Des photos et vidéos irrespectueuses prises au mémorial de la Shoah d’Ottawa
Une marque locale en particulier a récemment fait l'objet de critiques sur les réseaux sociaux et en dehors pour une campagne réalisée sur le site du mémorial
De la même façon que la mode qui consiste à prendre des selfies tout-sourire au mémorial de la Shoah de Berlin ou des photos peu dignes, le monument national de la Shoah à Ottawa est utilisé comme toile de fond pour des séances photos, des campagnes de mode et des clips vidéo qui n’ont rien à voir avec l’hommage que le lieu vient rendre aux victimes et aux survivants, a rapporté ce lundi Radio-Canada.
Ainsi, une marque en particulier, l’entreprise de vêtements locale V Kentay, a récemment fait l’objet de critiques sur les réseaux sociaux et en dehors pour une campagne réalisée sur le site du mémorial.
Une vidéo publiée l’année dernière sur ses réseaux sociaux et sur son site web a récemment attiré l’attention. Celle-ci montre un mannequin portant les vêtements d’une nouvelle collection, notamment de maillots de bain, posant sur le site du mémorial. Au moins deux autres vidéos de l’entreprise y ont été tournées, rapporte Radio-Canada.
Contactée par la chaine CBC News, la cofondatrice de V Kentay, Phoebe Genus, a présenté des excuses.
« Il a été porté à notre attention que V Kentay a offensé la communauté juive et la communauté d’Ottawa », a t-elle écrit dans une déclaration écrite envoyée par mail. « D’un point de vue créatif, le mémorial semblait correspondre parfaitement à ce que mon équipe et moi recherchions esthétiquement pour cette campagne particulière. J’ai commis une erreur en omettant les implications politiques ou émotionnelles que cette décision pourrait causer. Je présente mes plus sincères excuses et je regrette d’avoir pris cette décision. J’ai fait une erreur en tant que nouvelle propriétaire d’entreprise. »
La marque a depuis supprimé les vidéos de son site web et de ses réseaux sociaux.
« C’est troublant et ce n’est pas la première fois que cela se produit », a expliqué Mina Cohn, présidente du Center for Holocaust Education and Scholarship (CHES).
Judy Young, une autre membre du CHES et survivante de la Shoah, considère qu’il faut en faire davantage pour informer le public.
« Je pense qu’il devrait y avoir plus d’informations, pas seulement sur le monument lui-même, mais sur l’importance de cet endroit », a-t-elle dit.
« Savoir que cet endroit a été profané, que la mémoire [des victimes] a été profanée et qu’un lieu de réflexion et d’éducation a été utilisé pour une séance de photos de mode, et pas seulement une fois, c’est incroyablement frustrant et décourageant », a réagi Andrea Freedman, présidente et cheffe de la direction de la Fédération juive d’Ottawa.
Le mémorial public, inauguré en 2017, qui se trouve dans le centre-ville, est intitulé « Un paysage de deuil, de souvenirs et de survie ».
« Le Monument national de la Shoah fait en sorte que les leçons tirées de l’Holocauste et la remarquable contribution des survivants de la Shoah au Canada resteront vivantes dans la mémoire des prochaines générations », indique la Commission de la capitale nationale (CCN), instance responsable de sa gestion, sur son site Internet.
Il comprend un espace sombre entouré par des murs gris en béton formant six segments triangulaires. Ces murs créent les pointes d’une étoile de David, qui entoure un lieu de rassemblement central. La hauteur et l’inclinaison des murs varient afin d’obtenir une géométrie dynamique, avec des vues qui changent à mesure que les visiteurs circulent dans le monument et autour de celui-ci. La partie basse propose des illustrations et des indications sur la Shoah, avec notamment six paysages photographiques de lieux de la Shoah peints sur les murs. Une exposition avec 21 panneaux d’interprétation est aussi proposée. Il est ainsi bien évident qu’il s’agit d’un « Monument national de l’Holocauste », avec de grands panneaux de chaque côté des entrées du site qui l’indiquent.
Alors qu’il n’y a pas de règles officielles définies concernant les photographies et les vidéos, Mme Freedman estime que les gens devraient savoir quel est son but, et ainsi respecter le lieu.