Israël en guerre - Jour 364

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En Israël, le poids de l’effort de guerre pour les familles de réservistes

Un tiers des conjoints disent avoir pâti professionnellement du 7 octobre, 6 % des réservistes et conjoints avoir été licenciés, 19 % s'être vu imposer des jours sans solde

Daniela Garin s'adressant à des visiteurs alors qu'elle pleure son mari Cedrick, à Tel Aviv, le 29 janvier 2024. (Crédit : Maya Zanger-Nadis/Times of Israel)
Daniela Garin s'adressant à des visiteurs alors qu'elle pleure son mari Cedrick, à Tel Aviv, le 29 janvier 2024. (Crédit : Maya Zanger-Nadis/Times of Israel)

Le lendemain de l’assaut sadique du Hamas sur le sud d’Israël le 7 octobre, son mari a été mobilisé en tant que réserviste de l’armée israélienne dans la guerre menée contre le groupe terroriste palestinien. « Il y a eu un vide, comme si tout reposait sur moi », raconte Sagit Bachner. Elle a « dû être la mère, le père, le soignant, tout ».

Après l’assaut du Hamas dans le sud d’Israël, qui a déclenché la guerre à Gaza, le gouvernement a « vu les familles des otages », il a « vu les habitants du sud et du nord » évacués du fait des affrontements avec le groupe terroriste palestinien à Gaza et le groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah, raconte cette auto-entrepreneuse de 37 ans née à Buenos Aires.

Mais il n’a « pas fait attention à nous, les familles de mobilisés », déplore-t-elle.

Si les dons de particuliers ont afflué au début vers les réservistes, pilier de Tsahal aux côtés des appelés et des soldats d’active, les semaines ont passé et Bachner a géré seule son foyer du kibboutz Givat Brenner, à une vingtaine de kilomètres au sud de Tel Aviv, ses trois fils, l’inquiétude et les finances en berne.

Des réservistes gardant un tunnel du Hamas qui a été découvert à Salatin, près de Jabaliya, dans le nord de Gaza, le 7 décembre 2023. (Crédit : Emanuel Fabian/Times of Israel)

Il lui a fallu mettre en pause son entreprise de jeux de société pour s’occuper de ses jeunes enfants, apaiser notamment la colère de son fils de 7 ans contre la guerre qui l’a privé de son père quatre mois durant. L’enfant a finalement compris. Preuve en est ce dessin sur le réfrigérateur représentant sa famille nucléaire : « Papa [au front] ne s’occupe pas juste de nous, mais de tout le monde. »

La guerre a éclaté lorsque quelque 3 000 terroristes dirigés par le Hamas ont pris d’assaut le sud d’Israël le 7 octobre, tuant près de 1 200 personnes, principalement des civils, tout en prenant 251 otages de tous âges, en commettant de nombreuses atrocités et en utilisant la violence sexuelle comme arme à grande échelle.

Il resterait 120 otages qui avaient été capturés par le Hamas, le 7 octobre, à Gaza, dont 41 sont mortes selon l’armée.

« Rustine »

L’opération militaire israélienne lancée en représailles contre la bande de Gaza aurait coûté la vie à plus de 36 500 Palestiniens, majoritairement des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas. Les chiffres publiés par le groupe terroriste sont invérifiables, et ils incluraient ses propres terroristes, tués en Israël et à Gaza, et les civils tués par les centaines de roquettes tirées par les groupes terroristes qui retombent à l’intérieur de la bande de Gaza.

L’ONU indique que quelque 24 000 victimes ont été identifiées dans les hôpitaux à ce jour. Le reste du chiffre total est basé sur des « informations médiatiques » plus obscures du Hamas.

Israël dit avoir tué 15 000 terroristes au combat. Tsahal affirme également avoir tué un millier de terroristes à l’intérieur du pays le 7 octobre.

Selon l’armée, 295 de ses soldats ont été tués au cours de l’opération terrestre contre le Hamas et lors des opérations menées le long de la frontière de Gaza depuis le 27 octobre.

Des terroristes armés palestiniens à côté de véhicules de l’ONU dans un centre logistique de l’UNRWA à Rafah, ville la plus au sud de Gaza, sur une capture d’écran de drone publiées le 14 mai 2024. (Crédit : Armée israélienne)

Les Israéliens ayant fait leur service militaire, soit une grande partie de la population adulte juive, sont obligatoirement réservistes jusqu’à l’âge de 40 ans. Avec la guerre, la limite d’âge a été portée temporairement à 41 ans.

L’union nationale est de mise mais « j’ai eu l’impression que tout repose sur mes épaules », témoigne Bachner.

En décembre, elle rejoint le Forum des épouses de réservistes qui s’est créé comme un lieu d’entraide sur des questions de droit du travail et de pression sur l’État afin d’obtenir plus de soutien.

Shvut Raanan, avocate de 31 ans, en est également membre. Elle décrit à l’AFP l’impact de la mobilisation sur « l’état mental » des quelque « 100 000 familles » de réservistes mobilisés, sur les conjoints et leur capacité à travailler, et sur les enfants qui pour certains ont « recommencé à mouiller leur lit », « inquiets pour leur père ».

Selon un sondage diffusé fin mai par ce forum, près d’un tiers des conjoints interrogés disent avoir pâti professionnellement depuis le début de la guerre, et, parmi les réservistes et conjoints interrogés, 6 % disent avoir été licenciés, 19 % s’être vu imposer des jours sans solde.

En janvier, une enveloppe équivalent à 2,27 milliards d’euros a été débloquée pour les réservistes. « Une rustine », selon Bachner étant donné leur « combat si intense et si long ».

« Rester fortes »

En février, une convention a été signée entre l’organisation syndicale de la Histadrout et une organisation patronale, qui prolonge la période de protection des réservistes contre le licenciement.

Fin mai, la Knesset a adopté une loi visant à empêcher le licenciement ou la dégradation des conditions de travail des conjoints de réservistes pendant la période de mobilisation.

Des manifestants réclament la libération des otages détenus à Gaza et des élections, au lendemain du début d’une manifestation de quatre jours près de la Knesset, à Jérusalem, le 1er avril 2024. (Crédit : Leo Correa/AP)

Mais reste la charge psychologique pour les conjoints de réservistes mobilisés dont l’armée, sollicitée, n’a pas souhaité divulguer le nombre actuel.

« Nous devons rester fortes pour nos enfants » et « prendre soin de nos maris qui reviennent de longs mois sur le champ de bataille, différents, traumatisés par ce qu’ils ont vu » et qui déjà « sont de nouveau rappelés », dit Avital Horev.

Pour cette chargée de communication qui a mis en suspens sa recherche d’emploi, la situation « interroge notre capacité à continuer » d’autant plus « qu’il n’y a pas d’horizon ».

La résurgence de combats de rue début mai dans des zones censées avoir été reprises par Israël dans la bande de Gaza, et la guerre larvée avec le groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah à la frontière nord laissent présager une longue mobilisation.

« Les familles de réservistes jouent un rôle considérable », voire « peut-être l’élément le plus important de la résilience » de l’armée et « sa capacité à continuer à combattre dans le temps », notait en janvier Ariel Heimann, chercheur à l’Institut pour les études de sécurité nationale (INSS) à Tel Aviv.

Et il « ne serait pas raisonnable de supposer que les réservistes seront à la disposition de [l’armée] indéfiniment et à pleine puissance ».

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