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Le « 1938 Projekt » immerge les élèves dans une date clef pour les Juifs allemands

Des documents personnels authentiques placent le lecteur en contact direct avec les combats et les espoirs des Juifs européens qui tentaient de fuir un génocide imprévisible

  • 26 septembre 1938 : "Nous émigrons". La page marquant Rosh Hashana dans l'aobum préparé par  Wilhelm Hesse pour ses filles  Helen et Eva. Eva devait devenir l'une des plus grandes artistes américaines du 20ème siècle (Autorisation : Institut  Leo Baeck – New York | Berlin)
    26 septembre 1938 : "Nous émigrons". La page marquant Rosh Hashana dans l'aobum préparé par Wilhelm Hesse pour ses filles Helen et Eva. Eva devait devenir l'une des plus grandes artistes américaines du 20ème siècle (Autorisation : Institut Leo Baeck – New York | Berlin)
  • 5 décembre 1938 : "Patrie ingrate". Le vétéran de la Première guerre mondiale Otto Anker, blessé au combat, avait pensé  que sa croix de fer et son épouse non-juive lui permettraient d'être épargné. Il avait refusé l'appel lancé par ses fils de les rejoindre en exil. Son commerce avait finalement été aryanisé et ses papiers d'identité flanqués d'un "J". (Autorisation : Institut Leo Baeck – New York | Berlin)
    5 décembre 1938 : "Patrie ingrate". Le vétéran de la Première guerre mondiale Otto Anker, blessé au combat, avait pensé que sa croix de fer et son épouse non-juive lui permettraient d'être épargné. Il avait refusé l'appel lancé par ses fils de les rejoindre en exil. Son commerce avait finalement été aryanisé et ses papiers d'identité flanqués d'un "J". (Autorisation : Institut Leo Baeck – New York | Berlin)
  • Le 11 novembre 1938 : "Incendie". Alors que les Juifs de Chemnitz tentaient de faire face aux violences brutales subies deux jours auparavant - la magnifique synagogue avait été incendiée et détruite pendant les pogroms de novembre, dans la nuit du 9 au 10 (les événements ayant marqué ce qui devait être appelé "la nuit de Cristal") et 170 membres de la communauté avaient été déportées au camp de concentration de Buchenwald -le représentant de la communauté, le commerçant Josef Kahn, avait été contacté par le maire de la ville. Avec un cynisme effroyable, ce dernier lui avait demandé le nettoyage dans les trois jours des ruines de la synagogue "qui a pris feu dans la nuit du 9 au 10 novembre". Si l'ordre n'était pas exécuté dans les délais, le bureau d'inspection municipal serait dans l'obligation de faire le travail lui-même aux frais de la communauté (Autorisation :  Leo Baeck Institute – New York | Berlin)
    Le 11 novembre 1938 : "Incendie". Alors que les Juifs de Chemnitz tentaient de faire face aux violences brutales subies deux jours auparavant - la magnifique synagogue avait été incendiée et détruite pendant les pogroms de novembre, dans la nuit du 9 au 10 (les événements ayant marqué ce qui devait être appelé "la nuit de Cristal") et 170 membres de la communauté avaient été déportées au camp de concentration de Buchenwald -le représentant de la communauté, le commerçant Josef Kahn, avait été contacté par le maire de la ville. Avec un cynisme effroyable, ce dernier lui avait demandé le nettoyage dans les trois jours des ruines de la synagogue "qui a pris feu dans la nuit du 9 au 10 novembre". Si l'ordre n'était pas exécuté dans les délais, le bureau d'inspection municipal serait dans l'obligation de faire le travail lui-même aux frais de la communauté (Autorisation : Leo Baeck Institute – New York | Berlin)
