Divorce religieux : la Knesset adopte un projet de loi pour les non israéliens
La législation permettrait aux tribunaux rabbiniques de sanctionner les hommes juifs non israéliens qui refusent d'accorder le divorce à leurs épouses
La Knesset a adopté lundi, en première lecture, un projet de loi qui permettrait aux tribunaux rabbiniques israéliens de sanctionner les hommes juifs non israéliens qui refusent d’accorder le divorce à leurs épouses – tant que la partie poursuivie est présente en Israël.
Aujourd’hui, les tribunaux locaux ne peuvent pas venir en aide aux femmes qui ne sont ni citoyennes ni résidentes du pays.
Le projet de loi bénéficie d’un large soutien dans toute la sphère politique, depuis la députée Aliza Lavie du parti centriste et laïc Yesh Atid, qui milite en faveur d’une version du projet de loi depuis 2013, jusqu’à David Azoulay, ministre des Services religieux du parti ultra-orthodoxe Shas.
Toutefois, l’opposition a voté lundi contre le projet de loi, en raison d’un désaccord sur une disposition concernant les couples israéliens mariés en union civile. Lavie a dit qu’elle travaillerait à modifier le projet de loi avant sa deuxième et sa troisième lectures.
Le projet de loi vise à régler le problème des femmes juives « agunot » qui se voient refuser le divorce religieux par leur mari. La loi juive traditionnelle permet aux hommes d’épouser une seconde femme dans certaines circonstances, mais pas aux femmes, qui sont « enchaînées » à leur mari.
« Nous avons un vrai problème avec l’ex-Union soviétique », a expliqué Lavie au Times of Israel en octobre, dans lequel des hommes riches se marient et ne veulent pas divorcer de leur femme pour des raisons financières.
« Nous essayons de faire adopter cette loi depuis quatre ans », a-t-elle dit. « Il n’y a pas d’opposition des Haredim à la Knesset, mais « le ministère des Affaires étrangères s’y oppose. »
Selon Lavie, les responsables se sont dits préoccupés par le fait qu’une extension israélienne du pouvoir des tribunaux rabbiniques de procéder à des divorces religieux entre non-Israéliens pourrait entraîner des contre-mesures de la part d’autres pays qui placeraient les touristes israéliens en séjour sous le contrôle de leurs propres tribunaux aux affaires familiales.
Le projet de loi étendrait l’autorité des tribunaux rabbiniques israéliens pour « diriger une action en divorce entre deux juifs mariés conformément à la loi juive s’il y a une réelle inquiétude quant au fait qu’il n’est pas possible de rompre le mariage en vertu de la loi juive dans leur dernier lieu de résidence en dehors d’Israël », selon une version préliminaire du projet de loi.
En plus de la présence physique du mari en Israël, le projet de loi exigerait que la femme qui demande la dissolution du mariage ait déjà tenté d’obtenir le divorce, civil et juif, dans son pays d’origine.
Si toutes ces conditions sont réunies et que le tribunal israélien admet la nécessité d’un divorce, il peut alors demander au mari de donner à l’épouse le document de divorce requis [guet].
S’il refuse, le projet de loi permettrait au tribunal rabbinique d’imposer à l’époux des sanctions qu’il est déjà habilité à infliger aux citoyens israéliens, y compris des amendes, des avoirs gelés et, dans de rares cas, même des peines d’emprisonnement de courte durée.
Lundi, Lavie a qualifié l’adoption du projet de loi en première lecture comme une « étape importante » pour l’ensemble du peuple juif.
Le projet de loi a été critiqué par certains comme étant une extension des pouvoirs des institutions rabbiniques d’Israël.
Le « Center for Women’s Justice », un groupe de revendication qui s’occupe de la religion et des questions d’État, a déclaré qu’il s’oppose « à l’élargissement de la juridiction du tribunal rabbinique de quelque manière que ce soit, que ce soit en Israël et certainement en dehors d’Israël ». Un État juif doit se dissocier des expressions halakhiques/religieuses qui nient la dignité, l’égalité et la liberté de ses citoyens, et non les renforcer ou les aggraver. »
Lavie, une militante de longue date en faveur de la réforme des institutions religieuses de l’État, a reconnu le problème, mais a déclaré que le projet de loi faisait de son mieux dans une situation imparfaite.
« Le mariage religieux ici en Israël n’a pas d’alternative [civile]. Et nous devons trouver des solutions », a-t-elle dit. « Israël peut donner une réponse aux agunot là où personne d’autre ne le peut. Cela relève de notre responsabilité. »