« Jazzukkah » veut créer une nouvelle bande-son juive pour les fêtes de fin d’année
Le groupe, qui espère que son répertoire de Hanoukka sera une alternative à la musique de Noël pour le public juif, se produira à la synagogue de NY le 1ᵉ soir de la fête des Lumières
NEW YORK – Gil Shefler, un Israélo-Américain travaillant dans la high-tech, avait l’habitude d’organiser chez lui des fêtes de Hanoukka pour ses amis, avec des snacks, une hanoukkiya et des cadeaux. Mais il manquait toujours un élément : une bande-son festive.
« Chaque année, j’organisais une fête de Hanoukka et j’invitais mes amis. Il y avait des chansons pour enfants et d’autres très religieuses », a-t-il expliqué.
Il avait pour habitude de chercher des chansons sur Spotify et de composer un medley pour ses invités.
« Le fait de ne pas avoir de bande-son juive et de qualité que je puisse écouter pour les fêtes de fin d’année m’a un peu irrité. Chaque année, je me demandais comment cela n’avait pas déjà été fait. »
Shefler a contacté des amis musiciens qui partageaient son avis et le groupe a décidé de « faire quelque chose ». Il se décrit comme un « aficionado de la musique », mais pas comme un musicien de formation.
Le résultat ? Le Jazzukkah Project, un ensemble de jazz qui propose un canon de chansons de Hanoukka dont les membres espèrent qu’il servira de bande-son pour les fêtes de fin d’année des Juifs. Shefler est le producteur et le compositeur du groupe, Elana Rozenfeld, chantre, est la chanteuse, et Gilad Abro joue de la basse. Parmi les collaborateurs réguliers figurent Tom Oren, pianiste, et Alon Benjamini, batteur.
Le groupe s’est formé l’année dernière et prépare un album qui sortira l’année prochaine. Il se produira le 25 décembre, le premier soir de Hanoukka, à la synagogue historique d’Eldridge Street à Manhattan, sous l’imposant vitrail de l’édifice. Les membres du groupe mènent chacun leur propre carrière, mais se réunissent à l’occasion des fêtes de fin d’année pour collaborer à ce projet. Il bénéficie du soutien de la Bloom Jewish Music Foundation et d’une subvention de Mifal HaPaïs, la loterie israélienne.
Le groupe prévoit également de produire un film d’animation narratif pour accompagner la musique, sur le modèle du classique de Noël « Un Noël à la Charlie Brown », dont la bande sonore comprend du jazz. Le groupe travaille avec l’animateur Shahar Fleisher pour développer le film avec l’aide de l’intelligence artificielle (IA).
« Malgré tous ses atouts, il est parfois difficile, à cette époque de l’année, pour Hanoukka de rivaliser avec les chansons omniprésentes de Noël », a fait valoir Shefler.
« Nous avons décidé, au sein de cet ensemble, de rendre hommage au vaste répertoire de Hanoukka et de l’amplifier, de le dynamiser avec un son de jazz, afin de créer un signal sonore et de faire savoir à tout le monde que c’est le moment de Hanoukka. »
Les chansons du répertoire du groupe représentent un éventail de la musique de fête, y compris des classiques américains tels que « I Have a Little Dreidel », la chanson hébraïque traditionnelle « Maoz Tzur » écrite aux alentours du XIIIᵉ siècle, une chanson en ladino, une langue juive apparentée à l’espagnol qui a connu un renouveau musical ces dernières années, et une composition originale intitulée « Hanukkah Blues ». Le répertoire du groupe comprend une quinzaine de chansons, a indiqué Shefler.
Le groupe ne se contente pas de créer une bande sonore, il adapte également les chansons. Pour « I Have a Little Dreidel », par exemple, il instrumentalisé la partie centrale.