  • 4 septembre 1938 : "Dernière photo de classe". Gisela Kleinermann, 10 ans, en haut à droite, devait rapidement dire adieu à ses camarades de l'école juive de Dresden (que les enfants juifs étaient dans l'obligation de fréquenter après avoir été interdits dans les écoles allemandes). Elle allait vite émigrer aux Etats-Unis (Autorisation : Institut Leo Baeck – New York | Berlin)
    4 septembre 1938 : "Dernière photo de classe". Gisela Kleinermann, 10 ans, en haut à droite, devait rapidement dire adieu à ses camarades de l'école juive de Dresden (que les enfants juifs étaient dans l'obligation de fréquenter après avoir été interdits dans les écoles allemandes). Elle allait vite émigrer aux Etats-Unis (Autorisation : Institut Leo Baeck – New York | Berlin)
  • 15 novembre 1938 : "L'excentrique sensible". Détail d'un portrait d'une jeune fille par l'expressionniste et dadaïste John Hoexter. Activiste et idéaliste de gauche, il devait se suicider après la nuit de Cristal et ses violences (Autorisation : Institut Leo Baeck  – New York | Berlin)
    15 novembre 1938 : "L'excentrique sensible". Détail d'un portrait d'une jeune fille par l'expressionniste et dadaïste John Hoexter. Activiste et idéaliste de gauche, il devait se suicider après la nuit de Cristal et ses violences (Autorisation : Institut Leo Baeck – New York | Berlin)
  • 1er noivembre 1938 : "Protestation dans les urnes". Un éditorial paru dans Aufbau (un journal juif de New York) avait vivement demandé aux nouveaux-arrivants de se former sur le fonctionnement de la politique américaine pour être en mesure d'empêcher des développements similaires à ceux qui avaient amené le gouvernement au pouvoir en Allemagne (Autorisation : Institut  Leo Baeck – New York | Berlin)
    1er noivembre 1938 : "Protestation dans les urnes". Un éditorial paru dans Aufbau (un journal juif de New York) avait vivement demandé aux nouveaux-arrivants de se former sur le fonctionnement de la politique américaine pour être en mesure d'empêcher des développements similaires à ceux qui avaient amené le gouvernement au pouvoir en Allemagne (Autorisation : Institut Leo Baeck – New York | Berlin)
  • 2 décembre 1938 : "Kindertransport". Suite à la nuit de Cristal, des organisations confessionnelles, au Royaume-Uni, avaient fait pression pour permettre l'entrée d'enfants juifs comme réfugiés. Le gouvernement britannique avait donné la permission d'émettre des visas et de faciliter l'entrée de 10 000 enfants dans le pays. En un laps de temps très court, des familles d'accueil avaient été recrutées, des dons réclamés, des billets de transports achetés, des visas de transit mis en place  (les enfants étaient venus via Hoek van Holland). Le premier groupe était arrivé le 2 décembre. (Autorisation : Institut Leo Baeck – New York | Berlin)
    2 décembre 1938 : "Kindertransport". Suite à la nuit de Cristal, des organisations confessionnelles, au Royaume-Uni, avaient fait pression pour permettre l'entrée d'enfants juifs comme réfugiés. Le gouvernement britannique avait donné la permission d'émettre des visas et de faciliter l'entrée de 10 000 enfants dans le pays. En un laps de temps très court, des familles d'accueil avaient été recrutées, des dons réclamés, des billets de transports achetés, des visas de transit mis en place (les enfants étaient venus via Hoek van Holland). Le premier groupe était arrivé le 2 décembre. (Autorisation : Institut Leo Baeck – New York | Berlin)

