Corona: Des experts de la santé et chefs de services en faveur du modèle suédois
Une lettre ouverte de 90 médecins et chercheurs, dont un Prix Nobel de chimie, exhorte Israël à atteindre l'immunité collective tout en protégeant les personnes âgées

Des dizaines de médecins et de scientifiques ont lancé une campagne demandant au gouvernement de ne pas imposer un nouveau confinement, affirmant que les craintes concernant la pandémie de coronavirus sont exagérées et que les dommages économiques d’une telle mesure s’avéreront trop élevés à supporter.
Parmi les quelque 90 médecins et chercheurs signataires d’une lettre ouverte mettant en garde contre un confinement général, se trouvent le Prix Nobel de chimie Michael Levitt et les directeurs des services d’urgence ou des services de lutte contre le coronavirus de plusieurs hôpitaux.
Dans cette lettre, les experts avertissent que le confinement n’est qu’une mesure temporaire qui ne stoppe pas le virus mais ne fait que le retarder, ce qui a pour effet d’atténuer les dégâts causés par la pandémie et de mettre davantage de personnes en danger.
« Compte tenu de la grande quantité d’informations qui s’accumulent sur le faible danger de mortalité au sein de la population saine, et de l’incertitude quant à l’efficacité et à la sûreté d’un prochain vaccin, et à la lumière des recherches effectuées jusqu’à présent, il est clair que la meilleure manière de sortir rapidement de la crise avec un minimum de décès (et de dommages pour la santé et l’économie) est de se focaliser sur le développement d’une immunité profonde en empêchant la population âgée à risque d’être infectée », peut-on lire dans la lettre.

« Un confinement est donc une erreur stratégique, basée sur un manque de compréhension fondamentale des mécanismes d’une pandémie », ajoute-t-elle.
Parmi les politiques recommandées, l’élaboration d’un modèle expérimenté par la Suède, qui a évité un confinement et n’a imposé qu’une série minimale de restrictions, dans le but de développer l’immunité collective, qui se produit lorsqu’une partie suffisante d’une population développe des anticorps et que les taux d’infection chutent à des niveaux insignifiants.

Dimanche, la Suède comptait un peu moins de 85 000 cas confirmés et plus de 5 800 décès. Alors que certains ont souligné le nombre élevé de décès résultant de l’approche laxiste du pays, les responsables de la santé à Stockholm maintiennent qu’il n’est pas certain qu’un confinement aurait conduit à une diminution significative du nombre de cas.
Si les auteurs de la lettre admettent que la Suède a commis quelques erreurs politiques, ils affirment également que la population suédoise est plus sensible à la maladie en raison d’un âge moyen plus élevé et d’autres facteurs, ce qui indique qu’Israël s’en sortirait encore mieux avec ce modèle.
« Nous appelons à annuler l’option du confinement. Dans le même temps, nous demandons d’aligner les politiques suédoises sur la réalité israélienne, en détournant les infections des groupes à risque vers ceux qui ne le sont pas », peut-on lire dans la lettre.
La lettre semble aller à l’encontre des recommandations des experts de l’Organisation mondiale de la santé et de nombreux responsables gouvernementaux en Israël.
Les confinements en Chine et ailleurs, qui ont maintenu les gens chez eux et les ont empêchés d’infecter d’autres personnes, auraient permis de contribuer à la quasi-éradication de la maladie dans ces pays.

Parmi les signataires figure Levitt, qui a remporté le prix Nobel de chimie en 2013. Levitt, connu pour minimiser le virus, a déclaré au radiodiffuseur public Kan en mars dernier qu’il serait surpris si plus de 10 personnes y succombaient en Israël. Le 25 juillet, il a déclaré que la pandémie serait révolue aux États-Unis dans les quatre semaines prochaines avec un nombre total de décès inférieur à 170 000, un chiffre qu’il a admis le 25 août comme étant une estimation trop basse (le 7 septembre, le nombre de décès aux États-Unis dus à la COVID-19 s’élevait à 188 941, selon les données de l’université Johns Hopkins).
Sont également signataires les chefs des services d’urgence et des unités de coronavirus de plusieurs hôpitaux à Haïfa, Afula et Netanya.
L’un des signataires est Dr Amir Schachar, chef du service des urgences de l’hôpital Laniado de Netanya, qui a récemment connu une importante épidémie dans le service gériatrique de l’hôpital, ce qui aurait épuisé ses ressources.
Dr Schachar a déclaré au journal de la Douzième chaîne que son hôpital n’avait aucune difficulté à traiter ces cas.
« Nous savons comment traiter les patients gravement malades, le taux de mortalité n’est pas anormal par rapport à d’autres maladies virales, et l’hystérie est totalement inutile », a-t-il déclaré.

Pr Mark Last, un autre signataire de la lettre, qui est à la tête du département des logiciels et des systèmes d’information de l’université Ben-Gourion, a récemment déclaré au Times of Israel qu’il pensait qu’Israël s’approchait de l’immunité collective, calculant que 9 cas sur 10 n’avaient pas été signalés.
« Nous devrions être au pic dans les deux ou trois prochaines semaines à venir, et entamer une lente diminution du nombre de nouveaux cas, en supposant qu’il n’y ait pas de changement dans les restrictions actuelles », a-t-il déclaré la semaine dernière.
Lundi matin, Israël avait enregistré plus de 130 000 cas au total, avec une augmentation de 1 500 à 2 500 cas par jour au cours des dernières semaines, selon le nombre de tests effectués.
Le nombre de morts s’élève à 1 019. Sur les 27 148 cas actifs, 453 patients sont dans un état grave et 131 personnes sont sous respirateur.
Le gouvernement de transition israélien a imposé des mesures de confinement sévères pendant la première vague du virus, parvenant à ramener le nombre de cas quotidiens à quelques dizaines en mai, mais depuis lors, la pandémie s’est propagée à un rythme sans précédent, faisant de ce pays l’un des plus infectés par habitant au monde. Les responsables ont porté le blâme sur la réouverture rapide des écoles et d’autres services, un faible système de recherche des contacts et un manque de volonté générale de maintenir des lignes directrices pour faire face à la hausse de ces derniers mois.

Dimanche soir, le gouvernement a fait marche arrière dans son projet d’imposer des fermetures à une quarantaine de villes ayant des taux d’infection particulièrement élevés, imposant à la place des couvre-feux nocturnes pendant lesquels les commerces non essentiels devront fermer. Les écoles dans ces villes seront fermées indéfiniment.
La décision de revenir sur les plans de confinement est intervenue suite à une forte pression de la communauté ultra-orthodoxe, qui considère l’inclusion de plusieurs zones ultra-orthodoxes dans la liste des zones sensibles comme une forme de discrimination.
Les responsables insistent sur le fait qu’un confinement à l’échelle nationale est toujours possible, notamment lors des prochaines grandes fêtes.