Femmes en Afghanistan: militants et diplomates exhortent à ne pas légitimer les talibans
Actuellement, les Afghanes ne peuvent plus étudier au-delà du primaire - 1,5 million sont déjà privées d’enseignement secondaire selon l'Unesco

Face à la situation désastreuse des femmes en Afghanistan, militants et diplomates ont appelé la communauté internationale à ne « pas légitimer » le pouvoir des talibans, qui dirigent le pays depuis 2021, lors d’une conférence vendredi à l’Unesco.
Depuis trois ans et demi, les femmes ont progressivement été chassées de l’espace public, poussant l’ONU à dénoncer un « apartheid de genre ».
« L’Afghanistan est le seul pays au monde où les femmes et les filles sont systématiquement effacées de la vie publique (…) et malgré cela tout le monde continue à traiter les talibans comme une autorité reconnue », a dénoncé la championne de taekwondo Marzieh Hamidi, qui vit en exil en France. « Aucun pays, aucune organisation ne devrait légitimer un pays qui applique un apartheid de genre », a-t-elle déclaré lors d’une conférence organisée par l’Unesco à la veille de la journée internationale des droits de la femme.
« Je vous appelle à ne jamais reconnaître le régime taliban. Bien sûr, le dialogue peut être nécessaire, mais la légitimité ne doit jamais (leur) être accordée. La reconnaissance ne ferait que consolider leur cruauté et prolonger la souffrance des femmes et des filles afghanes », a également plaidé l’ambassadeur de l’Afghanistan auprès de l’Unesco Mohammad Homayoon Azizi.
Actuellement, les Afghanes ne peuvent plus étudier au-delà du primaire – 1,5 million sont déjà privées d’enseignement secondaire selon l’Unesco, et jusqu’à quatre millions pourraient être concernées d’ici 2023.
Elles ne peuvent pas non plus travailler dans de nombreux secteurs, aller dans les parcs, les salles de sports, les salons de beauté, ni quasiment sortir de chez elles sans chaperon.
Une récente loi leur interdit de chanter ou de déclamer de la poésie, en vertu, comme les autres directives, d’une application ultra-rigoriste de la loi islamique. Elle les incite aussi à « voiler » leur voix et leurs corps hors de chez elles.
Plusieurs figures de la défense des droits des femmes ont également appelé à soutenir toutes les alternatives possibles pour leur permettre d’accéder à l’enseignement malgré les interdits, qu’il s’agisse d’écoles clandestines, de cours en ligne, à la radio ou la télé, ou encore d’octroi de bourses pour étudier à l’étranger.
« Les talibans ne rouvriront jamais les écoles, ils ne reviendront jamais sur cette mesure », a prévenu Parasto Hakim, fondatrice de SRAK, un réseau d’écoles secrètes qui permet d’atteindre près de 2.000 jeunes filles à travers le pays.
« Alors que le nombre de suicides des femmes augmente de manière dramatique à travers le pays, il est absolument crucial de redonner de l’espoir aux femmes afghanes », a insisté Hamida Aman, fondatrice de Radio Begum, célèbre station pour femmes dont la diffusion a été suspendue début février.
Le gouvernement taliban n’a officiellement été reconnu par aucun pays. Toutefois, le Pakistan, la Chine, la Russie, l’Iran ou les Républiques d’Asie centrale entretiennent des relations diplomatiques de fait avec le régime afghan.