Au début de l’année, les élèves d’Adam Steinmetz, un professeur du collège de Fremont, une ville de l’Ohio, ont publié un journal. Mais au lieu de contenir des histoires locales, nationales ou internationales d’aujourd’hui, il présentait des « nouvelles » d’Allemagne remontant à 1938.

Adam Steinmetz a utilisé cet exercice d’écriture comme un moyen d’immerger ses élèves de cinquième dans cette année décisive pour la communauté juive dans l’Allemagne dirigée par les nazis.

Une approche susceptible de les aider à comprendre le désespoir croissant des Juifs à l’époque face aux persécutions toujours plus fortes, et d’autre part, des perspectives d’émigration dont l’horizon ne cessait de s’obstruer.

Pour montrer à ses élèves la rapidité de la détérioration de la situation quotidienne pour les Juifs allemands et autrichiens en 1938, Adam Steinmetz a fait une sélection à partir de 365 documents. Il a trouvé ces derniers sur le site « 1938 Projekt : Publications du passé » – une initiative en ligne présentée en anglais et en allemand par le LBI (Institut Leo Baeck).

L’Institut Leo Baeck constitue le registre le plus significatif et vaste de ressources et d’études sur les communautés juives d’Europe centrale au cours des cinq derniers siècles. L’institut est installé à New York et à Berlin, et 30 % de son budget provient du gouvernement allemand.

3 mai 1938 : « Ségrégation au jardin d’enfants ». Wilhelm Hesse, père d’Eva Hesse — qui allait devenir l’une des artistes américaines les plus célèbres du 20e siècle – avait rédigé un journal pour ses filles. « Les temps sont devenus très graves. Nous sommes déprimés et abattus, et il y a donc peu de plaisir et d’envie d’écrire et de prendre des photos avec autant de recherche qu’autrefois », écrit-il. (Autorisation : Institut Leo Beck – New York | Berlin)

Tous les jours, en 2018, le projet a été l’occasion de télécharger un document, une photo ou autre artefact personnel – ou créé – correspondant à la même date en 1938, il y a quatre-vingt ans. Ces documents ont été choisis parmi les millions de pages numérisées dans les archives du LBI et dans celles d’autres organisations partenaires.

Ces publications ont été largement partagées sur différentes plateformes de réseaux sociaux, avec pour objectif principal de cibler une audience plus jeune. Adam Steinmetz, enseignant de 36 ans, a expliqué avoir eu connaissance de ce projet via Twitter.

La même année, une exposition parallèle a été organisée au centre d’histoire juive de New York, et une exposition itinérante a été présentée en Allemagne.

Le projet s’est déroulé en 2018 avec pour but de coïncider avec la 80e commémoration annuelle des événements de 1938 – année charnière pour la communauté juive allemande. Elle avait commencé par l’Anschluss autrichien, s’était achevée avec la nuit de Cristal, et avait aussi été marquée par la conférence d’Evian qui avait gravement sapé la possibilité pour les réfugiés juifs d’émigrer vers des cieux plus sûrs.

Mais la pertinence du projet va finalement bien au-delà du 80e anniversaire de la Kristallnacht.

Le docteur William Weitzer, directeur exécutif de l’Institut Leo Baeck (Autorisation de l’institut Leo Baeck – New York | Berlin)

Le directeur exécutif du LBI, le docteur William H. Weitzer, dit au Times of Israel qu’il estime que le « 1938 Projekt » a l’étoffe nécessaire pour faire revivre aux jeunes générations les événements survenus il y a huit décennies.

« On tente de toucher les gens avec des histoires personnelles. Les chiffres ne parlent pas au cœur comme c’est le cas d’une lettre écrite par une fillette de 11 ans ou des pages sorties d’un album de famille. Ce sont des invitations à en savoir toujours davantage », commente le Dr Weitzer.

Małgorzata Bakalarz-Duverger, directrice des programmes universitaires du Centre d’histoire juive, a développé les contenus pédagogiques du « 1938 Projekt » et organise des ateliers de travail pour les présenter à des enseignants travaillant avec des élèves de collèges et au-delà. Elle prône avec ferveur l’approche micro-historique adoptée dans le « 1938 Projekt », où les apprentis découvrent un sujet en l’abordant par le biais de récits personnels.

