 ans ».
« Aujourd’hui, l’Arabie saoudite a aidé à restaurer l’unité parmi les six pays du Conseil de coopération du Golfe ; elle a soutenu pleinement la trêve au Yémen et elle travaille actuellement avec les experts américains pour aider à stabiliser le marché du pétrole avec les autres producteurs de l’OPEC », a-t-il précisé dans le journal.
En tant que président des États-Unis, Biden déclare que son travail « est de maintenir le pays fort et sûr » et de « contrer les agressions russes, nous placer dans le meilleur positionnement possible pour concurrencer la Chine, et travailler pour une stabilité plus grande dans l’une des régions les plus importantes du monde ».
« Et pour réaliser cela, nous devons nous engager directement auprès des pays qui peuvent avoir un impact. L’Arabie saoudite est l’un d’entre eux… », a-t-il poursuivi, défendant le voyage prévu qui a pu être critiqué aux États-Unis.
Biden explique que la région a de nombreux défis à relever qui lui sont propres – notamment « le programme nucléaire de l’Iran et le soutien apporté par l’Iran à ses groupes mandataires ; la guerre civile syrienne ; les crises relatives à la sécurité alimentaire qui sont exacerbées par la guerre russe en Ukraine ; les groupes terroristes qui agissent encore dans un certain nombre de pays ; l’impasse politique en Irak, en Libye et au Liban ; et les droits de l’homme qui restent à la traîne, derrière de nombreuses nations du monde » – mais que dorénavant, elle « subit moins de pressions et elle est plus intégrée ». Ceci grâce en partie aux liens croissants entre Israël et certains États arabes, au rôle diplomatique tenu par l’Irak dans les négociations entre l’Arabie saoudite et l’Iran et aux relations et autres engagements régionaux plus nombreux – ce que le roi de Jordanie, Abdallah II, a qualifiés de « nouvelle vibration ».
« Ce sont des tendances prometteuses que les États-Unis peuvent renforcer d’une manière inégalée. Et mon déplacement de la semaine prochaine sera placé au service de cet objectif », a écrit Biden.
Les ouvertures dans le domaine sécuritaire entre Israël et les pays arabes se sont multipliées depuis les accords d’Abraham, négociés par l’administration Trump et qui ont permis à l’État juif de normaliser ses liens avec quatre nations de la Ligue arabe. Ces liens se sont encore renforcés depuis que le Pentagone a fait passer la responsabilité de la coopération avec Israël, qui se déroulait jusqu’à présent sous l’autorité du Commandement européen américain, au Commandement central, ou CENTCOM, l’année dernière. Cette initiative a rapproché l’armée israélienne de ses anciens adversaires arabes, dont l’Arabie saoudite et d’autres nations qui n’ont pas encore reconnu l’État juif.
Encourager les nations arabes à renforcer les relations sécuritaires et autres avec Israël est l’un des objectifs du voyage de Biden au sein de l’État juif et en Arabie saoudite, la semaine prochaine, a confié John Kirby, porte-parole du Conseil national de sécurité, la semaine dernière.
Un emploi du temps garni
Biden doit atterrir à l’aéroport international Ben Gurion, à proximité de Tel Aviv, dans l’après-midi de mercredi, où il sera accueilli par le Premier ministre Yair Lapid dans le cadre d’une cérémonie officielle.
Son déplacement de 48 heures comprendra des rencontres avec des leaders israéliens, la présentation de plusieurs systèmes de sécurité et notamment du « Rayon de fer », une visite au musée de la Shoah de Yad Vashem à Jérusalem et un discours lors de la cérémonie d’ouverture des Maccabiades, les Jeux olympiques juifs.
Biden s’entretiendra à Bethléem avec le dirigeant de l’Autorité palestinienne et il devrait annoncer toute une série d’initiatives visant à renforcer l’AP, a déclaré mercredi dernier un haut-responsable américain au Times of Israel lors d’un entretien consacré au déplacement du leader américain.
Biden repartira ensuite à l’aéroport Ben Gurion où il prendra un vol direct inédit pour l’Arabie saoudite, pour assister au sommet GCC+3.
Un diplomate arabe a confié mercredi au Times of Israel que les États-Unis redoublaient d’activité pour finaliser, avant l’atterrissage de Biden, le transfert de deux îles situées en mer Rouge du contrôle égyptien au contrôle saoudien, en vertu d’un accord par lequel Riyad prendrait également des mesures pour normaliser ses relations avec Israël.
La normalisation passerait par l’ouverture de l’espace aérien d’Arabie saoudite aux vols israéliens vers l’Extrême-Orient, en plus de la mise en place de vols directs entre Israël et l’Arabie saoudite pour les pèlerins musulmans, a déclaré le diplomate du Moyen-Orient, confirmant les informations publiées sur le site d’information Axios.
Biden évoquera aussi les efforts de coopération régionaux plus généralement, avec le maintien du cessez-le-feu entre les parties en conflit au Yémen et la crise énergétique qui s’est abattue sur le monde.
Jacob Magid et l’AFP ont contribué à l’écriture de cet article.
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