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Le mansaf, plat national jordanien devenu symbole de paix et d’hospitalité

Le plat puiserait ses racines dans une guerre ancestrale où les exigences casher ont été mises à rude épreuve pour tester la loyauté d'un peuple

Une illustration du plat jordanien Mansaf (Crédit : capture d'écran YouTube)
Une illustration du plat jordanien Mansaf (Crédit : capture d'écran YouTube)

Plat national jordanien, le mansaf est un concentré d’histoire et de saveurs : il trouve ses origines dans une guerre ancestrale, est devenu un symbole de paix et d’hospitalité, et figure depuis l’an passé sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco.

Le mansaf est composé essentiellement de viande de mouton cuite dans du Jameed – yaourt séché à base de lait de brebis – et servi sur un lit de riz déposé sur un morceau de pain fin, le tout agrémenté de noix ou d’amandes.

C’est le « roi de la table jordanienne », lance fièrement Achraf al-Moubaidin, 47 ans et heureux propriétaire d’un restaurant traditionnel à Amman.

« Si vous souhaitez honorer votre invité, rien ne vaut le mansaf », s’exclame son associé, Tamer al-Majali, 42 ans, qui perpétue la tradition ancestrale de le servir dans un grand plat commun.

Ce plat est un « symbole célèbre et important qui évoque un profond sentiment d’identité et de cohésion sociale », relève pour sa part l’Unesco.

Traditionnellement partagé pour marquer la fin des querelles tribales, le mansaf a vu le jour à la veille d’une bataille, selon certains historiens. Au creuset de l’histoire jordanienne, le mansaf puiserait ses racines dans une guerre ancestrale où les exigences casher ont été mises à rude épreuve pour tester la loyauté d’un peuple.

Au IXe siècle avant l’ère commune, le roi Mesha du royaume de Moab, qui régnait sur la rive orientale de la mer Morte et faisait face à une guerre imminente contre le royaume d’Israël, a voulu sonder la fidélité de ses sujets, comme le relate l’historien George Tareef.

Conscient que « la Torah interdisait aux Juifs de manger de la viande avec du lait », il ordonna à ses troupes de concocter une version rudimentaire du plat avant la bataille, selon l’historien.

Dans la capitale jordanienne, l’établissement des deux associés porte le nom de « Mansef Moab », un clin d’œil au royaume éponyme.

Servi tant lors de banquets de mariage que de repas familiaux, le plus populaire des plats jordaniens a subi de nombreuses transformations, et aujourd’hui, il ne ressemble en rien aux tests d’allégeance du souverain Mesha.

Une « évolution qui résulte des conditions économiques et agricoles », raconte ainsi le chercheur Hassan al-Moubaidin, 58 ans, attablé dans un restaurant d’Amman.

Vêtu d’un élégant Keffieh rouge, il souligne que le riz a remplacé le pain et le blé concassé, permettant de nourrir davantage d’âmes avec moins de ressources. Mais les manifestations de générosité sont restées intactes.

« Il existe des rituels spécifiques et des protocoles d’hospitalité qui entourent le mansaf, comme la manière de saluer les invités, l’ordre dans lequel ils sont servis, la disposition de la tête de l’animal et la façon de dire au revoir », explique-t-il.

Traditionnellement, il se partage dans de larges plats entre une douzaine de convives, qui utilisent uniquement leur main droite tandis que la gauche est placée derrière le dos.

Les coutumes évoluent, et aujourd’hui, les assiettes et couverts individuels sont souvent préférés.

Zeina Elyan, 14 ans, préfère suivre l’ancienne tradition : partageant un mansaf avec ses camarades de classe, cette élève se dit fière de ce symbole national dont elle énumère volontiers les bienfaits sur la santé.

Son enseignante, Duha Saleh, confie avoir emmené ses élèves au restaurant pour leur enseigner la « culture sociale » liée au plat. « Il y a un plaisir à se connecter à notre authenticité et notre patrimoine », lance-t-elle.

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