Des résidents du centre d’Israël réclament l’accès à un immense espace vert clôturé
Le village historique pour les jeunes agriculteurs Mikvé Israël n'est pas un parc, mais un site pédagogique et une ferme, à la valeur patrimoniale, insistent ses responsables
Les habitants d’une région densément peuplée du centre d’Israël réclament l’accès à un immense site vert situé à leur porte, qui a abrité la première école agricole de la Terre d’Israël et qui comprend aujourd’hui plusieurs écoles, une ferme, des champs, des vergers, des bois et le premier jardin botanique du pays.
Mikveh Israel Agricultural Youth Village est situé sur quelque 330 hectares de terrain de premier choix dans le centre d’Israël, entouré par la ville de Holon, l’autorité locale d’Azor et les quartiers sud de Tel Aviv.
Aucun de ces lieux n’était habité en 1870, lorsque le sultan ottoman a loué les terres à l’organisation éducative Kol Israel Haverim (KIAH), qui fait partie de l’Alliance israélite universelle, pour y établir une école d’agriculture, Mikvé Israël.
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En 1956, KIAH a signé un contrat avec l’État d’Israël pour créer une société en copropriété. L’État a loué les terres à KIAH pour 99 ans, avec une option de prolongation pour 99 ans supplémentaires.
De nombreux Israéliens d’un certain âge se souviennent d’avoir visité les espaces ouverts et les sites patrimoniaux, qui comprennent les bâtiments scolaires et l’atelier reconstruits du XIXe siècle, une ancienne synagogue, des caves à vin, un boulevard bordé de palmiers et le premier jardin botanique du pays.
Cependant, depuis 30 ans, un mur et une clôture en interdisent le libre accès. Un porte-parole de Mikvé Israël a déclaré que personne ne savait exactement quand la clôture avait été érigée, ni par quelle autorité, mais il a précisé que cela avait été fait conformément aux instructions du ministère de l’Éducation.
En tant qu’établissement scolaire, 85 % de son budget provient des deniers publics. Le site fait payer les visites de groupe réservées à l’avance pour le jardin botanique et les nombreux éléments du patrimoine.
Au fil des ans, avec la croissance démographique et le développement du centre d’Israël, Mikvé Israël s’est transformé en un îlot de verdure entouré de béton et de quartiers avec peu d’espaces verts.
Les habitants vivant à l’extérieur de la clôture tentent aujourd’hui de tirer parti du projet de Mikvé Israël de construire des installations supplémentaires sur le site pour rétablir une partie de l’accès public qui existait autrefois.
Ils affirment qu’en n’accueillant que 1 800 élèves, l’établissement ne s’adresse qu’à quelques privilégiés, une accusation qui, selon le village de jeunes, témoigne d’une mauvaise compréhension de l’objectif de Mikvé Israël.
L’un des précédents cités par les requérants est la lutte menée par les résidents de la ville de Beit Shean, dans le nord du pays, pour obtenir l’accès à une partie du ruisseau Amal, ou « Hassi », qui traverse le légendaire kibboutz Nir David clôturé. Cette bataille a abouti à l’ouverture au public d’une petite section du cours d’eau à l’ouest du kibboutz.
Soutien initial au droit d’accès public
Dans les plans qu’elle a soumis à l’objection publique en janvier de l’année dernière, la commission de planification de Tel Aviv, soutenue par la commission d’État pour la protection des terres agricoles et des espaces ouverts, a soutenu l’octroi d’un droit d’accès public au noyau historique du campus de Mikvé Israël et sa connexion au tissu métropolitain par l’ouverture de routes d’accès à l’est, à l’ouest, au nord et au sud.
Mikvé Israël, soutenu par le ministère de l’Éducation, KIAH et le Conseil pour la protection des sites patrimoniaux en Israël, a tenu bon, affirmant que l’ensemble du site était une institution pédagogique, que le grand public n’avait aucun droit légal d’y accéder, que la sécurité des étudiants serait menacée si des étrangers se promenaient dans les environs et qu’il n’y avait pas d’argent pour assurer la sécurité et l’entretien des zones ouvertes à tous.
Mais en février, la commission de planification a fait marche arrière. Elle a annoncé qu’elle envisageait des « instructions spéciales » plutôt qu’un droit d’accès public juridiquement contraignant. Elle a proposé d’aménager des voies publiques étroites par étapes sur une période de sept ans à compter de la date d’approbation du plan, la commission étant habilitée à approuver des reports supplémentaires. Ces voies ne seraient ouvertes que lorsque les écoles ne sont pas en activité, la décision concernant les heures d’ouverture étant laissée à Mikvé Israël.
