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Cisjordanie : L’OLP réclame des actions internationales contre l’annexion

Saeb Erekat estime que Netanyahu peut "survivre aux condamnations" mais qu'il doit comprendre les "conséquences" de ses actes

Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.

Saeb Erekat, le secrétaire général de l'OLP, s'adresse aux médias après une réunion avec des diplomates à Ramallah en Cisjordanie, le 30 janvier 2019. (Crédit : ABBAS MOMANI / AFP)
Saeb Erekat, le secrétaire général de l'OLP, s'adresse aux médias après une réunion avec des diplomates à Ramallah en Cisjordanie, le 30 janvier 2019. (Crédit : ABBAS MOMANI / AFP)

Le haut-responsable palestinien à la tête des efforts diplomatiques menés par Ramallah pour déjouer les plans d’annexion d’Israël a appelé les dirigeants du monde entier à aller plus loin que la simple réprimande et à montrer au Premier ministre Benjamin Netanyahu qu’il y aura des conséquences mondiales en cas d’avancée de ce projet controversé.

« Ce qu’on leur dit, c’est que Netanyahu peut survivre aux déclarations de condamnation et qu’il faut qu’il comprenne qu’il y aura des réactions violentes et également des conséquences », a expliqué Saeb Erekat, secrétaire-général du comité exécutif de l’Organisation de libération de la Palestine.

Erekat, confident du président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, s’est entretenu avec le Times of Israël dans le contexte de l’accord de coalition conclu ce mois-ci entre Netanyahu et le président de la formation Kakhol lavan, Benny Gantz, qui autorise l’avancée d’une loi d’annexion de vastes pans de la Cisjordanie à partir du 1er juillet.

Au cours de cette interview féroce, Erekat a accusé Netanyahu de « chercher à détruire tous les esprits modérés parmi les Palestiniens » et il a averti que l’annexion condamnerait l’AP.

Il a admis qu’aucun dirigeant international ne lui avait par ailleurs fait part des initiatives concrètes qui pourraient être prises contre Jérusalem si l’Etat juif devait décider de mettre en œuvre les articles 28 et 29 de l’accord de coalition.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu serre la main de Saeb Erekat à Jérusalem, en avril 2012. Ils sont accompagnés de Yitzhak Molcho, assistant de Netanyahu, et de Majed Faraj, chef de la sécurité de l’Autorité palestinienne. (AMOS BEN GERSHOM / GPO / FLASH90)

« Nous tentons tout ce que nous pouvons. Nous entrons en contact avec tout le monde et on dit bien que si Israël devait faire avancer ses plans d’annexion, cela signifierait que Palestiniens et Israéliens ne concluront jamais un accord négocié », a expliqué Erekat, qui est également à la tête du département des affaires des négociations de l’OLP et qui a représenté Ramallah au cours de nombreux cycles de pourparlers de paix avec Israël par le passé.

Il a également salué les hauts-responsables du monde entier qui ont pris le temps d’évoquer le problème de l’annexion en pleine gestion de pandémie du coronavirus et il a déclaré que tous – exception faite des leaders des Etats-Unis – « sont défavorables à l’annexion au plus haut point ».

De plus, jeudi, les ministres des Affaires étrangères arabes se sont réunis en urgence et ont signé une résolution qualifiant l’initiative d’annexion israélienne de « crime de guerre ».

Amman contrariée ; Washington ne suit pas sa « politique historique »

Alors qu’il est resté vague sur les pays s’étant exprimés contre l’annexion, il a précisé que la Jordanie était « particulièrement contrariée » face à cette perspective.

« Ce que j’ai entendu de la bouche même du roi de Jordanie et du ministère des Affaires étrangères, c’est que l’annexion mettra en péril la sécurité nationale jordanienne », a-t-il noté.

Sans identifier qui que ce soit d’autre, Erekat a clamé que les leaders avec lesquels il s’était entretenu lui avaient dit qu’ils pensaient que Netanyahu utilisait « la couverture du coronavirus » pour mener à bien son plan d’annexion, en espérant que ses opposants seraient trop préoccupés par cette crise sanitaire publique pour prendre le temps de riposter.

Le roi de Jordanie Abdallah II (à droite) et le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas réunis à Amman, le 18 décembre 2018. (Crédit : Wafa)

« La question que nous avons posée aux dirigeants était la suivante : Disons que Netanyahu procède à l’annexion, qu’arrivera-t-il le lendemain ? Les choses continueront-t-elles comme à l’ordinaire ? Allez-vous lui donner une récompense en disant aux Palestiniens de faire avec et de se montrer réalistes et pragmatiques ? », a-t-il dit.

Jusqu’à présent, les gouvernements, dans le monde entier, ont réagi – mais pas par des menaces concrètes. Josep Borrell, le chef de la diplomatie de l’Union européenne, a déclaré la semaine dernière que « toute annexion constituerait une violation grave du droit international ».

L’Allemagne, la France, la Chine, la Belgique, l’Espagne, l’Irlande, l’Italie et la Norvège ont fait des déclarations similaires mais aucun de ces pays n’a précisé quelles actions seraient entreprises si Netanyahu devait faire avancer sa promesse pré-électorale.

