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Décès de Walter Jacob, rabbin qui a contribué à la renaissance du judaïsme réformé en Allemagne

Issu d'une lignée de rabbins vieille de 400 ans, cet universitaire de Pittsburgh dont la famille avait fui la Shoah est revenu pour favoriser un renouveau du judaïsme libéral, qui s'est étendu à plus de 30 communautés dans tout le pays

Walter Jacob, rabbin de Pittsburgh qui a contribué à la renaissance du judaïsme réformé en Allemagne, décède à l'âge de 94 ans
Walter Jacob, rabbin de Pittsburgh qui a contribué à la renaissance du judaïsme réformé en Allemagne, décède à l'âge de 94 ans

PITTSBURGH (JTA) – Le rabbin Walter Jacob qui, 60 ans après avoir quitté l’Allemagne en tant que réfugié était revenu dans le pays pour aider à relancer sa communauté juive libérale, s’est éteint le 20 octobre alors qu’il se trouvait à son domicile, à Pittsburgh. Il avait 94 ans.

Rabbin de longue date de la congrégation Rodef Shalom de Pittsburgh, une synagogue progressiste, Jacob descendait d’une lignée de rabbins allemands vieille de quatre siècles. En 1999, il avait rendu hommage à cet héritage en fondant l’Abraham Geiger College à l’université de Potsdam, le premier séminaire rabbinique libéral ou réformé à avoir ouvert ses portes en Europe continentale depuis la Shoah.

L’Allemagne est en train de « reconstruire une vie juive vraiment solide, et c’est un très bon début », avait déclaré Jacob, qui était alors président du Geiger College, en 2006, au moment où le séminaire était sur le point d’ordonner sa toute première promotion de rabbins libéraux en Allemagne depuis 1942. « Mes ancêtres ont été rabbins en Allemagne et en Europe centrale depuis 16 générations. Je suis heureux qu’il y ait de nouvelles générations de rabbins », avait-il ajouté.

Malgré la réticence affichée par l’establishment orthodoxe allemand à l’idée de reconnaître les congrégations non-orthodoxes et les schismes qui apparaissaient à l’intérieur des congrégations libérales, Jacob avait aidé le mouvement réformé en Allemagne à passer de seulement quelques communautés à plus de 30 en 2023.

« J’ai eu le privilège de connaître Walter non seulement en tant que dirigeant exceptionnel de notre mouvement, mais aussi en tant que rabbin chaleureux et attentif, profondément attaché à l’idée de transmettre son amour du judaïsme aux autres », a commenté la rabbine Lea Mühlstein, présidente de l’Union européenne pour le judaïsme progressiste, dans un communiqué. « Il était un penseur dans toute la profondeur du terme, il avait toujours des réflexions importantes à partager mais, par-dessus tout, il était un véritable mensch qui prenait beaucoup de plaisir à voir les autres réussir ».

Jacob avait été rabbin au sein de sa congrégation de Pittsburgh pendant 42 ans et il en était le rabbin émérite depuis 27 ans. De 1992 à 1994, il avait été le président de la Conférence centrale des rabbins américains, l’instance de représentation des rabbins réformés aux États-Unis, et de 1990 à 1994, il avait été le vice-président de la World Union for Progressive Judaism.

Auteur prolifique, il avait écrit trois volumes de conseils rabbiniques sur les applications pratiques de la loi et de la théorie juives du point de vue du mouvement réformé, des ouvrages destinés à la CCAR Press.

Jacob était né en 1930 à Augsbourg, en Allemagne, dans le foyer d’Annette Loewenberg Jacob et du rabbin Ernst Jacob. Selon « The Seventeenth Generation : The Lifework of Rabbi Walter Jacob », une biographie datant de 2018 qui avait été commandée par sa synagogue, Jacob était le petit-fils de Rabbi Benno Jacob (1862-1945), un célèbre érudit biblique, dont Jacob avait traduit les œuvres en anglais.

La famille avait fui l’Allemagne nazie pour se réfugier à Londres en 1939, puis dans le Missouri où son père avait travaillé comme rabbin à partir de 1943. Walter Jacob avait obtenu une licence au Drury College de Springfield (Missouri) en 1950. Il avait reçu l’ordination et passé une maîtrise au Hebrew Union College-Jewish Institute of Religion du mouvement réformé en 1955. Il avait reçu un doctorat de la même institution en 1961.

Jacob et Irene Loewenthal s’étaient mariés en 1958. Ils étaient cousins ; la famille de Loewenthal, qui était originaire de Hambourg, avait pu fuir à Londres en 1938. La fille aînée du couple, Claire, était née avec un handicap, et les Jacob avaient créé un établissement accueillant des enfants handicapés comme elle, Horizon Home, qui fait aujourd’hui partie des Mainstay Life Services à Pittsburgh.

