Le Ramadan se fête en ligne grâce à la Bibliothèque nationale d’Israël
Un mois entier de visites virtuelles, de conférences, de performances, d'ateliers et de services créés pendant la crise du coronavirus
Jessica Steinberg est responsable notre rubrique « Culture & Art de vivre »
Célébrer une fête est devenu compliqué à l’ère du coronavirus et le Ramadan, le mois sacré musulman qui se terminera le 23 mai, a lui aussi connu son lot de difficultés.
Cette année, la Bibliothèque nationale d’Israël a aidé à lancer une initiative numérique qui permettra de fêter le Ramadan et d’offrir à ceux qui connaissent mal ses pratiques l’opportunité de comprendre la richesse et les valeurs de la culture islamique.
Le projet, baptisé « Les nuits du Ramadan depuis Jérusalem », est né d’une collaboration qui a rassemblé les plus importantes institutions, corps religieux et organisations de terrain communautaires. Son objectif est d’offrir une expérience du Ramadan – une expérience qui pourra se vivre en arabe, en hébreu ou en anglais.
Tandis que le programme a pour ambition de mieux faire connaître la culture musulmane en général et le Ramadan en particulier, la plateforme offrira, cette année – au vu des mesures de distanciation sociales mises en place par la crise du coronavirus – des événements en ligne pour ceux qui se trouvent dans l’incapacité de prendre part aux prières traditionnelles, rassemblements familiaux et autres manifestations publiques qui sont habituellement au cœur de la fête.
Les événements seront diffusés en direct, enregistrés et ultérieurement disponibles à la demande. Ils comprendront des conférences, des discussions, des visites virtuelles de musées locaux qui permettront de découvrir des expositions liées à la culture et à l’histoire de l’islam. Il y aura aussi des récitations et des prières traditionnelles musulmanes, des conversations intimes dans des foyers de Jérusalem, des concerts, des ateliers culinaires, des programmes spéciaux pour les enfants et même un calendrier du Ramadan qui expliquera la signification lunaire de la période.

Le programme avait été prévu avant le coronavirus et a adopté son format numérique dans le cadre de la crise, explique Raquel Ukeles, conservatrice des collections Islam et Moyen-Orient au sein de la Bibliothèque nationale.
Cela faisait plusieurs années qu’elle réfléchissait à une telle initiative, aux côtés de Nadim Sheiban, directeur du musée d’art islamique de Jérusalem. Longtemps frustrés par le manque de reconnaissance de la richesse et des valeurs de la culture islamique en Israël, les deux partenaires désiraient faire quelque chose pour remédier à cela, et le Ramadan semblait être le moment idéal pour une telle démarche.
« On parle beaucoup de la santé, de l’éducation et de l’emploi dans le secteur arabe, mais l’idée est que les Arabes et les musulmans sont issus d’une culture intellectuelle vaste… Et elle a très peu de place en Israël aujourd’hui », regrette Raquel Ukeles. « Dans notre monde, dans la société israélienne, l’ignorance semble entraîner le mépris ».
La Bibliothèque nationale n’est pas la première à avoir songé à rassembler tous les citoyens autour du Ramadan, continue la conservatrice. D’autres initiatives ont été lancées dans le passé à Jérusalem, notamment par le YMCA et le Kehillat Zion, une synagogue communautaire locale et pluraliste.

Parmi les autres organisations qui participent aux « Nuits du Ramadan », un mélange d’institutions majeures et de plus petites associations de terrain : la bibliothèque de la mosquée Al-Aqsa, le Dar Assalam pour la présentation de l’islam, le musée d’Israël, le YMCA international de Jérusalem, les groupes Kids 4 Peace et Kulna Jerusalem, le musée d’Art islamique, la Bibliothèque nationale de Jérusalem et le musée de la Tour de David.
« Cela permet de créer un espace sécurisé pour les Juifs curieux, qui aimeraient voir, mais qui n’oseraient pas entrer dans une mosquée », explique Raquel Ukeles. « Cela donne une ouverture ».
D’autres événements viendront s’ajouter au cours des prochains jours et seront présentés en différents langages : certains seront disponibles en arabe, d’autres en anglais et d’autres encore en hébreu.
« Le coronavirus a donné la motivation aux Israéliens de faire des choses », a constaté Raquel Ukeles. « Ce sont les petites expérimentations que nous avons entreprises qui nous font nous en rendre compte, nous avons le sentiment que c’est la voie à suivre ».