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Interview

J.O : Rencontre avec la judoka qui a ramené la médaille de Bronze à Israël

Timna Nelson-Levy, née à Jérusalem de parents américains, dit avoir eu le sentiment de représenter aussi les États-Unis quand elle a remporté la précieuse médaille avec son équipe

L'Israélienne Timna Nelson Levy après sa  victoire décisive lors d'un combat contre la Russie pendant les Jeux olympiques de Tokyo 2020, une victoire grâce à laquelle elle rapporte une médaille de Bronze à son équipe dans l'épreuve mixte de judo, le 31 juillet 2021. (Crédit : Franck Fife/AFP)
L'Israélienne Timna Nelson Levy après sa victoire décisive lors d'un combat contre la Russie pendant les Jeux olympiques de Tokyo 2020, une victoire grâce à laquelle elle rapporte une médaille de Bronze à son équipe dans l'épreuve mixte de judo, le 31 juillet 2021. (Crédit : Franck Fife/AFP)

Quand Timna Nelson-Levy s’est retrouvée face à sa rivale, la judoka Daria Mezhetskaia, lors de l’épreuve qui devait déterminer le gagnant de la médaille de Bronze aux Jeux olympiques de Tokyo, elle dit avoir ressenti une pression énorme s’abattre sur ses épaules.

Les membres de la délégation israélienne de judo – ils étaient pourtant considérés comme des prétendants plausibles à des médailles olympiques – s’étaient inclinés, les uns après les autres, face à leurs adversaires pendant toute la semaine. Mais l’épreuve mixte – une première à Tokyo – a apporté une chance de rédemption à l’équipe de l’État juif.

Nelson-Levy, 27 ans, était la cinquième à devoir affronter sur le tatami une judoka du Comité olympique russe, avec trois victoires israéliennes déjà acquises dans le cadre d’un total de six combats. C’est elle qui a donc endossé la responsabilité d’arracher une médaille au nom de toute l’équipe.

« J’ai participé au combat décisif », confie Nelson-Levy au Times of Israel lors d’une récente interview au téléphone. « Quand j’ai monté les escaliers pour aller sur le tapis, j’ai ressenti une forte pression. Je savais qu’on pouvait écrire une nouvelle page de l’Histoire ».

Et au moment où elle a vaincu sa rivale, décrochant une médaille pour tous les membres de la délégation israélienne de judo, « j’ai été submergée par la joie, je n’arrivais plus à contrôler mes sentiments – je sautais partout », s’amuse-t-elle. « Je regardais mes coéquipiers et mes entraîneurs. Je me sentais tellement heureuse de donner cette médaille à mon équipe et à mes entraîneurs parce qu’ils avaient tous travaillé si dur, et qu’ils le méritaient tous ».

A la fin de la journée, les onze judokas portaient avec fierté une médaille de Bronze autour du cou lorsqu’ils étaient montés sur le podium, à Tokyo.

Les membres de l’équipe d’Israël posent avec leurs médailles de bronze après la cérémonie de remise des médailles de la compétition de judo par équipe aux Jeux olympiques d’été de 2020, samedi 31 juillet 2021, à Tokyo, au Japon. (AP Photo/Vincent Thian)

« C’était le plus grand tatami du monde et nous avons rapporté une médaille », s’exclame Nelson-Levy. Et si elle a gagné plus d’une dizaine de médailles dans des tournois internationaux, rien, affirme-t-elle, n’est comparable à l’ivresse olympique.

« Parce que c’est l’événement le plus important du monde, c’est la compétition dont chaque athlète rêve de pouvoir revenir avec une médaille », ajoute-t-elle. « Et pourtant, pas grand monde aura ce privilège. C’est vraiment la raison pour laquelle gagner une médaille au J.O est un sentiment aussi particulier ».

Une Sabra américaine

Nelson-Levy est née à Jérusalem de parents américains qui se sont installés au sein de l’État juif peu après leur mariage. Toute sa famille élargie – notamment deux de ses six frères et sœurs – vivent aux États-Unis.

« On entretient des contacts vraiment proches avec ma famille américaine et vous savez, d’une certains manière, j’ai l’impression d’avoir aussi représenté l’Amérique et mes cousins de là-bas » aux Jeux olympiques, dit-elle.

Elle a grandi à Jérusalem, avec des parents anglophones. « Je n’ai pas eu le sentiment d’être une étrangère ou quoi que ce soit d’autre – mes parents m’ont enseigné l’amour d’Israël, le sionisme, et je pense qu’ils ont fait un travail formidable avec chacun d’entre nous ».