« Nous utilisons le personnel pour nous ouvrir sur l’universel et l’historique et pour permettre de créer des liens avec le présent », explique Małgorzata Bakalarz-Duverger.

Des situations personnelles dures et toujours pertinentes

Pour les auteurs du « 1938 Projekt », l’objectif poursuivi n’a pas seulement été l’étude de la Shoah mais également la nécessité de mettre en exergue des leçons plus générales sur les menaces d’autoritarisme planant sur la démocratie, sur la crise des réfugiés et autres sujets brûlants en lien avec le monde d’aujourd’hui.

Adam Steinmetz explique qu’il a espéré, à travers son projet, que ses élèves, qui suivent de près les informations sur les migrants et les demandeurs d’asile à la frontière sud des Etats-Unis, puissent parvenir à rattacher la situation difficile vécue par les réfugiés juifs allemands aux événements qui se déroulent actuellement.

Le 16 juin 1938 : « Se rassurer à bon compte ». La jeune enseignante viennoise Erika Langstein, qui subit les persécutions des Juifs dans la capitale autrichienne depuis déjà quelques mois, envoie une lettre à Donald Biever, citoyen américain, l’implorant de l’aider, ainsi que son père, à fuir le pays en leur donnant une attestation sur l’honneur. Langstein avait brièvement rencontré Biever à une unique occasion, lors d’un voyage en train, un an auparavant (Autorisation : Leo Baeck – New York)

Une lettre de quatre pages écrite par Erika Langstein, une professeure d’anglais de 19 ans originaire de Vienne, le 16 juin 1938, à un Américain nommé Donald Biever est un document accessible pour les élèves, même jeunes, qui parviennent à le comprendre et à s’y identifier.

Dans ce courrier, l’enseignante demande à l’Américain de l’aider à la faire sortir d’Autriche, ainsi que son père. Dans un anglais parfait, Erika Langstein (dont la mère disparue n’était pas juive) explique à Donald Biever qu’à la suite de l’Anschluss, trois mois auparavant, les biens de son père – un banquier à la retraite – ont été saisis par les nazis et que leur situation était de plus en plus dure. Elle supplie son destinataire de leur fournir des attestations sur l’honneur pour appuyer leur demande d’émigration aux Etats-Unis.

De nombreux Juifs allemands et autrichiens souffrant des persécutions croissantes des nazis avaient soumis de telles requêtes à leurs proches et à des amis vivant aux Etats-Unis. Pour sa part, Erika Langstein, désespérée, connaissait à peine Donald Biever. Elle l’a rencontré à une seule occasion – au mois de mars 1937, à bord d’un train – et n’a plus jamais eu de contact avec lui depuis. Elle a glissé une photo d’elle pour permettre à son correspondant de l’identifier.

« C’est très difficile de vous écrire parce que je suis presque certaine que vous n’avez aucune idée de qui je suis… Je ne sais pas ce qui va arriver, mais je sais qu’il faut que nous partions… Je vous en prie, tentez de nous venir en aide », écrit-elle.

12 juillet 1938 : « Homonymes ». Kurt Kleinmann de Vienne et Helen Kleinman de New York ne se sont jamais rencontrés. Après que Kurt a eu l’idée d’entrer en contact avec une famille portant un nom similaire à New York, espérant que ces homonymes américains accepteront de lui donner une attestation sur l’honneur, s’ensuit une correspondance de plus en plus intense entre le jeune homme et la fille des Kleinman. (Autorisation : Institut Leo Baeck – New York | Berlin)

Dans un cas qui n’est pas très différent, Kurt Kleinman, un Viennois de 28 ans diplômé en droit, trouve l’adresse d’une famille Kleinman à New York. Même s’il n’a aucune relation avec ces Américains, il leur écrit pour les supplier de lui faire une attestation sur l’honneur. Heureusement, les Américains répondent et se réfèrent à lui dans leur correspondance ultérieure comme leur « cousin ».

