Des scientifiques israéliens pensent savoir pourquoi le Covid-19 est inégal
Espérant ouvrir la voie à des traitements, l'équipe de l'institut Weizman a déterminé que des cellules censées lutter contre le virus dans les poumons aggravaient la maladie
Tout au long de l’épidémie de COVID-19, l’un des plus grands mystères à résoudre pour les chercheurs a été de comprendre pourquoi la maladie laisse certaines personnes quasiment indemnes, alors que d’autres souffrent de graves affections et en meurent.
La réponse, selon les scientifiques israéliens, est que les poumons des patients les plus touchés se remplissent de cellules immunitaires qui exacerbent l’impact de l’agent pathogène au lieu de le combattre. Chez les patients qui sont moins touchés par la maladie, cela ne se produit pas, estime l’équipe de l’Institut des sciences Weizmann.
« Dans la plupart des cas, le système immunitaire aide au rétablissement », a déclaré Amir Giladi du département d’immunologie de l’Institut Weizmann. « Mais pour une raison quelconque, et c’est cela le vrai mystère du coronavirus, cela s’inverse, et le système immunitaire n’est pas votre allié mais intensifie la maladie. »
Giladi est membre d’une équipe de Weizmann qui s’est attelée à identifier le moment où les choses commencent à se dégrader pour les patients les plus touchés, en espérant que les entreprises pharmaceutiques pourront utiliser leurs recherches pour développer des thérapies permettant d’arrêter le virus.
L’industrie pharmaceutique s’efforce actuellement de déterminer la meilleure façon de contrer l’impact de COVID-19, mais Giladi a bon espoir que ses recherches feront avancer les choses en « fournissant une ‘cible’ dans le corps pour l’intervention ».

L’équipe a travaillé avec Zheng Zhang du Shenzhen Third People’s Hospital en Chine, qui a fourni des données et a conclu que les poumons des patients les plus touchés ont été débarrassés des cellules immunitaires normales et utiles et colonisés par des cellules immunitaires qui, au contraire, causent des dommages. Les résultats ont été examinés par des pairs et publiés dans la revue Cell.

« Les poumons, comme de nombreux autres organes qui se trouvent à la frontière entre le corps et l’environnement extérieur, ont généralement ce que nous appelons un système immunitaire à résidence tissulaire », a déclaré Giladi au Times of Israël. Il s’agit de cellules qui « patrouillent » dans les alvéoles, accomplissant des tâches telles que l’élimination du mucus et la lutte contre les agents pathogènes présents dans l’air.
« Chez les individus en bonne santé, elles se trouvent à l’intérieur des poumons. Dans les cas de coronavirus modérés, la situation est normale, mais dans les cas graves, ces cellules disparaissent. »
Elles sont remplacées, dit-il, par des cellules qui migrent du sang et arrivent en grand nombre dans les poumons. « Ce sont des cellules immunitaires, c’est-à-dire des cellules qui sont normalement censées aider l’organisme et créer une immunité, mais dans ce cas, elles nuisent aux poumons, provoquent une inflammation et sont, dans certains cas, infectées par le virus. »
L’équipe de Giladi, dirigée par le professeur Ido Amit, pense que l’infiltration de ces cellules nocives est le déclencheur de la « tempête » du système immunitaire qui, selon une opinion répandue, se produit dans l’organisme des patients atteints de formes graves de coronavirus.
Les cytokines sont des molécules qui sont utilisées par les cellules immunitaires du corps pour communiquer – une sorte de système de messagerie. Il a été largement observé que le nombre de cytokines monte en flèche chez les patients gravement atteints par le COVID-19.
« Quand cela se produit, c’est comme si tous les systèmes d’alarme de votre corps devenaient fous en même temps, et cela peut causer des dommages aux poumons, des dommages systémiques et d’autres problèmes », a déclaré Gilad. « En bref, cela peut provoquer la folie du système immunitaire. »
Cette « tempête de cytokines » est bien documentée, mais il y a peu de suggestions sur la façon de la prévenir. Giladi a déclaré que si son équipe a raison, et qu’il s’agit d’un « effet domino » dû à l’infiltration de cellules immunitaires nocives dans les poumons, cela permettra aux médecins de mieux surveiller les patients à l’aide de tests sanguins. Plus important encore, a-t-il dit, cela peut fournir une base aux médecins et aux compagnies pharmaceutiques pour développer des médicaments qui empêchent les cellules immunitaires nocives de s’infiltrer.
« Nous considérons notre recherche comme faisant partie d’un vaste effort international visant à mieux caractériser et comprendre le rôle du système immunitaire dans le COVID-19 », a-t-il déclaré. « Nous espérons qu’elle conduira à la découverte d’un moyen de bloquer les cellules sur lesquelles nous avons fait des recherches, et de contrer leur effet. »