Cette décision a incité les voisins de l’école, privés d’espaces verts, à prendre d’autres mesures.
Ce n’est pas un parc
D’une taille équivalente à celle de la ville centrale de Givatayim, le village des jeunes est situé de part et d’autre de la Route 44.
Quelque 1 800 élèves y étudient dans trois écoles publiques (de la 5e à la Terminale), deux internats et une ferme pédagogique. Les installations sont concentrées au sud de cet axe routier.
Les réseaux d’éducation Montessori et forestière gèrent également deux écoles maternelles et élémentaires privées sur le campus, et une centaine de familles vivent sur place, la plupart d’entre elles faisant partie du personnel de Mikvé Israël.
Le village agricole, qui prévoit désormais d’étendre son système d’enseignement axé sur l’agriculture à quelque 3 000 étudiants de tous âges, affirme que le site n’est pas un parc, mais un campus pédagogique doté d’une valeur patrimoniale importante.
Ce statut est ancré dans la Loi Mikvé Israël, adoptée en 1976. Cette loi stipule que l’école continuera à former les jeunes Israéliens à l’agriculture et à l’expansion de la présence juive et que toute utilisation du terrain ne pourra servir qu’à l’école.
La Haute Cour a interprété cette loi en 2005. Elle avait alors déclaré que l’objectif principal de la loi était de « préserver le terrain de l’école en tant que ‘poumon vert’ au cœur de la métropole de Tel Aviv », d’empêcher qu’il ne devienne partie intégrante d’une zone construite, de « préserver le zonage du terrain de l’école dans le but d’atteindre ses objectifs » et d’exiger que toute modification de cet objectif déclaré soit approuvée par plusieurs organes de l’État.
Les plans : Un accès public libre et surveillé
Les plans d’expansion initiaux, publiés par la commission de planification et de construction de Tel Aviv en janvier 2023, indiquaient que 9,5 hectares seraient disponibles pour de nouveaux bâtiments destinés aux salles de classe, à la recherche et aux activités agricoles.
Ce projet permettrait de dispenser un enseignement à un plus grand nombre d’étudiants et d’établir de nouveaux partenariats avec les autorités, les organismes de recherche et les universitaires des environs. Il permettrait également
« d’ouvrir Mikvé Israël au public en tant qu’élément du tissu de la zone métropolitaine existante du centre du pays ».
Pour ce faire, le plan propose « un accès libre et surveillé aux voies publiques » et « des zones définies pour l’accès de la population ». Les permis de construire pour certaines installations seraient conditionnés à la création d’un mécanisme garantissant que l’accès du public au centre du patrimoine, aux jardins botaniques et à d’autres sites soit supervisé.
Suite à la volte-face de la commission en février, une seconde période d’objections a été ouverte et ces objections ont été discutées le 24 juin.
Mikvé Israël : « On ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre »
Me Ori Sharon, avocat spécialiste de l’environnement, résidant à Holon et enseignant à l’Université de Bar Ilan, a déclaré que le complexe scolaire existant, ainsi que les terres agricoles et la zone prévue pour des constructions supplémentaires, s’étendaient sur 40 hectares et devaient être clôturés. Soulignant que Mikvé Israël reçoit la majeure partie de son financement de l’État, il soutient que le reste du site devrait être ouvert au public.
Si les élèves devaient sortir de cette zone, ils devraient prendre les mêmes précautions que ses propres enfants lorsqu’ils quittent l’école pour des activités extra-scolaires. Des quartiers entiers n’ont pas été clôturés pour protéger les enfants quittant l’école n’importe où ailleurs, a-t-il souligné.
En outre, Mikvé Israël ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre : Il ne pouvait pas prétendre que l’accès du public pouvait mettre en danger la sécurité des élèves tout en permettant à des étrangers d’entrer dans le complexe pour des événements commercialement rentables tels que des mariages, des promenades à cheval et des cours de conduite de tracteur, ou de venir pour des réunions dans les divers bureaux qui louent l’espace.
