La Pologne récompense un satiriste pour qui « les Juifs créent l’antisémitisme »
Ryszard Makowski, 62 ans, a aussi critiqué les protestations d'Israël et des organisations juives contre la loi polonaise sur la Shoah
Un satiriste polonais, qui avait énoncé des blagues antisémites à la télévision en 2016 avant d’accuser les Juifs de fomenter la haine dirigée contre eux, a été récompensé par la plus haute distinction artistique de son pays.
Ryszard Makowski, 62 ans, a reçu la médaille du Mérite culturel polonais Gloria Artis jeudi, aux côtés d’une vingtaine d’autres personnes, de la part du ministre de la Culture Piotr Gliński à Varsovie, selon le site wPolityce. Makowski a reçu la médaille de bronze, la troisième et dernière distinction accordée chaque année à des artistes par le ministère.
« C’est l’expression de la gratitude des Polonais pour votre créativité, votre engagement, votre talent – qui ne fait qu’augmenter avec le travail, la persévérance, le courage créatif », a déclaré Gliński en remettant la récompense.
En 2016, le groupe polonais du Bnai Brith avait protesté contre un spectacle de Makowski sur la chaîne publique TVP3, au sujet d’une chanson qui évoquait les pratiques bancaires en vigueur depuis aussi longtemps que les « tsimmes et gescheft » – les termes en yiddish pour carottes cuites sucrées et le business. Le chant faisait également référence à la famille Rothschild.
En mars, Makowski avait écrit sur wPolityce sur les protestations d’Israël et des organisations juives au sujet de la loi qui pénalisait l’attribution des crimes nazis à la Pologne. Cette loi a été amendée le mois dernier.
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« On pourrait craindre que cette lutte ostentatoire au sein des cercles juifs », a-t-il dit, « vise à éveiller les humeurs antisémites ».
L’association polonaise Never Again, qui surveille de près les crimes et le discours raciste en Pologne, a diffusé un communiqué affirmant que la distinction de Makowski était étonnante, étant donné qu’il est un « parolier et auteur bien connu pour son ancrage dans les stéréotypes et les préjugés antisémites ».
Rafal Pankowski, cofondateur de l’association, a ajouté qu’au « regard de la fragilité des relations entre Juifs et Polonais, et tout particulièrement cette année », après la crise diplomatique engendrée par la loi, il était « réellement surpris par cette décision du ministère. En tant que citoyen polonais, cette médaille n’est pas remise en mon nom ».
Selon Pankowski, l’antisémitisme est quelque chose que son association refuse de considérer comme « inhérente à la culture et au patrimoine polonais qui doit être célébrée par des représentants officiels de l’Etat polonais ».