Le négociateur palestinien s’en prend à l’envoyé américain par médias interposés
Pour Greenblatt, les "propos erronés" d'Erekat "n’ont pas permis de s’approcher d’un processus de paix", les USA refusent de discuter de choses concrètes, selon le Palestinien

Un haut-responsable palestinien a accusé dimanche le négociateur chargé du Moyen Orient de l’administration Trump de répéter les opinions de la droite israélienne et de refuser de proposer quelque chose de conséquent à la table des négociations.
Le dernier volet de la guerre des articles d’opinion entre Saeb Erekat et Jason Greenblat après que l’envoyé spécial au Moyen Orient s’en est pris au négociateur palestinien, indiquant qu’il devait se retirer. Greenblatt a mis en evidence les frustrations des deux parties face aux efforts de paix moribonds.
L‘article d’opinion d’Erekat publié dans Haaretz dimanche soir, accusait Greenblatt d’employer un discours emprunté aux dirigeants de l’extrême-droite israélienne.
« Ce n’est pas la rhétorique d’un responsable américain chargé de soutenir les efforts de paix dans la région », a-t-il dit.
« Dans les dizaines de rencontres que nous avons eues avec M. Greenblatt, il a refusé de discuter de l’essentiel, des frontières, des implantations, de la solution à deux états. Aujourd’hui, son rôle se résume à patauger dans les politiques israéliennes face à une communauté internationale sceptique, puis de se vexer quand on le lui fait remarquer », a écrit Erekat.
Dimanche matin, Greenblatt a répliqué que « les fausses accusations » d’Erekat et son discours n’ont pas permis de s’approcher d’un processus de paix. Il réagissait à un article d’opinion daté du 17 mai et publié dans Haaretz, accusant les responsables américains d’être les « porte-paroles » d’Israël et de critiquant les États-Unis pour le transfert de leur ambassade à Jérusalem.
Cet échange survient alors que l’administration Trump doit dévoiler incessamment sous peu un plan de paix entre Israël et les Palestiniens, que Trump a qualifié d’ « accord ultime ».
Greenblatt a écrit que les propos d’Erekat « était erronés à plusieurs égards ».

Erekat a condamné le transfert de l’ambassade américaine, soulignant qu’il s’est déroulé simultanément aux violences à la frontière avec Gaza, à quelque 70 kilomètres. Le jour de l’ouverture de l’ambassade à Jérusalem, on estime que 59 personnes ont été tuée à Gaza, durant un rassemblement organisé par le groupe terroriste islamiste du Hamas. Il s’est ensuite avéré que la plupart des morts étaient membres de groupes terroristes.
L’usage par Israël de moyens létaux durant ces émeutes hebdomadaires ont déclenché la critique internationale. Israël accuse le Hamas de se servir des émeutiers comme boucliers humains pendant qu’ils tentent de commettre des attaques, et affirme qu’il défend sa souveraineté à la frontière et les communautés installées à proximité.
Erekat a écrit que le contraste entre les deux évènements « démontre avec justesse le déni israélien et américain à l’histoire de l’expropriation palestinienne ».
Greenblatt a répliqué dimanche. « Pendant trop longtemps, les États-Unis ont fait la sourde oreille face à ces propos, mais ignorer des termes haineux et faux n’ont pas amené la paix, et ne le fera pas à l’avenir », a-t-il écrit.
« Même si certains émeutiers étaient pacifiques, nombre d’entre eux étaient violents. En réalité, comme l’a admis le Hamas lui-même, plus de 80 % des morts étaient des agents [du groupe]. »
Il a réaffirmé les propos tenus par Trump au sujet de Jérusalem, à savoir que les frontières de la souveraineté israélienne dans la ville seront déterminées par des négociations de paix et que les États-Unis soutiennent le statu quo au mont du Temple, un lieu saint pour Juifs et Musulmans.
Les Palestiniens ont considéré cette décision comme une façon de s’aligner avec Israël sur l’une des questions les plus épineuses du conflit israélo-palestinien, et affirment que cela disqualifie les Palestiniens de leur rôle historique de médiateur au Moyen Orient.
Israël a pris le contrôle de Jérusalem Est, lieu qui abrite des sites sacrés du judaïsme, de l’islam et du christianisme, durant la guerre des Six Jours en 1967. Les Palestiniens revendiquent les quartiers de Jérusalem Est comme capitale de l’état auquel ils aspirent, tandis qu’Israël considère l’ensemble de la ville comme sa capitale éternelle.
La question de Jérusalem est une question d’ordre émotionnel au cœur du conflit.
« L’idée qu’Israël disparaitra, ou que Jérusalem n’en soit pas la capitale, est une illusion. L’idée que les États-Unis ne soient pas un interlocuteur critique dans le processus de paix est une illusion », a écrit Greenblatt.
Les responsables américains ont indiqué que l’administration prévoit de dévoiler son plan de paix d’ici fin juin, peu après la fin du mois sacré du Ramadan. Ils affirment que le gendre et conseille de Trump Jared Kushner et Greenblatt ont déjà commencé à briefer certains alliés et partenaires de certains éléments de la proposition.
Cependant, la perspective d’un intérêt palestinien pour un plan de paix s’amenuise. Les pourparlers sont gelés depuis 2014, et les Palestiniens ont peu de confiance envers l’administration Trump, qu’ils jugent partiale, en faveur d’Israël.
Greenblatt a écrit qu’au cours des 16 derniers mois, il a entendu de nombreux Palestiniens qui se distancent des positions d’Erekat, mais qui « ont peur de parler publiquement », et semblent insinuer qu’ils souhaitent son éviction.
« Docteur Erekat, nous avons entendu votre voix pendant des années, et elle n’a pas permis de parvenir à quoi que ce soit qui se rapproche des aspirations palestiniennes ou d’un accord de paix. D’autres perspectives palestiniens pourraient nous aider à enfin parvenir à un accord de paix qui permettrait aux Palestiniens et aux Israéliens de vivre mieux », écrit Greenblatt.