« Avec le développement de grande envergure qu’ils espèrent promouvoir […] le nombre d’étrangers qui continueront à entrer ne fera qu’augmenter. Qui sait si l’un d’entre eux est enregistré dans la base de données des délinquants sexuels ? Qui sait s’ils vont vraiment là où ils prétendent
aller ? Comment pouvons-nous laisser la situation en l’état, alors que des enfants se promènent apparemment librement dans une zone de la taille d’une ville, y compris au milieu de bosquets et de vergers où personne ne voit ce qui se passe, tandis que des étrangers y pénètrent sans entrave et sans surveillance en permanence ? »
Répondant à la crainte que le grand public visite les sites du patrimoine et laisse derrière lui un désordre, il a plaisanté : « Pourquoi ne pas clôturer aussi le mur Occidental ? »
Sharon a évoqué la nécessité d’une « justice distributive », c’est-à-dire d’une répartition équitable de l’espace qui permette d’équilibrer les intérêts de Mikvé Israël et ceux de la population.
Il a également insisté sur la nécessité de permettre l’accès des piétons et des cyclistes au parc Ariel Sharon, situé plus loin, et à un nouveau centre de transport prévu à la jonction de Holon.
Environ 500 habitants ont signé une pétition stipulant : « Les habitants des quartiers adjacents à Mikvé Israël n’ont pas un seul parc ou ‘poumon vert’ près de chez eux. Il n’est pas possible qu’un site aussi vaste ne serve à personne, à l’exception d’un petit groupe de lycéens qui effectuent chaque semaine une session de travaux agricoles pendant quelques heures. En pratique, tous ceux qui vivent à proximité de Mikvé Israël savent que le site est vide et silencieux pendant la majeure partie de la journée. »
Tout en reconnaissant la nécessité de clôturer les zones qui accueillent quotidiennement les élèves, les habitants veulent des voies de circulation plus larges, ouvertes 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, des portails supplémentaires permettant aux personnes vivant à proximité d’accéder au site, une piste périphérique autour de la propriété pour les coureurs et les cyclistes, ainsi que des sentiers supplémentaires à travers le site, plus éloignés des écoles. Ils veulent également avoir accès aux sites patrimoniaux promis dans le plan initial.
Un établissement d’enseignement, pas un parc
Sarit Goldstein, directrice-générale du village de jeunes, a déclaré au Times of Israel que Mikvé Israël était un campus pédagogique et une ferme, et non un parc, où les étudiants effectuaient 90 % des travaux agricoles.
Elle a déclaré qu’elle s’opposait à ce que le grand public puisse circuler à toute heure du jour et de la nuit parce que des élèves de l’internat se trouvaient sur le site, ajoutant qu’elle n’était pas disposée à clôturer les écoles puisque « c’est un village de jeunes qui permet aux étudiants de se rapprocher de la nature en toute liberté et en toute sécurité ».
Tous les parcs nationaux et les jardins botaniques font payer l’entrée, a-t-elle fait remarquer. Elle a également indiqué qu’elle était en contact régulier avec le département communautaire de la municipalité de Holon afin de trouver de nouveaux moyens d’attirer les habitants du pays sur le site.
L’entrée est gratuite à Yom HaAtsmaout – le Jour de l’Indépendance – et l’a également été lors de la dernière fête de Shavouot, a-t-elle précisé. Et avec le soutien de la ville, elle le sera plusieurs fois au cours de l’été.
Elle a ajouté que Mikvé Israël permettait à quelques dizaines d’habitants de se promener à pied ou à vélo sur le site après avoir prouvé qu’ils n’avaient pas d’antécédents criminels, promis de rester à l’écart de certaines zones et payé une redevance annuelle de 200 shekels.
« Il se peut que le site ait été plus accessible en d’autres temps », a poursuivi Goldstein, « mais les règlements du ministère de l’Éducation et les exigences en matière de sécurité pour les étudiants ont également changé ».
Expliquant que le site situé de l’autre côté de la Route 44 était actuellement interdit d’accès en raison de travaux d’infrastructure non liés à Mikvé Israël, Goldstein a assuré qu’elle serait heureuse de rencontrer les résidents – ce qui ne s’est pas produit jusqu’à présent.
« Il y a peut-être des idées auxquelles nous n’avons pas pensé », a-t-elle déclaré. « Mais l’accès doit être surveillé et nous ne nous transformerons pas en parc. »
Le ministère de l’Éducation a indiqué qu’il s’en remettait à Mikvé Israël pour tout commentaire.
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