Outil d’éducation

Selon la doctoresse Patricia Heberer Rice, historienne au musée du mémorial de la Shoah aux Etats-Unis, le projet parvient à transmettre les sentiments d’incertitude croissante et d’anxiété ressentis par les Juifs allemands et autrichiens, qui tentaient alors de se frayer un chemin dans le labyrinthe bureaucratique pour pouvoir fuir le pays, tout en subissant des agressions et une marginalisation qui allaient crescendo.

Au mois d’avril 1938, les Juifs avaient été forcés d’enregistrer leurs biens, et leurs commerces avaient été aryanisés. Des vagues de violences et des émeutes anti-juives secouaient l’Autriche.

Cette année-là, un quart des Juifs allemands étaient déjà partis. Le pic d’émigration avait eu lieu à la fin de l’année 1938, à la suite des pogroms de la Nuit de cristal, du 9 au 10 novembre, qui avaient marqué un changement dans les moyens utilisés par les nazis pour persécuter les Juifs, passant des lois et des décrets à l’extrajudiciaire.

1er décembre 1938 : « Dernier recours : l’émigration ». Des extraits d’un rapport de l’émissaire du groupe Joint Distribution Committee en Allemagne, George Rooby, qui avait traversé plusieurs villes pour recueillir des impressions directes. Sa conclusion était sans équivoque : le seul espoir d’échapper aux violences était l’émigration (Autorisation : Institut Leo Baeck – New York | Berlin)

Pour Małgorzata Bakalarz-Duverger, les ressources fournies par le « 1938 Projekt » sont déterminantes pour saisir la portée de ces événements historiques majeurs.

« Ces sources tissent un récit complexe et dramatique de cette époque qui n’est pas concevable si on se contente de regarder les grands tournants de l’histoire au sens large », explique-t-elle.

« Ces registres originaux peuvent donner vie à l’histoire, qui peut tout à coup s’échapper du papier pour dépeindre des êtres humains réels qui menaient de vraies existences. Ils peuvent transmettre des émotions, des combats, des célébrations qui nous offrent un narratif qui va bien au-delà des noms et des dates », note Cynthia Peterman, chargée de l’éducation aux Archives nationales de College Park, dans le Maryland, et enseignante au sein du musée du mémorial de la Shoah américain à Washington.

23 décembre 1938 : »Bureaucratie sans empathie ». Réponse standard de la part du chef de la division des visas du département d’Etat Eliot B. Coulter à Alice Rice de Virginia Beach, qui avait tenté de faciliter la venue de ses parents tchèques. La loi sur l’immigration de 1917 incluait de nombreux prérequis pour l’immigration, notamment économiques – auxquels les Juifs allemands ne pouvaient pas répondre, les nazis ayant saisi tous leurs avoirs ( Autorisation : Institut Leo Baeck – New York | Berlin)

Cynthia Peterman explique avoir été impressionnée par la variété des documents sélectionnés pour le « Projekt 1938 ». Ils vont de papiers personnels ou communautaires ayant appartenu ou ayant été écrits par des Juifs à des documents nazis, en passant par des documents officiels américains liés à la politique d’immigration restrictive mise en place aux Etats-Unis.

« Les documents américains sont très importants pour essayer de répondre à la question souvent posée sur la raison des difficultés rencontrées par les réfugiés juifs tentant de venir en Amérique », estime Cynthia Peterman.

Małgorzata Bakalarz-Duverger (Crédit : Facebook)

Les enseignants doivent apporter aux élèves les éléments nécessaires pour travailler avec ce type de ressources brutes et, à moins que ces élèves ne soient lycéens ou étudiants d’université, il est probablement indispensable de donner un contexte à ces documents.

Toutefois, selon Małgorzata Bakalarz-Duverger, c’est parfois une bonne chose que les élèves puissent se plonger dans ces documents sans trop de présentation préalable.