« Ce que nous avons fait, c’est exalter une chanson qui est déjà belle et fantastique pour enfants, mais nous y avons ajouté de nombreuses couches de sophistication musicale qui conservent la valeur d’origine, mais qui, je pense, l’enrichissent également », a déclaré Shefler.
Selon Jeff Janeczko, conservateur aux archives Milken de la musique juive, qui compilent des documents relatifs à l’histoire de la musique juive aux États-Unis, cette musique aidera probablement les Juifs américains à se rapprocher des fêtes de fin d’année.
« Je pense que c’est une façon pour les Juifs américains de revendiquer leur appartenance, que cette culture nous appartient et que cette période de l’année n’est pas réservée à ceux qui fêtent Noël », a déclaré Janeczko, qui est titulaire d’un doctorat en ethnomusicologie et qui n’a aucun lien avec le projet Jazzukkah.
Il a ajouté que la musique de Hanoukka est probablement devenue plus répandue chez les Juifs américains en raison de la proximité de cette fête avec Noël.
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« Nous assistons probablement, dans un certain sens, à une pollinisation croisée entre ces deux fêtes qui relèvent de sphères tout à fait distinctes », a-t-il déclaré.
La chanteuse Rozenfeld a grandi à Scarsdale, dans l’État de New York, dans une famille de musiciens de jazz. Elle a été cantor à la synagogue de Park Avenue à Manhattan et à la Congrégation Shirat Hayam à Swampscott, dans le Massachusetts, avant de faire son alyah il y a quatre ans. Elle s’est engagée dans le projet Jazzukkah dès que Shefler lui en a parlé, a-t-elle dit, ajoutant que le jazz était un genre approprié pour l’album parce qu’il est flexible et s’accorde avec les différents styles de musique dans l’œuvre du groupe.
« Vous entendrez dans notre musique beaucoup de rythmes latins et de rythmes du Moyen-Orient, ainsi que du funk. Le funk vient directement du jazz », a-t-elle dit.
« Nous créons une fusion. »
Les Juifs américains ont également une longue histoire dans le domaine du jazz, selon Janeczko. Dans les années 1920, par exemple, les musiciens klezmer ont intégré le jazz à leur répertoire. Et la fin du XXᵉ siècle a vu apparaître des types de jazz plus « spécifiques au judaïsme ». Les compositeurs juifs Irving Berlin et George Gershwin ont quant à eux travaillé à la fois dans la musique pop et le jazz.
« La participation des Juifs au jazz remonte pratiquement aux origines du genre. Il y a toujours eu des musiciens juifs qui jouaient du jazz, qui étaient compositeurs. »
« Je dirais que le jazz a été au cœur de la musique juive américaine. »
Le genre est également présent dans la musique de Noël non juive, a déclaré Shefler, ajoutant que les compositeurs juifs avaient joué un rôle dans l’élaboration du son de la musique de Noël. Berlin a écrit la chanson classique « White Christmas » et le compositeur juif John Marks a écrit « Rudolph the Red-Nosed Reindeer ».
« Dans la culture générale, nous avons une association entre cette musique, cette période de l’année et cette fête », a déclaré Shefler.
Le projet vise également à créer un lien entre les Juifs de différentes sphères par le biais de la musique. De nombreux Israéliens ne connaissent peut-être pas des chansons américaines telles que « I Have a Little Dreidel », tandis que les Juifs américains sont moins familiers avec certains airs hébraïques.
La musique devrait trouver un écho auprès d’une grande partie de la communauté juive – les enfants, les adultes, les orthodoxes modernes, les olim en Israël et les Israéliens de souche, a déclaré Shefler.
« Nous cherchons à produire un son qui puisse être joué n’importe où – dans une école, une synagogue, un centre commercial ou chez quelqu’un », a-t-il ajouté.
« J’espère qu’il deviendra une référence standard que les gens pourront écouter sans même y penser, en le mettant simplement en marche, et qu’il fera partie de la bande-son de leurs fêtes de fin d’année. »
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