Le barreau convoque l’avocat des Netanyahu à une audience disciplinaire
Yossi Cohen a un mois pour répondre à la plainte avant de faire face à une possible punition
Raoul Wootliff est le correspondant parlementaire du Times of Israël
L’association du barreau israélien (IBA) a décidé lundi de convoquer l’avocat de Sara Netanyahu pour une audience disciplinaire après des remarques faites la semaine dernière diffamant une juge.
Dans sa plainte contre l’avocat Yossi Cohen, l’avocat du système juridique a déclaré que les commentaires de Cohen à l’égard de la juge Dita Proginin en réponse à son jugement contre l’épouse du Premier ministre le mois dernier étaient « sévères et irresponsables ».
L’IBA et l’Autorité judiciaire de l’Etat ont rabroué Cohen, associé de longue date de la famille Netanyahu, la semaine dernière pour sa série de déclarations contre Proginin, la présidente de la Cour nationale du travail, suggérant qu’elle avait été influencée par une campagne contre Sara Netanyahu.
« Des déclarations comme celles-ci sont inacceptables et doivent être dénoncées et combattues », avait déclaré la semaine dernière l’association.
De même, l’Autorité judiciaire avait publié un communiqué qualifiant les commentaires d’ « irresponsables », et déclaré qu’elle prévoyait de porter plainte contre Cohen avec le barreau.
Dans une lettre adressée à Cohen et publiée dimanche, le comité d’éthique a écrit que ses remarques étaient une infraction claire au code d’éthique de l’association du barreau, qui envisagerait une action disciplinaire à son encontre. Il lui a été donné 30 jours pour soumettre sa réponse au comité d’éthique de l’organisation.
Mardi dernier, Proginin avait accordé 120 000 shekels (28 500 euros) de dédommagement à un employé de la résidence officielle du Premier ministre Benjamin Netanyahu, jugeant que Sara Netanyahu l’avait maltraité, avec des abus verbaux et des demandes déraisonnables.
Dans son jugement, Proginin a décrit le comportement de Mme Netanyahu envers son employé comme « déraisonnable et humiliant ».
Dans un communiqué publié juste après le jugement, Cohen avait rejeté la décision et annoncé que l’affaire avait été « traitée de manière unilatérale ».
« Le vrai traitement abusif est celui de la juge Proginin qui, comme attendu, a manifestement à nouveau ignoré le témoignage de Mme Netanyahu », a-t-il déclaré, annonçant que son équipe ferait appel du jugement.
Interrogé mardi soir par la Deuxième chaîne sur ses remarques, Cohen a redoublé ses critiques, disant que Proginin « n’a pas présidé l’affaire de manière juste ».
« Un effort concerté d’endoctrinement [contre Sara Netanyahu] et un effort quotidien pour salir son nom avec des affirmations trompeuses au cours des années a clairement perverti le jugement de certaines personnes », a-t-il déclaré.
L’Autorité judiciaire a défendu mercredi Proginin et déclaré qu’elle était « repoussée par les remarques sévères et irresponsables ».
Un communiqué à la formulation est sans précédent publié par l’institution étatique, qui représente les juges et tribunaux du pays, a déclaré que les commentaires de Cohen faisaient « partie d’un effort visant à intimider les tribunaux en ce qui concerne l’affaire de la résidence du Premier ministre. »
Le communiqué annonçait que l’Autorité judiciaire porterait plainte avec l’IBA.
L’association, qui n’a pas d’autorité légale pour prendre des mesures disciplinaires à l’encontre des avocats pour des raisons éthiques, a déclaré qu’elle ne tolèrerait pas de tels propos à l’égard d’un juge.
« L’incitation [à la haine] et la diffamation à l’égard [de Proginin], qui n’a aucun moyen de répondre, ne peuvent pas être acceptées », a-t-elle déclaré.
« L’association du barreau israélien joue un rôle essentiel dans un état de droit et par conséquent se sent dans l’obligation de protéger le système judiciaire et de s’opposer aux déclarations qui dépassent les frontières de la critique acceptable », concluait la lettre. Elle ne faisait pas mention d’action disciplinaire.
Répondant aux critiques, Cohen a écrit mercredi une rétractation, dont il a demandé qu’elle soit distribuée à la presse par le bureau du Premier ministre, déclarant qu’il n’avait pas l’intention d’offenser personnellement Proginin.
« Mes critiques du tribunal étaient concentrées sur le processus judiciaire spécifique qui nuit aux droits de Mme Netanyahu en l’empêchant de présenter des témoins… Je suis désolé si mes mots ont été compris différemment », a-t-il écrit.
La ministre de la Justice Ayelet Shaked, invitée mercredi de la radio militaire, a refusé de commenter directement les propos de Cohen mais a déclaré qu’elle ne pensait pas que « la critique personnelle d’un juge est acceptable dans un pays démocratique ».
« Les juges en Israël sont indépendants et travaillent conformément à la loi. On peut être en désaccord avec un jugement particulier, comme je l’ai moi-même été, mais la critique ne devrait pas être dirigée envers un juge en particulier », a-t-elle déclaré.
Effi Naveh, président de l’association du barreau, a déclaré mercredi sur la radio militaire que Cohen devrait s’excuser personnellement auprès de la juge Proginin.
Cohen avait précédemment déposé une demande pour écarter Proginin de la présidence de l’affaire en raison du fait qu’elle avait déjà tranché en défaveur de Sara Netanyahu en mars dans un autre cas d’abus d’employé.
« L’avis de la cour est déjà fait », avait écrit Cohen dans sa demande, suggérant que Proginin ne jugerait pas équitablement Netanyahu.
Dans cette précédente affaire, Proginin avait accordé à l’ancien concierge de Netanyahu, Menny Naftali, la somme de 170 000 shekels (40 500 euros) de dédommagements, acceptant son accusation de mauvais traitement par Mme Netanyahu pendant qu’il était employé à la résidence du Premier ministre.
L’état avait rejeté la demande de Cohen.