« De manière paradoxale, les élèves sont plus ouverts, ils approfondissent plus et ils trouvent des significations et des liens inattendus. Ils font même des analyses plus réfléchies parce qu’ils n’ont pas d’idées préconçues : ils remarquent des choses que certains ne remarquent pas en connaissant le contexte », dit-elle.

« 1938 Projekt » comprend une fonction de recherche par mot-clé ainsi qu’une chronologie toute entière des persécutions nazies à l’encontre des Juifs et de leur consolidation du pouvoir – ainsi qu’un rappel précis et détaillé des grands événements mondiaux qui ont pu nuire aux possibilités d’émigration de la communauté. Chaque document original, sur le site, contient un titre et une explication relativement courte.

Ce qui manque néanmoins, c’est la connaissance du destin ultime des individus liés à ces documents. Par exemple, il est impossible de découvrir ce qui est arrivé à Erika Langstein et à son père ou si Donald Biever a jamais répondu à la missive désespérée de la jeune femme.

20 décembre 2038 « L’émigration, la condition de la libération ». L’ingénieur en électricité viennois Ernst Aldor a été arrêté en emprisonné à Buchenwald le 10 novembre. Il ne pouvait être libéré que si Renée, son épouse, pouvait prouver qu’ils avaient reçu la permission d’émigrer dans une autre pays (Autorisation : Institut Leo Baeck – New York | Berlin)

Le projet est dépourvu du recul historique que nous avons acquis aujourd’hui vis-à-vis de 1938. Aujourd’hui, nous savons quelle a été l’ampleur de la Shoah et de la destruction des communautés juives européennes, mais ceux qui faisaient face aux persécutions nazies, cette année-là, et tentaient de les fuir ignoraient encore ce qui allait arriver.

« Tenter de partir prend du temps, du travail, de l’argent. On ne peut pas emmener avec soi sa profession. Il faut laisser ce qu’on a derrière soi, sa culture et sa langue. Dans certains cas, les gens ne pouvaient pas partir à cause de parents malades ou handicapés », explique le Dr Rice, notant pourquoi certains Juifs pouvaient ne pas avoir aperçu les signes avant-coureurs de la catastrophe à temps – ou ne pas les voir du tout.

« Nous ne montrons pas l’avenir. L’idée, c’est que les gens puissent suivre l’histoire de ce qui est arrivé en 1938 en temps réel, ressentir ce qu’était le quotidien de ceux qui étaient en train de vivre cette année-charnière dans la destinée de la communauté juive allemande », note le directeur de l’Institut Leo Baeck.

5 décembre 1938 : « Patrie ingrate ». Le vétéran de la Première guerre mondiale Otto Anker, blessé au combat, pensait que sa croix de fer et son épouse non-juif lui permettraient d’être épargné. Il avait refusé l’appel lancé par ses fils de les rejoindre en exil. Son commerce a finalement été aryanisé et ses papiers d’identité flanqués d’un « J ». (Autorisation : Institut Leo Baeck – New York | Berlin)

Le docteur Jeffrey Ellison, professeur d’études de la Shoah à l’école Bernard Zell Anshe Emet de Chicago, prévoit d’utiliser ces documents écrits par « des citoyens juifs moyens piégés dans le tourbillon d’événements qui devaient marquer cette année-là… inconscients du destin indicible qui allait les attendre ».

« Dans un certain sens, le projet offre un journal quotidien de 1938, écrit non pas par un seul auteur, comme celui d’Anne Frank, mais à partir de sources multiples. Et le journal offre donc de nombreuses facettes complexes… Je ne connais pas d’autre projet lié à la Shoah qui se soit penché sur le sujet de cette manière », commente Jeffrey Ellison.

Les plans de cours de Małgorzata Bakalarz-Duverger, d’Adam Steinmetz et autres éducateurs sont disponibles sur le site internet « 1938 Projekt ». Le LBI est toujours en quête de documents.

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