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Analyse

La Cour suprême annulera-t-elle la loi sur les nominations judiciaires ?

Les opposants à la loi soutiennent qu'elle viole les principes clés qui sous-tendent le caractère démocratique d'Israël, ouvrant la voie à une invalidation par la Haute Cour

Jeremy Sharon

Jeremy Sharon est le correspondant du Times of Israel chargé des affaires juridiques et des implantations.

La présidente de la Cour suprême Esther Hayut (à gauche), avec la ministre de la Justice de l'époque Ayelet Shaked et le ministre des Finances de l'époque Moshe Kahlon lors d'une réunion du comité de sélection judiciaire, au ministère de la Justice à Jérusalem, le 22 février 2018. (Crédit : Hadas Parush/Flash 90)
La présidente de la Cour suprême Esther Hayut (à gauche), avec la ministre de la Justice de l'époque Ayelet Shaked et le ministre des Finances de l'époque Moshe Kahlon lors d'une réunion du comité de sélection judiciaire, au ministère de la Justice à Jérusalem, le 22 février 2018. (Crédit : Hadas Parush/Flash 90)

Alors que le Premier ministre Benjamin Netanyahu a répété jeudi soir que la coalition irait de l’avant pour faire promulguer la première partie de son programme de refonte judiciaire la semaine prochaine – à savoir la loi qui vise prendre le contrôle des nominations judiciaires –, la question de savoir si la Haute Cour de justice pourrait ou non invalider une telle loi devient de plus en plus primordiale.

Une telle décision serait sans précédent dans l’histoire d’Israël. Alors que la coalition actuelle et que les citoyens de droite se méfient largement de la Cour suprême, elle conduirait le pays vers une crise constitutionnelle potentiellement catastrophique.

Un scénario de ce genre devient néanmoins de plus en plus possible, et des juristes chevronnés font valoir que la législation sur le point d’être adoptée par la coalition nuirait gravement à la séparation des pouvoirs en Israël et à l’indépendance du pouvoir judiciaire.

Dans de telles circonstances, la Haute Cour pourrait statuer que cette loi sape le caractère d’Israël en tant qu’État démocratique, la déclarer inconstitutionnelle et l’annuler.

L’État de droit et la capacité même de gouverner le pays pourraient être alors remis largement en doute – un scénario qui pourrait désormais se produire d’un jour à l’autre.

Le projet de loi

Le projet de loi en question est légiféré en tant qu’amendement à la Loi fondamentale sur le pouvoir judiciaire, l’une des treize lois fondamentales quasi constitutionnelles d’Israël, qui énonce l’aspect fondamental de la gouvernance, du régime démocratique et des droits civils du pays.

Le député Simcha Rotman, président de la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice, à gauche, et le conseiller juridique de la Commission, Gur Bligh, à droite, lors d’une réunion à la Knesset, à Jérusalem, le 30 janvier 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Le projet de loi donnerait aux coalitions gouvernementales, à partir de l’actuelle, le contrôle de six sièges au sein de la commission de sélection des juges, qui compte onze membres. Trois postes seraient attribués aux juges de la Cour suprême, dont le président de la Cour suprême, et les deux restants aux députés de l’opposition.

Plus important encore, la coalition a également l’intention de changer le mode d’élection du président de la Cour suprême. Alors que le système d’ancienneté est utilisé jusqu’à présent, à savoir que le juge qui a siégé le plus longtemps à la Cour est nommé président, un vote à la majorité simple au sein de la commission de sélection des juges serait désormais organisé.

Cela donnerait en théorie à la coalition actuelle le contrôle de sept des onze sièges de la commission si le président de la Cour suprême votait conformément à ceux qui l’ont nommé.

En vertu de la loi, les nominations judiciaires au sein des tribunaux des affaires familiales, administratifs, de district et des prud’hommes nécessiteraient sept voix au sein de la commission, ce qui signifie que le gouvernement de coalition pourrait avoir un contrôle total sur toutes les nominations au sein des tribunaux inférieurs.

Pour la sélection des juges de la Cour suprême, les deux premiers sièges à devenir vacants au cours d’un mandat à la Knesset seraient désignés par une majorité simple, ce qui signifie que la coalition pourrait aussi contrôler ces deux premières nominations.

