La commission des Lois va déjà commencer à voter sur la réforme du système judiciaire
Gilad Kariv a appelé à la grève pour protester contre l'avancement des réformes ; l'ex-chef de l'Agence juive a mis en garde contre la "démagogie" et l'érosion des droits de l'Homme
Jeremy Sharon est le correspondant du Times of Israel chargé des affaires juridiques et des implantations.
Le projet de loi controversé du gouvernement sur la réforme du système judiciaire progresse rapidement vers sa première lecture en plénière à la Knesset, après qu’un député de la coalition a annoncé lundi que le vote du projet de loi en commission commencera en début de semaine prochaine.
Bien que les membres de l’opposition de la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice de la Knesset, au sein de laquelle le projet de loi est en cours de préparation, puissent retarder l’avancement de la législation de plusieurs jours en émettant des réserves, il est probable que le projet de loi sera voté par la commission et soumis à un vote initial en plénière au cours des deux prochaines semaines.
Le projet de loi sera ensuite renvoyé à la commission pour une préparation plus approfondie avant les deuxième et troisième lectures en plénière pour le faire passer en loi.
Le président de la commission de la Constitution, des Lois et de la Justice, le député Simcha Rothman, a informé ses membres lundi soir que la commission commencera à voter sur certains aspects de la législation soit ce mercredi, soit lundi prochain.
Les législateurs voteront d’abord sur les parties de la législation qui traitent de la composition de la commission de sélection des juges et empêchent la Haute Cour de justice d’exercer un contrôle judiciaire sur les Lois fondamentales.
Cela signifie que les autres aspects du projet de loi seront probablement dissociés et examinés séparément. Les autres parties de la reforme annoncée comprennent les propositions visant à restreindre de manière importante la capacité de la Haute-cour à invalider des lois et des décisions gouvernementales avec l’adoption d’une clause dite « dérogatoire » qui permettrait au Parlement de surseoir aux décisions de la Cour suprême avec un vote à la majorité simple de 61 députés ; à donner au gouvernement le contrôle total de la sélection des juges ; à faire disparaître la notion juridique du « caractère raisonnable » du code pénal israélien, une notion sur laquelle s’appuient les magistrats pour juger une législation ou une décision prise par la coalition ; à mettre la législation à l’abri du contrôle judiciaire au début du processus législatif ; et à nommer leurs propres conseillers juridiques au lieu de devoir faire appel à ceux qui opèrent sous les auspices du ministère de la Justice.
La législation est adoptée sous la forme d’un amendement à la Loi fondamentale : Judiciaire, ce qui signifie que la Haute Cour ne serait pas en mesure de l’annuler dans le cas probable où des requêtes seraient déposées devant la Cour contre la nouvelle loi.
Les membres de l’opposition de la commission ont réagi furieusement à l’annonce de Rothman selon laquelle la législation avancera dans la semaine prochaine.
Le député Avoda, Gilad Kariv, a appelé à des grèves et à des manifestations de masse contre l’avancement rapide de la législation.
« Nous arrivons au moment fatidique. La coalition de la destruction et de la corruption soumettra la législation sur la nomination des juges à une première lecture [en plénière à la Knesset] dans les prochains jours », a-t-il écrit sur Twitter.
« C’est le moment de passer des manifestations aux grèves. Dans les écoles, dans les entreprises, lors des événements culturels. C’est le moment pour des rassemblements d’un million de citoyens. C’est le moment pour des dizaines de milliers de personnes de venir manifester devant la Knesset le jour du vote », a déclaré Kariv.
Plus tôt dans la journée de lundi, l’ancien ministre et ex-président de l’Agence juive, Natan Sharansky, a appelé le gouvernement et l’opposition à accepter la proposition du président Isaac Herzog de geler le processus législatif et de mettre en place une commission pour parvenir à un accord de compromis.
« Je pense que la proposition du président Herzog devrait être acceptée de toute urgence et utilisée comme une plate-forme de négociations », a écrit Sharansky dans une publication Facebook.
Sharansky a également réprimandé les deux parties du débat pour leur rhétorique incendiaire sur la question, qui, selon lui, crée une polarisation encore plus grande.
Sharansky a critiqué l’un des principaux piliers des réformes proposées, à savoir le projet d’adoption d’une clause dite « dérogatoire » de la Haute Cour permettant à la Knesset de surseoir aux décisions de la Cour suprême pour violation des droits énoncés dans les Lois fondamentales d’Israël avec un vote à la majorité simple de 61 députés.
« Comment seront protégés les droits de l’Homme et par qui ? L’affirmation ‘nous avons été élus, nous allons protéger’ est démagogique. La démocratie, c’est deux choses à la fois – la règle de la majorité et les droits indéniables de la personne qu’aucune majorité ne peut renier », a déclaré Sharansky, un ancien dissident soviétique qui a déjà été emprisonné par le passé pour ses opinions politiques.
Sharansky a déclaré qu’il serait « absurde » que la Knesset passe outre les droits fondamentaux avec une simple majorité de 61 députés, soit le strict minimum pour une coalition gouvernementale.
« La Knesset doit avoir le dernier mot sur les décisions politiques. Et la Cour sur les décisions relatives aux droits de l’Homme », a déclaré Sharansky.
Plusieurs modifications mineures ont été apportées au projet de loi ces derniers jours, notamment une disposition garantissant qu’au moins un membre de l’opposition fera partie de la commission de sélection des juges.
Cette commission comprendra toutefois cinq membres nommés par la coalition au pouvoir.
Le ministre de la Justice, qui présidera la commission de sélection judiciaire, nommera également deux juges à la retraite pour siéger à la commission « avec l’accord du président de la Cour suprême », une clause qui limite encore l’influence du pouvoir judiciaire puisqu’actuellement, le président de la Cour suprême choisit seul deux autres juges de la Cour suprême pour siéger à la commission.