Ex-rédacteur en chef de Walla : Nos journalistes appelaient Netanyahu, Kim Jong Un
Avi Alkalay, selon qui "le média ne servait qu'une famille", décrit une "coercition mentale très agressive" qui avait orienté la couverture en faveur du Premier ministre en 2015-2016

L’ancien rédacteur en chef du site d’information Walla a témoigné mardi dans le procès pour corruption du Premier ministre Benjamin Netanyahu, décrivant des pressions incessantes et agressives sur la rédaction du média pour orienter leur couverture en faveur du Premier ministre en 2015-2016 et affirmant que les membres du personnel appelaient régulièrement le Premier ministre « Kim », en référence au dictateur nord-coréen Kim Jong Un.
Avi Alkalay a déclaré que la rédaction du site d’information avait subi « une coercition mentale très agressive concernant le contenu relatif à la famille Netanyahu ».
« La pression était constante et l’intervention se faisait dans tous les domaines », a témoigné Alkalay.
Alkalay est un témoin dans l’Affaire 4 000, aussi connue sous le nom d’affaire Bezeq-Walla, dans laquelle Netanyahu est accusé d’avoir bénéficié de manière illicite et lucrative des intérêts commerciaux de l’actionnaire majoritaire de Bezeq, Shaul Elovitch, en échange d’une couverture positive sur le site Walla, propriété d’Elovitch. Il est accusé d’avoir abusé de ses pouvoirs lorsqu’il était à la fois Premier ministre et ministre des Communications de 2014 à 2017.
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L’audience au tribunal de Jérusalem s’est déroulée alors que l’attention nationale se portait sur une audience majeure de la Haute cour de justice concernant la loi du « caractère raisonnable » du gouvernement, qui pourrait donner lieu à une crise constitutionnelle potentielle.
Alkalay a déclaré que les interventions au nom du propriétaire de Walla, Elovitch, visaient à dépeindre les Netanyahu comme étant « toujours bons et dans le droit chemin, à la fois sur les questions politiques et sur les questions personnelles ».
« On leur demandait souvent de contredire ou de modifier une opinion exprimée par un journaliste ou la signification (…) d’un article », a poursuivi Alkalay.

Alkalay a déclaré qu’en tant que rédacteur en chef, il avait « choisi une tactique inappropriée et négocié sur des sujets d’actualité ». Il a donné l’exemple d’un cas où il avait retiré le mot « échec » d’un titre concernant Netanyahu. « Aucune considération professionnelle ne justifiait cette décision. Si j’enlève un mot pour protéger l’honneur du Premier ministre, je ne rends pas service à la profession. »
L’ancien rédacteur en chef a déclaré que tous les journalistes avaient compris à l’époque qu’ils ne pouvaient pas parler librement des Netanyahu et qu’Alkalay devait parfois modifier leur texte, ou au moins le titre et le sous-titre, pour permettre à l’article de rester en ligne.
« Walla n’était pas un média mais le serviteur d’une seule famille », a allégué Alkalay, ajoutant que le personnel avait développé tout un jargon pour désigner le site comme un « magasin de shish kebab » qui devait « distribuer la viande exactement comme on le lui demandait ».
Le personnel utilisait le mot de code « persil » pour désigner Sara Netanyahu, tandis que « moins de paprika signifiait être moins sarcastique et moins tranchant », a-t-il déclaré. « Et le surnom de Netanyahu était ‘Kim’, en référence au dirigeant nord-coréen qui contrôle les médias. »

Netanyahu est également jugé pour fraude et pour abus de confiance dans l’Affaire 1000, où le Premier ministre et sa famille sont accusés d’avoir reçu des cadeaux de luxe de la part de riches bienfaiteurs. Par ailleurs, dans l’Affaire 2 000, le Premier ministre est accusé de fraude et d’abus de confiance pour avoir prétendument tenté de conclure un accord avec l’éditeur du journal Yedioth Ahronoth afin que Netanyahu bénéficie d’une couverture médiatique plus positive en échange d’une législation qui aurait limité le distribution d’un quotidien rival, Israel Hayom.
Netanyahu nie tout acte répréhensible dans les affaires portées contre lui et affirme que les accusations ont été fabriquées de toutes pièces dans le cadre d’une chasse aux sorcières menée par la police et le ministère public.
Les procès de Netanyahu ont commencé il y a trois ans et, en l’état actuel, les procédures, appels compris, auraient peu de chances de se conclure avant 2028-2029. Fin juin, il avait été rapporté que les juges considéraient que l’accusation de corruption portée contre le Premier ministre serait difficile à prouver et qu’ils s’étaient réunis avec les procureurs de l’État et l’équipe de défense de Netanyahu pour discuter de la possibilité d’une négociation de peine.