La désignation pour le troisième siège devenu vacant aurait besoin du soutien d’au moins un député de l’opposition, et celle du quatrième aurait besoin du soutien d’un député de l’opposition et d’un juge de la Cour suprême.

Des étudiants israéliens défilent lors d’une manifestation contre la refonte judiciaire prévue par le gouvernement israélien, à Jérusalem, le 23 mars 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Bien que cette version du projet de loi soit légèrement plus modérée qu’une version précédente, des juristes ont souligné que le système politiserait considérablement le système de nomination des juges.

Toutes les nominations aux tribunaux inférieurs pourraient être faites simplement par les votes des représentants de la coalition et du président de la Cour suprême nommé par la coalition, contrairement au système actuel où les élus n’ont pas de droit de veto sur les nominations aux tribunaux inférieurs.

Et comme il n’y a généralement que deux ou trois nominations à la Cour suprême lors de chaque législature de la Knesset – qui dure au maximum quatre ans, mais elle est quasi systématiquement dissoute de façon anticipée –, la grande majorité des nominations seront faites par les seules coalitions, qu’elles soient de droite ou de gauche.

Actuellement, afin de procéder à une nomination à la Cour suprême, un consensus est nécessaire entre les représentants de la coalition et ceux du pouvoir judiciaire – l’Association du barreau d’Israël –, ou avec l’opposition au sein du comité.

Pourquoi la Cour suprême interviendrait-elle ?

La Haute Cour n’a encore jamais invalidé une loi fondamentale en raison du poids constitutionnel qu’elle représente. Mais elle a affirmé son droit de le faire en des circonstances très restreintes.

La décision la plus importante sur cette question est la décision du tribunal au sujet de la Loi fondamentale : État-nation en 2021. Bien que le tribunal ait refusé d’annuler cette loi, la présidente de la Cour suprême, Esther Hayut, a décrit les circonstances très précises dans lesquelles le tribunal pourrait annuler une loi fondamentale.

La juge en chef de la Cour suprême, Esther Hayut, lors d’une audience pour une requete demandant l’évacuation de l’avant-poste illégal de Homesh, le 2 janvier 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

« Dans mon approche, à ce stade de l’effort constitutionnel d’Israël, il y a une restriction, extrêmement étroite, qui incombe à la Knesset dans sa fonction d’autorité constituante, à savoir qu’elle ne peut en aucun cas révoquer l’essence d’Israël en tant qu’État juif et démocratique par une loi fondamentale », a écrit Hayut dans sa décision.

« Nous parlons de cas dans lesquels une disposition constitutionnelle porterait un coup mortel au caractère juif ou démocratique de l’État, au point qu’il n’y aurait aucun moyen de concilier conceptuellement et pratiquement cette disposition avec ces éléments de l’identité de l’État », a-t-elle poursuivi.

Hayut a précisé quel type de principes démocratiques devraient être mis à mal par une loi fondamentale pour que la Haute Cour l’annule, écrivant qu’une telle loi qui « porterait un coup mortel à des élections libres et équitables, aux droits de l’homme fondamentaux, à la séparation des pouvoirs, à l’État de droit et à un système judiciaire indépendant » ne serait pas à la mesure du caractère démocratique d’Israël.

Des arguments pour la motion…

Le professeur Mordechai Kremnitzer, professeur émérite de droit à l’Université hébraïque et chercheur principal à l’Israel Democracy Institute, soutient que l’amendement proposé par la coalition à la Loi fondamentale : le pouvoir judiciaire pourrait être considéré comme une violation de la séparation des pouvoirs et de l’indépendance judiciaire.

Il a déclaré que la proposition de loi du gouvernement « portait atteinte à l’indépendance, au professionnalisme et à la nature apolitique » du pouvoir judiciaire, et que son annulation pourrait donc être justifiée.

« Cela saperait le très faible système de freins et contrepoids du pouvoir exécutif et législatif en Israël, qui dépend d’un système judiciaire indépendant », a déclaré Kremnitzer.

Le professeur Mordechai Kremnitzer s’exprime lors d’une conférence à Jérusalem, le 11 mars 2018. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

« Sans cela, la coalition aurait des pouvoirs illimités, ce qui signifie que les droits des citoyens dépendraient des bonnes grâces de la coalition et de Dieu, et je n’ai pas confiance en un tel système. »

Le Dr. Amir Fuchs, qui travaille également pour l’Israel Democracy Institute, a déclaré que, dans les requêtes à la Haute Cour contre la loi, les requérants « devront prouver qu’il y a une violation grave et destructrice de la séparation des pouvoirs et de l’indépendance judiciaire ».

