L’Azerbaïdjan envoie un chanteur juif à l’Eurovision avec un message de « paix et d’amour »
Asaf Mishiyev, le chanteur de Mamagama, dit ne jamais avoir souffert d'antisémitisme à Bakou. Il soutient l'Israélienne Yuval Raphael : "Nous sommes fiers d'elle et lui souhaitons de briller de mille feux"

S’il y a bien quelqu’un capable d’apporter un peu de paix et d’harmonie lors du Concours Eurovision de la chanson de cette année, c’est le groupe Mamagama.
Ce trio, composé d’hommes originaires d’Azerbaïdjan – un chanteur juif, un guitariste libano-russe et un batteur azéri – représentera son pays cette année à l’Eurovision tout en se voulant le symbole de la coexistence, de la tolérance et de l’amour.
« Nous formons une grande famille avec ce groupe », expliquait au Times of Israel, lors d’une récente interview via Zoom, Asaf (Safael) Mishiyev, chanteur de Mamagama et fier Juif des montagnes (également connu sous le nom de Juifs Kavkazi).
« Je crois que notre groupe en est la preuve vivante : nous sommes un modèle de tolérance en Azerbaïdjan, avec moi qui suis juif, Hasan, mon ami, arabe libanais et mon autre ami Arif, azeri », ajoute-t-il.
Le trio s’est formé il n’y a pas si longtemps : Mishiyev – qui a lancé Mamagama en 2021 – a choisi Hasan Heydar pour le rejoindre à la guitare et Arif Imanov à la batterie, encore plus récemment.
Le groupe prendra part à la compétition à Bâle, le mois prochain, avec la chanson « Run With U », morceau techno-pop qui mêle le son des années 80 avec des notes futuristes et le saz, instrument à cordes traditionnel d’Azerbaïdjan.
Du haut de ses 32 ans, Mishiyev explique qu’il a grandi dans la petite communauté juive d’Azerbaïdjan, qui vit sans problème dans ce pays majoritairement musulman.
« Nous sommes des Juifs des montagnes originaires de la ville de Quba, mais je suis né à Bakou », précise-t-il en faisant allusion à l’ancienne communauté juive de la région du Caucase. « Ma mère est juive, mon père est juif : en Azerbaïdjan, nous avons deux écoles juives et une école de musique. C’est là que j’enseigne. »
Mishiyev précise qu’il parle un peu hébreu et qu’il a beaucoup d’amis et membres de sa famille en Israël, où il s’est rendu à deux reprises, une fois dans le cadre du programme Taglit Birthright et une autre, pour un concours de musique.
Melting-pot azeri
Les membres du groupe s’accordent tous à dire qu’en Azerbaïdjan, l’origine ethnique n’est pas un problème.
« Peu importe la nationalité, la religion, les traditions ou quoi que ce soit d’autre… tout le monde vit ici dans la paix et l’amour », affirme Mishiyev.
Heydar ajoute que la communauté peut « sans problème faire état de sa judéité sans faire face à une quelconque forme de harcèlement ».
Mishiyev ajoute : « Les Juifs nés en Azerbaïdjan se sentent chez eux dans ce pays. L’Azerbaïdjan est ma patrie et je suis très fier de représenter l’Azerbaïdjan cette année à l’Eurovision. »
Cela faisait longtemps que Mishiyev rêvait de l’Eurovision : il avait même participé à un concours télévisé, en 2014, pour participer aux sélections du candidat de l’Azerbaïdjan et en 2020, il avait participé à la version russe de « The Voice » en passant les auditions avec une chanson du chanteur israélien Asaf Avidan. En 2023, Mamagama avait proposé une chanson au comité de sélection, qui l’avait retenu un temps, sans pour autant le choisir in fine.
L’année dernière, Heydar a participé à l’écriture et à la production de « Özünlə apar », qui a représenté l’Azerbaïdjan au concours organisé à Malmö. Cette année, enfin, le tout nouveau trio a été sélectionné par le comité pour concourir à l’Eurovision avec « Run With U ».
« C’est une immense chance qui nous est offerte – la parfaite occasion de faire entendre notre musique et de montrer notre talent », poursuit Heydar.

Le groupe, qui espère que la dimension internationale de l’Eurovision leur permettra de décoller, a dans sa manche plusieurs titres qui devraient sortir après le concours. Ils feront également la première partie du groupe pop-rock One Republic lors de leur concert à Bakou plus tard ce mois-ci.
« Acclamez Yuval »
À seulement cinq semaines du concours, le trio est impatient de participer aux rassemblements pré-concours et de rencontrer leurs concurrents de l’Eurovision. Ils ont déjà écouté les 36 autres chansons et choisi leurs préférées – celles de Malte, d’Autriche, d’Albanie, d’Irlande – et d’Israël.
« Nous aimons la chanson d’Israël, c’est une chanson très touchante, une très belle chanson », explique Mishiyev qui encourage la chanteuse israélienne Yuval Raphael, qui interprétera « New Day Will Rise » au concours, à Bâle.
« Acclamez Yuval, nous sommes de tout coeur avec elle, nous sommes fiers d’elle et nous espérons qu’elle va briller de mille feux », ajoute Heydar.
Leur attitude est radicalement différente de celle de ceux qui tentent de faire bannir Israël de la compétition ou qui prévoient de huer ou boycotter Raphaël, comme d’autres l’ont fait l’an dernier avec Eden Golan, la candidate d’Israël.
« Cela nous attriste parce que l’Eurovision est un concours musical : c’est la musique qui doit primer », explique Mishiyev. « Nous sommes très tristes quand on mélange musique et politique, ou d’autres choses. »
Heydar affirme que lorsque « quelqu’un harcèle un candidat à cause de la politique ou de quelque chose de ce genre, c’est très triste, car il s’agit avant tout d’un concours de musique et non d’un débat politique », ce à quoi Imanov ajoute : « La musique devrait servir à réunir les gens ».
L’Azerbaïdjan lui-même n’est pas étranger aux controverses géopolitiques : son propre conflit avec l’Arménie entre souvent en ligne de compte dans les tensions de l’Eurovision et la participation de Bakou n’est pas exempte de critiques.
Mais pour Mamagama, la compétition ne tourne qu’autour de la musique.
« La mélodie est le plus important à nos yeux », conclut Mishiyev. « C’est notre message. »
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