Sa mère, Laura, qui est guide touristique, a donné à sa fille le nom du parc Timna, situé aux abords d’Eilat, qu’elle avait visité quand elle était enceinte d’elle.

Nelson-Levy a grandi un pied dans deux mondes, explique-t-elle – pleinement intégrée au sein de la société israélienne mais encore liée à la communauté d’immigrants américains de ses parents, qui sont membres de Kol Haneshama, un synagogue fréquentée par de nombreux Américains issus du mouvement réformé à Jérusalem.

« La majorité des amis de mes parents sont des olim américains et, dans le passé, on célébrait les fêtes et le Shabbat avec eux », note-t-elle.

La judoka précise qu’elle ne va pas souvent aux États-Unis. Elle ne pouvait pas s’y rendre fréquemment même avant l’arrivée de la pandémie – trop occupée par le judo, les stages d’entraînement et les compétitions internationales. Alors que quelques semaines se sont écoulées depuis la fin des J.O., elle confie être aujourd’hui sur le point de s’envoler vers l’Amérique pour rendre visite à ses frères et sœurs et aux autres membres de sa famille qui vivent là-bas – « je suis tellement impatiente », s’exclame-t-elle.

La médaillée olympique israélienne Timna Nelson-Levy est fêtée par sa famille à l’aéroport international Ben-Gurion, le 2 août 2021. (Crédit : Avshalom Sassoni/FLASH90)

Le parcours de toute une vie

Nelson-Levy a commencé les arts martiaux quand elle n’avait que six ans, s’essayant au jujitsu et aux arts martiaux mixtes avant d’opter pour la pratique du judo à l’âge de 13 ans. Elle confie que très jeune, elle rêvait de pouvoir un jour participer aux Jeux olympiques.

« Même avant de commencer le judo, je savais que c’était quelque chose qui me tenait à cœur – je voulais gagner une médaille aux Jeux olympiques », dit-elle. « C’était un objectif que je m’étais fixé, d’aussi loin que je m’en souvienne ».

Et arriver à Tokyo, le mois dernier, pour ses premiers Jeux a été l’apogée de presque deux décennies de rêves. Toutefois, elle précise que l’important n’a jamais été pour elle de seulement participer.

« Mon but, ce n’était pas d’aller aux Jeux olympiques pour pouvoir me dire que j’avais pris part aux J.O », déclare-t-elle. « Mon but, c’était vraiment de revenir avec une médaille ».

Mais après s’être inclinée face à sa rivale en quarts de finale, Nelson-Levy a été sortie lors du repêchage dans la catégorie féminine des moins de 57 kilos, finissant septième au classement. Un sort qui a été également réservé à tous les membres de l’équipe malgré leurs fortes espérances.

Mais dans l’épreuve mixte qui s’est déroulée quelques jours plus tard, la délégation a trouvé une chance de rédemption.

« On s’était tous dit que si on était déçus de nos performances dans les compétitions individuelles, on avait encore une chance d’être médaillés olympiques », indique Nelson-Levy. « On s’était dit qu’on était une équipe forte, qu’on était bons – on s’était tous dit que c’était possible ».

Si Nelson-Levy a perdu son premier combat contre l’Italie, c’est l’équipe israélienne qui a finalement eu le dessus sur les Italiens, à 4-3. Elle a ensuite gagné son combat suivant contre une judoka française mais l’État juif s’est finalement incliné 4-3 contre le pays, ce qui a renvoyé l’équipe israélienne dans une épreuve de repêchage contre le Brésil. Nelson-Levy a une nouvelle fois remporté la victoire et Israël a battu le Brésil, 4 à 2, gagnant sa qualification pour l’épreuve déterminant le gagnant de la médaille de Bronze contre le Comité olympique russe.

Après quatre combats, c’est l’État juif qui dominait la Russie, 3 – 1, quand Nelson-Levy a fait son apparition sur le tatami. Trois minutes et 22 secondes plus tard, elle l’emportait sur sa rivale après avoir marqué un ippon.