Mais Fuchs et Kremnitzer ont cependant reconnu que les juges de la Haute Cour ne voyaient peut-être pas tous la loi sous un tel angle, et ce pour plusieurs raisons.

Arguments contre la motion…

De nombreux pays impliquent des responsables politiques dans l’élection des juges de leurs plus hautes cours, et les partisans de la législation du gouvernement actuel ont fait valoir que de nombreux pays démocratiques libéraux accordaient une telle autorité aux seuls dirigeants politiques.

Les architectes de la loi, le ministre de la Justice Yariv Levin et le président du comité de la Constitution, du droit et de la justice, le député Simcha Rothman, qui a dirigé le projet de loi en commission, ont fait valoir ces arguments.

En outre, la loi proposée donne théoriquement à l’opposition et au pouvoir judiciaire la capacité d’avoir une certaine influence sur les nominations à la Cour suprême, puisqu’au moins une petite proportion des nominations auront besoin de leur soutien.

Le ministre de la Justice Yariv Levin lors d’un débat et d’un vote à la plénière de la Knesset, le 22 mars 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Dans un tel contexte, certains des juges les plus conservateurs de la Cour peuvent ne pas partager l’idée que la loi nuirait aussi gravement à l’indépendance judiciaire et à la séparation des pouvoirs à tel point qu’elle justifierait la mesure sans précédent et radicale d’annuler une loi fondamentale.

Fuchs a désigné les juges de la Cour suprême Noam Sohlberg, David Mintz, Yosef Elron et Alex Stein comme des membres de la magistrature plus conservateurs, qui pourraient se prononcer contre l’invalidation de la législation, tandis qu’au moins deux autres juges ont également des tendances conservatrices et pourraient refuser de conduire le tribunal vers un contentieux constitutionnel.

Et l’avocat Zeev Lev du Mouvement pour la gouvernabilité et la démocratie, une organisation conservatrice, a avancé d’autres arguments en faveur de la non-censure de la loi par le contrôle judiciaire.

Lev a fait valoir, à l’instar de Levin et Rothman, que puisque d’autres pays démocratiques exerçaient un contrôle politique et même gouvernemental sur les nominations judiciaires, il serait difficile pour les opposants de prouver que la loi de la coalition équivalait à un « coup mortel » pour la démocratie israélienne.

« De toutes les réformes proposées, c’est la plus difficile à annuler pour le tribunal car c’est ainsi que les juges sont nommés partout dans le monde dans tous les pays démocratiques », a déclaré Lev.

En tant que tel, il a déclaré qu’il pensait qu’il n’y avait « aucune chance » que la Haute Cour annule la législation.

Mais Fuchs a fait valoir, tout comme Kremnitzer, que les affirmations concernant le contrôle politique sur les nominations judiciaires dans d’autres démocraties n’étaient pas tout à fait exactes.

Fuchs a noté qu’en Allemagne, les nominations à la Cour constitutionnelle fédérale sont faites par les deux chambres élues du parlement allemand, comme l’ont souligné les partisans de la législation du gouvernement.

Me Zeev Lev, conseiller juridique du Mouvement pour la Gouvernance et la Démocratie. (Crédit : Lior Yado)

Mais une nomination à cette cour nécessite une majorité des deux tiers dans les deux chambres, ce qui nécessite inévitablement le soutien de certains membres de l’opposition.

Au Canada, un autre pays cité comme exerçant un contrôle politique sur les nominations judiciaires, le Premier ministre sélectionne les juges mais, dans la pratique, il le fait à partir d’une liste de candidats dressée par un comité indépendant qui ne comprend qu’une minorité de responsables politiques.

Lev a toutefois noté que cette manière de faire au Canada n’était pas un élément permanent de sa configuration constitutionnelle et pourrait être modifié par un prochain Premier ministre.

D’autres pays comme le Royaume-Uni et la Suède ont des dispositions similaires à celles du Canada, bien qu’avec des circonstances différentes concernant la composition des conseils consultatifs pour l’établissement des listes de candidats et sur la rigueur avec laquelle le gouvernement doit respecter ces listes.