Photo d’illustration : Des chantres et des rabbins ordonnés lors d’une cérémonie à la synagogue Rykestrasse de Berlin, le 5 septembre 2024. Au total, 55 candidats ont été ordonnés depuis l’ouverture du Geiger College en 1999. (Crédit : Toby Axelrod/JTA)

Irene Jacob était décédée en 2012. Il avaient eu trois enfants, Claire, Kenneth et Daniel, qui les avaient précédés dans la mort.

Jacob avait été engagé à Rodef Shalom par le rabbin Solomon Freehof en 1955 et il avait servi comme aumônier dans l’armée de l’air américaine aux Philippines de 1955 à 1957, avant de revenir à Pittsburgh pour travailler à Rodef.

En 1986, Jacob et son épouse avaient créé le jardin botanique biblique à Rodef Shalom, un projet qui avait attiré l’attention dans le pays et à l’international. Jacob aura effectué un travail profondément interconfessionnel : parmi ses 43 livres figure « Christianity Through Jewish Eyes : The Quest for Common Ground », qui était sorti en 1984. Il avait enseigné au Chatham College et au Pittsburgh Theological Seminary, et il avait été le président de la Religious Education Association of America de 1981 à 1985.

En 1996, Jacob était retourné en Allemagne et il avait été rabbin honoraire de la congrégation juive libérale Beth Shalom, à Munich. Constatant que le pays ne disposait pas de son propre séminaire pour les rabbins libéraux, il s’était juré d’en créer un, qu’il avait baptisé du nom du rabbin allemand du 19e siècle qui est considéré comme le père du judaïsme réformé.

En 2015, le collège qu’il avait fondé avait décerné le prix Abraham Geiger à la chancelière allemande Angela Merkel. Dans son allocution, Merkel avait souligné « le grand cadeau que représente le fait qu’il y ait à nouveau une vie juive riche et diversifiée en Allemagne ». Le recteur fondateur du collège figurait parmi les intervenants qui ont pris la parole lors des funérailles de Jacob à Rodef Shalom, le 22 octobre.

Photo d’Illustration : Des chantres et des rabbins sont ordonnés lors d’une cérémonie à la synagogue Rykestrasse de Berlin, le 5 septembre 2024. (Crédit : Toby Axelrod/JTA)

Parmi les honneurs qui lui avaient été remis en Allemagne, Jacob avait été décoré de la Grand-Croix de l’Ordre du Mérite de la République fédérale d’Allemagne et il avait été nommé professeur de l’État de Brandebourg.

Il avait également été fait commandeur de l’ordre équestre de Saint-Grégoire le Grand par le pape Jean-Paul II.

Lors de ses funérailles, la rabbine Deborah Pine, responsable au sein de l’organisation Hillel International, a évoqué Jacob en parlant d’un mentor qui savait ce qui comptait le plus. Lors de leur dernière rencontre, deux semaines avant son décès, il lui avait demandé : « Que puis-je faire pour vous aider ? De quoi avez-vous besoin ? » au moment où elle prenait congé.

L’engagement de Jacob en faveur des bourses d’études a été un thème récurrent parmi les personnes qui se sont exprimées lors de ses funérailles. Le rabbin Danny Schiff, chercheur de la communauté Gefsky au sein de la Fédération juive du Grand Pittsburgh, a déclaré à JTA que lorsqu’il avait rencontré Jacob pour la première fois à la World Union for Progressive Judaism à Jérusalem, la première question de son collègue avait été : « Que lisez-vous ? »

L’intérêt que portait Jacob aux responsa, a déclaré Schiff, se justifiait parce qu’elles « produisaient des résultats dans le monde réel », ajoutant que « les responsa sont le côté intellectuel du judaïsme qui parle le plus au peuple juif ».

Lors des funérailles, le rabbin Andrew Busch, de la Baltimore Hebrew Congregation et qui avait été l’assistant de Jacob à Rodef Shalom, a cité ce qu’avait noté Jacob dans un article écrit en 1995 pour l’Institut Solomon Freehof pour la Halacha progressiste, qui avait été fondé par Jacob.

« Le judaïsme a toujours été une religion très optimiste, avec un amour de la vie qui imprègne tous ses aspects », avait écrit Jacob. « Notre amour de la vie doit nous amener à vouloir la perpétuer et chaque être humain doit donc faire de son mieux pour la perpétuer dans la génération suivante ».

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