L’Israélienne Timna Nelson Levy fête sa victoire décisive lors d’un combat contre la Russie pendant les Jeux olympiques de Tokyo 2020, une victoire grâce à laquelle elle rapporte une médaille de Bronze à son équipe dans l’épreuve mixte de judo, le 31 juillet 2021. (Crédit : Franck Fife/AFP)

« A chaque fois, on allait de plus en plus loin, on se disait que la médaille pouvait être pour nous, qu’on pouvait le faire », se souvient-elle. « Je pense que parce qu’on était très bas dans le classement, qu’on avait tous perdu dans les autres épreuves, on avait une force toute particulière et qu’on s’est avant tout prouvé que c’était possible. Résultat, on est revenus avec une médaille olympique ».

L’équipe a laissé exploser sa joie après avoir gagné ses médailles, et des félicitations du monde entier ont commencé à affluer.

« Je ne pouvais même plus ouvrir mon téléphone. J’avais des centaines de messages, si ce n’est des milliers », raconte Nelson-Levy. « Les gens étaient vraiment heureux pour moi, ils me soutenaient vraiment… Et tout ce soutien, tout cet amour, tous ces messages envoyés – ça a été très important pour moi ».

La politique sur le tatami

Si les autorités olympiques ont fait de leur mieux pour faire des Jeux un événement apolitique, les tensions géopolitiques se font toutefois ressentir lors des compétitions internationales – et en particulier quand Israël est impliqué. Deux judokas – l’algérien Fethi Nourine et le marocain Mohamed Abdalrasool – ont préféré renoncer aux épreuves plutôt que de devoir affronter l’athlète israélien Tohar Butbul à Tokyo.

Nelson-Levy déplore ce phénomène.

« Ce n’est pas la première fois que des athlètes de différents pays ne nous affrontent pas – c’est malheureux mais c’est la situation actuelle et c’est une réalité », explique-t-elle. « Mon avis, c’est que nous devons absolument ne pas mêler politique et sport, garder la politique hors du sport. Point final ».

Elle reconnaît que parfois, les athlètes eux-mêmes subissent des pressions de la part des gouvernements ou autres, les obligeant à renoncer aux matchs même s’ils souhaitaient a priori concourir.

« Parfois, ça ne vient pas des athlètes eux-mêmes mais de plus haut », dit-elle, notant que « peut-être les athlètes, eux, auraient voulu participer à l’épreuve ».

Le judoka israélien Sagi Muki, champion du monde, à droite, et le champion iranien Saeid Mollaei Grand Chelem de Paris, le 10 février 2020. (Capture d’écran Instagram)

Elle ajoute entretenir une relation amicale avec Saied Mollaei, le judoka iranien qui avait fait la Une des médias dans le monde entier lorsqu’il avait refusé l’ordre donné par l’Iran de renoncer à un combat contre l’Israélien Sagi Muki. Mollaei avait finalement fui l’Iran, obtenu la nationalité mongole et il s’était lié d’une improbable amitié avec Muki. Les deux jeunes gens se sont retrouvés à Tokyo, le mois dernier.

« C’est un athlète exceptionnel et c’est une personnalité encore plus hors du commun », commente-t-elle. « Quand je le vois, on se dit toujours bonjour et on discute. Il m’envoie des félicitations quand je gagne et des messages pour me souhaiter bonne chance ». Nelson-Levy estime que Mollaei s’est conduit de manière « héroïque – et je l’admire vraiment, et j’admire aussi ce qu’il a fait ».

Avec une médaille olympique au cou – et plus d’une dizaine d’autres dans sa collection — Nelson-Levy anticipe déjà ses objectifs futurs. Elle se remettra à l’entraînement dès qu’elle reviendra de ses vacances aux États-Unis.

Et si la judoka veut continuer à combattre sur les tatamis du monde entier – y compris à l’occasion des Jeux olympiques de Paris, en 2024 – elle reconnaît qu’elle rencontre des difficultés financières pour ce faire.

Si l’autre médaillée de Bronze de Tokyo, Avishag Semberg, recevra 250 000 shekels de la part du Comité olympique israélien pour son résultat obtenu en taekwendo, chaque membre de la délégation israélienne de judo ne recevra que 50 000 shekels. Et si d’autres athlètes olympiques israéliens ont des sponsors généreux, d’autres n’en ont que peu – voire pas du tout – et ne vivent que grâce à une modeste allocation.

Évoquant de futurs parrainages, elle note que « cela faciliterait vraiment les choses jusqu’à Paris ».

Mais quoi qu’il en soit, 2024 est un rendez-vous immanquable aux yeux de Nelson-Levy.

« Oui, je veux aller à Paris », dit-elle, « mais il y aura beaucoup d’obstacles à franchir d’ici là ».

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