La loi du gouvernement israélien, en revanche, donnerait à la coalition une majorité directe au sein du comité de sélection judiciaire.

En conséquence, le nouvel arrangement accorde à la coalition un contrôle total sur deux nominations à la Cour suprême, et éventuellement un contrôle total sur toutes les nominations aux tribunaux inférieurs si le président de la Cour suprême nommé par la coalition vote avec la coalition.

Fuchs a fait valoir qu’une telle situation limiterait considérablement l’indépendance du pouvoir judiciaire, en particulier dans les tribunaux inférieurs, soulignant que les juges de ces tribunaux pourraient bien être préoccupés par leur carrière lorsqu’ils traitent d’affaires pénales contre des responsables politiques.

« Les juges ne voudront pas se prononcer contre des politiciens de la coalition », a déclaré Fuchs, car préoccupés par leur future carrière.

Le Dr. Amir Fuchs. (Crédit : Institut israélien de la démocratie)

Une telle perspective pourrait suffire à obtenir une majorité à la Haute Cour pour annuler la loi.

Mais Lev a soulevé une autre difficulté, avec des arguments selon lesquels les coalitions, en vertu de la nouvelle loi, nommeraient la majeure partie des juges de la Cour suprême.

Il a souligné que, bien qu’en moyenne seulement deux à trois juges soient nommés lors d’un mandat de la Knesset, ce qui donnerait en théorie aux gouvernements de coalition la grande majorité des nominations à la Cour suprême, ces moyennes ne disent pas toute la vérité.

Il a noté que, lors de la dernière Knesset, quatre juges avaient été nommés par le gouvernement Bennett-Lapid, et cinq avaient été nommés lors du mandat précédent. Lors de la prochaine Knesset, après de nouvelles élections, plus de quatre places sur le banc de la Cour suprême pourraient se retrouver vacantes.

Cela signifie que n’importe quelle Knesset pourrait fréquemment avoir à désigner trois, quatre – et peut-être plus – nominations dans lesquelles l’opposition et le pouvoir judiciaire bénéficieraient d’un vote clé, permettant un tribunal plus équilibré et niant les affirmations selon lesquelles la loi dépasserait le seuil de violation de la séparation des pouvoirs.

Lev a également soutenu que, bien que la coalition actuelle soit inhabituellement homogène dans son idéologie, les coalitions précédentes – et par extension les comités de sélection judiciaire qu’elles ont formés – ont inclus des partis avec une large diversité de positions idéologiques, comme le comité du gouvernement Bennett-Lapid qui était dirigée par l’ancien ministre de la Justice de droite Gideon Saar, mais qui comprenait également le député travailliste Efrat Reitman, membre de la coalition, à gauche.

Le député Gideon Saar lors d’une réunion de faction du parti HaMahane HaMamlahti à la Knesset, le parlement israélien à Jérusalem, le 20 février 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

La commission formée pendant le gouvernement Netanyahu de 2015 à 2018 était dirigé par la ministre de la Justice de l’époque, Ayelet Shaked, mais comprenait le chef plus centriste du parti Koulanou aujourd’hui disparu du paysage politique, Moshe Kahlon, a noté Lev.

« Les gens parlent de la coalition comme d’une seule voix, mais si vous regardez la plupart des coalitions, elles sont très variées et ne forment souvent pas un seul bloc », a-t-il déclaré.

« Cela signifie que les négociations et les compromis sur les nominations judiciaires se déroulent au sein de la coalition », a-t-il expliqué.

Lev a cependant admis que le contrôle politique sur les tribunaux inférieurs n’était pas l’idéal et a déclaré que, idéalement, deux comités distincts devraient être créés, un pour les nominations à la Cour suprême avec une prépondérance de responsables politiques, et un avec une contribution davantage professionnelle pour les tribunaux inférieurs.

Il a cependant fait valoir que le simple fait que la coalition puisse nommer les juges de la Cour suprême ne signifiait pas qu’ils voteraient automatiquement avec la coalition sur les nominations judiciaires.

Une autre difficulté dans l’annulation de la loi sur les nominations judiciaires est la manière dont le gouvernement fait avancer son programme global de refonte judiciaire et juridique.

Kremnitzer et Fuchs ont tous deux affirmé que la stratégie du gouvernement consistant à adopter les différents aspects de son plan de réforme global rendrait plus difficile pour la Haute Cour d’annuler chaque point du programme législatif, en particulier le projet de loi sur les nominations judiciaires.

