La police interpelle un journaliste devant son domicile pour un tweet anti-Netanyahu
Le journaliste du Haaretz, Uri Misgav, a été interrogé par la police après avoir mis en garde le Premier ministre et son épouse de ne pas se rendre à Berlin mercredi
La police a interrogé un célèbre journaliste samedi soir au sujet d’une publication sur les réseaux sociaux dans lequel il « recommandait » au Premier ministre Benjamin Netanyahu de ne pas donner suite à sa prochaine visite d’État à Berlin.
« Je recommande vivement au dictateur d’annuler son voyage prévu à Berlin mercredi », a écrit sur Twitter Uri Misgav, journaliste à Haaretz, samedi après-midi. « Ce n’est pas approprié… croyez-moi sur parole. »
Quelques heures plus tard, alors que Misgav et son épouse quittaient leur domicile de Jaffa, dans la banlieue de Tel-Aviv, pour se rendre à une manifestation contre les projets de réforme du système judiciaire du gouvernement, deux policiers l’ont interpellé pour l’interroger, a par la suite indiqué Misgav dans un autre tweet.
Racontant l’incident, qui a duré entre trois et quatre minutes, Misgav a déclaré que les policiers lui ont dit qu’ils avaient été envoyés pour l’interroger au sujet du message publié en ligne.
Les policiers, que Misgav a qualifiés de « mignons » et « embarrassés », lui ont demandé s’il avait l’intention de faire du mal au Premier ministre, a-t-il déclaré au site d’information Walla. « Qui vous a envoyé ? », Misgav dit avoir demandé aux policiers. « Nous sommes dans une situation très délicate », ont-ils répondu.
Sur Twitter, Misgav, critique de longue date de la politique de Netanyahu, a précisé qu’il suggérait au Premier ministre et à son épouse, Sara, d’éviter de se rendre à Berlin en raison des « manifestations démocratiques qui les attendent » en Allemagne, rejetant implicitement toute menace de violence.
Parallèlement au mouvement de protestation qui balaie le pays, des manifestations ont eu lieu dans des villes du monde entier, dont une à Rome vendredi lors d’une visite d’État du Premier ministre. Berlin, où vivent environ 10 000 Israéliens, a été le théâtre d’une manifestation contre les projets de remaniement du système judiciaire au début du mois de février.
Plusieurs organisateurs de manifestations ont suggéré dans des messages en ligne que les Netanyahu seraient accueillis par des rassemblements lors de leur visite officielle, qui doit débuter mercredi, mais ils n’ont pas fourni de détails. Des activistes en Israël cherchent également à perturber le voyage prévu en organisant des manifestations à l’aéroport Ben Gurion mercredi, comme ils l’avaient fait la semaine dernière avant le départ de Netanyahu pour Rome.
https://twitter.com/UriMisgav/status/1634604348872204288
Les démêlés de Misgav avec la police surviennent alors que le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, est régulièrement accusé d’essayer de politiser les forces de l’ordre, sur lesquelles il a autorité.
« Nous vivons des jours historiques et surréalistes. Je ne pense pas que la police doive poursuivre un journaliste, et certainement pas des civils, pour un tweet », a déclaré Misgav à Walla. « Il était clair pour moi que la police a été envoyée. J’espère vraiment que les ordres ne viennent pas de Ben Gvir. Ce serait assez inquiétant. »
Jeudi dernier, Ben Gvir avait annoncé sa volonté de réaffecter le chef de la police de Tel Aviv, Amichaï Eshed, à un autre poste – une décision largement interprétée comme un licenciement en raison de l’impression du ministre qu’Eshed se montrait trop indulgent à l’égard des manifestants anti-gouvernement.
Cette décision a suscité l’indignation et a depuis été suspendue par la Procureure générale Gali Baharav-Miara.
Les manifestations anti-gouvernement hebdomadaires, dont celle à laquelle a participé Misgav, sont entrées dans leur dixième semaine samedi soir, et 200 000 personnes auraient participé au seul rassemblement de Tel Aviv, selon les estimations des médias.
Les manifestations ont eu lieu alors que la coalition s’apprête à passer à la vitesse supérieure à partir de dimanche avec sa refonte largement controversée du système judiciaire, rejetant jusqu’à présent les appels, y compris du président, à abandonner la législation actuelle et à négocier patiemment un compromis.
Les organisateurs ont déclaré qu’ils intensifieraient leur riposte si le gouvernement ne mettait pas de côté la loi de refonte, avec une « journée d’escalade de la résistance » prévue pour jeudi.