Concernant les Etats-Unis – avec lesquels Ramallah a rompu tous les liens depuis la reconnaissance par Washington de Jérusalem en tant que capitale d’Israël, en 2017 – Erekat a clamé que ses récentes approbations de l’annexion de la Cisjordanie ne représentaient pas la politique historique américaine sur le sujet.

« Cela ne représente pas ce que sont les Etats-Unis », a-t-il affirmé.

L’AP avait rejeté le plan de paix de l’administration Trump, qui prévoit l’annexion par Israël de toutes les implantations en Cisjordanie et de la vallée du Jourdain dans le cadre d’une solution à deux Etats « réaliste » qui verrait les Palestiniens obtenir un état semi-contigu et semi-autonome sur environ 70 % de la Cisjordanie.

Alors qu’il lui était demandé s’il était en contact avec une personne de l’entourage du candidat démocrate à la présidentielle américaine, Joe Biden, que de nombreux Palestiniens considèrent comme leur dernier espoir, Erekat a déclaré qu’il ne souhaitait pas interférer « dans des questions internes américaines » tout en notant qu’il avait contacté d’importantes personnalités du Parti démocrate, une formation qui s’oppose « unanimement » à l’annexion – « comme c’est le cas aussi de nombreux Républicains ».

« Je connais personnellement Biden depuis 30 ans », a-t-il ajouté. « J’ai vu ses déclarations, j’ai entendu ses discours et ses interviews télévisées. Cet homme est constant dans son soutien à la solution à deux Etats et dans son rejet de l’annexion. J’espère qu’il agira », a-t-il commenté.

Le président américain Barack Obama et son vice-Président, Joe Biden, en compagnie de Saeb Erekat, Mohammed Shtayyeh,Tzipi Livni et Yitzhak Molho dans le Bureau ovale, le 30 juillet 2013. (Crédit : Chuck Kennedy/Maison Blanche)

Mardi, le haut-conseiller à la politique étrangère de Joe Biden, a déclaré que le candidat démocrate à la Maison Blanche était opposé à l’annexion et qu’il chercherait à faire revivre et à faire « enfin avancer » la solution à deux États s’il devait être élu.

Il a toutefois précisé qu’il n’allait pas « préjuger de ce que nous pourrions faire ou non dans le contexte d’une administration Biden », de nombreuses choses étant susceptibles de changer d’ici là. Il a par ailleurs ajouté que Joe Biden maintiendrait l’ambassade américaine à Jérusalem et qu’il ne reviendrait pas sur la décision prise par le président Donald Trump de transférer la mission américaine depuis Tel Aviv dans la ville sainte.

« C’est ce que nous avons obtenu pour avoir soutenu les négociations »

Erekat a réservé ses paroles les plus dures pendant l’interview à Netanyahu qui, a-t-il dit, « veut détruire tous les esprits les plus modérés parmi les Palestiniens et tous ceux qui croient à la paix, aux négociations et à la non-violence ».

« Nous étions ces mêmes Palestiniens qui avions reconnu Israël et négocié avec Israël et tout ce que nous avons obtenu, c’est une carte d’annexion, une carte d’implantations et une carte de la ville de Jérusalem qui, à l’est, à l’ouest, au nord et au sud est devenue la capitale d’Israël », a-t-il continué.

Le plan de l’administration Trump, soutenu par Israël, prévoit que Jérusalem restera « la capitale indivisible » de l’Etat juif tandis que des secteurs situés dans la banlieue de Jérusalem-Est, à l’est et au nord de la barrière de sécurité de Cisjordanie, pourraient être appelés à devenir la capitale potentielle du futur Etat palestinien.

« Cet homme (Netanyahu) croit que pour l’avenir d’Israël, il ne faut pas la paix mais le conflit. Même lorsqu’il évoque des alliances arabes, il s’exprime dans le contexte du combat contre d’autres nations, comme l’Iran », s’est emporté Erekat.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu s’exprime devant une carte de la vallée du Jourdain dans une déclaration dans laquelle il promet d’étendre la souveraineté israélienne à la vallée du Jourdain et au nord de la mer Morte, à Ramat Gan, le 10 septembre 2019. (Menahem Kahana/AFP)

« C’est lui qui a écrit le chapitre sur la manière de ne pas conclure un accord dans le livre des négociations », a-t-il accusé.

Le bureau du Premier ministre n’a pas répondu à une demande de commentaires sur les propos tenus par le responsable de l’OLP au sujet de Netanyahu.

Erekat a ajouté que Ramallah avait informé Gantz et les conseillers de Netanyahu qu’il y aurait des « réactions violentes » si Jérusalem devait déclarer sa souveraineté sur la Cisjordanie.

Et si Netanyahu devait néanmoins faire avancer ses plans, « il déclarera ainsi l’annulation des accords signés et il déclarera également qu’il a voulu détruire l’AP », a-t-il continué, reprenant des propos tenus la semaine dernière par Abbas.

« Et il finira par endosser la responsabilité de toute la population, du fleuve Jourdain jusqu’à la mer Méditerranée… où les Palestiniens sont majoritaires », a-t-il dit.

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