La Haute Cour serait beaucoup plus susceptible de voir l’ensemble du plan – qui comprend également le projet de loi visant à réduire radicalement le contrôle judiciaire et à permettre à la Knesset de faire passer des lois sans contrôle judiciaire ; un projet de loi interdisant à la Haute Cour d’annuler les lois fondamentales ; et des propositions visant à réduire considérablement l’autorité du procureur général et des conseillers juridiques du gouvernement – comme une attaque contre le caractère démocratique d’Israël.

La juge en chef de la Cour suprême Ester Hayut, au centre, et ses collègues juges lors d’une audience sur la décision de la commission de sélection des juges d’empêcher Balad de se présenter aux prochaines élections de la Knesset, le 6 octobre 2022. (Crédit : Jonatan Sindel/Flash90)

« S’il existe une idée globale de ce qui se passerait quand toute cette législation serait adoptée, alors les arguments en faveur de son annulation se renforcent. Si le tribunal traite ces réformes dans leur ensemble, alors le tableau est plus grave en ce qui concerne les dommages causés à la démocratie », a déclaré Kremnitzer.

Il est donc possible que le tribunal veuille attendre que d’autres aspects du vaste ensemble de réformes soient adoptés avant de se prononcer sur seulement une partie de celui-ci.

À ce stade, cependant, le gouvernement actuel s’est peut-être déjà engagé dans ses projets, dit Fuchs, en s’intéressant aux deux places sur les bancs de la Haute Cour qui seront disponibles plus tard cette année, quand Hayut et Anat Baron auront atteint l’âge limite maximal de départ à la retraite et devront démissionner.

Alors que se passe-t-il ?

Mais Fuchs ajoute une autre dimension à la problématique. Lorsque des requêtes sont déposées contre une législation, la Haute Cour rend souvent une ordonnance provisoire gelant l’application de la nouvelle loi afin de se donner le temps de statuer sur sa constitutionnalité avant que ses effets ne se fassent sentir.

Étant donné que la coalition a l’intention de faire adopter la semaine prochaine la loi sur les nominations judiciaires, le pays pourrait bien connaître une confrontation constitutionnelle non pas dans quelques mois, voire quelques années, lorsque le tribunal rendra une décision définitive sur la question, mais dans quelques jours.

À ce stade, Israël se trouverait à un carrefour majeur : le gouvernement ignorerait-il l’ordonnance du tribunal et convoquerait-il la nouvelle commission de sélection des juges et nommerait-il de nouveaux juges pour remplacer Hayut et Baron, ou se conformerait-il à l’ordonnance provisoire et reculerait-il ?

Levin a souligné ce danger plus tôt cette semaine, lorsqu’il a déclaré qu’une invalidation de la loi par la Haute Cour serait « complètement injustifiée ». « Nous ne l’accepterons certainement pas », a-t-il déclaré.

Kremnitzer a estimé que, compte tenu des conséquences pour l’État de droit et les fondements même de la société israélienne, la possibilité que le gouvernement ignore l’ordonnance du tribunal pourrait ainsi inciter le tribunal à ne pas annuler la législation sur les nominations judiciaires.

Des manifestants affrontent la police à Haïfa lors d’une manifestation contre la refonte judiciaire prévue par le gouvernement, le 23 mars 2023. (Crédit : Shir Torem/Flash90)

Il n’est pas non plus certain que le tribunal rende une ordonnance provisoire contre la loi.

« Je ne pense pas que le gouvernement oserait ne pas se conformer à la cour », a cependant déclaré Kremnitzer, « en raison des conséquences économiques, diplomatiques et sociétales internes que causerait un gouvernement qui se rebelle contre la cour ».

En outre, Kremnitzer a noté que, si le tribunal invalidait la loi, la Knesset pourrait toujours revenir en arrière et légiférer quelque chose de similaire mais de légèrement plus modéré, tout en gardant à l’esprit les objections spécifiques du tribunal, afin d’adopter quelque chose qui réalise la plupart sinon la totalité de ses objectifs initiaux.

Le gouvernement pourrait considérer cette voie comme préférable, a-t-il dit, à l’option nucléaire que serait de désobéir au tribunal, avec toutes les conséquences potentiellement dramatiques qui accompagneraient une telle décision.

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