Les autorités reconnaissent l’impact « terrible » des violences policières à Al-Aqsa
Le chef de la police admet qu'il y a eu "un petit excès de force" ; le gouvernement envisage d'interdire aux juifs l'accès au mont du Temple jusqu'à la fin du Ramadan
Des responsables israéliens ont déploré dimanche un incident survenu la semaine dernière, durant lequel la police a été filmée pénétrant dans la mosquée Al-Aqsa de Jérusalem, sur le mont du Temple, où on la voit frapper des émeutiers palestiniens. Un responsable aurait déclaré que cette intervention avait porté un « grave préjudice » au pays.
Le chef de la police israélienne, Kobi Shabtai, aurait lui-même admis que les policiers n’auraient pas dû frapper les Palestiniens lors de l’incident.
Dans une rare interview accordée à la chaîne publique Kan, Shabtai a néanmoins défendu la décision de la police d’entrer dans la mosquée dans la nuit de mardi à mercredi pour ce qu’elle a qualifié d’opération visant à réprimer les émeutes. Des Palestiniens masqués avaient stocké des pierres, des pétards et des engins explosifs improvisés, qu’ils semblaient compter utiliser contre les visiteurs juifs sur le site.
Les émeutiers présumés auraient peut être également stocké des bombes artisanales pour les utiliser contre les forces de sécurité, a rapporté Ynet dimanche soir, ajoutant que le Shin Bet enquêtait sur ces informations « compliquées ».
Shabtai a déclaré lors de l’interview que des forces supplémentaires avaient été nécessaires pour maîtriser les quelque 400 émeutiers qui s’étaient barricadés à l’intérieur de la mosquée avec des armes ce matin-là.
Les images de la police frappant des Palestiniens au cours de l’incident ont suscité une vive indignation dans le monde arabe, et des groupes terroristes les ont utilisées pour appeler à des attaques contre Israël.
הפלסטינים מדווחים – שוטרים עם אלות מכים מתפללים ללא אבחנה באלות ובנשק, אחרי שנכנסו למסגד. pic.twitter.com/QZooMwaXsk
— Deiaa haj yahia-ضياء حاج يحيى (@DeiaaHaj) April 4, 2023
Par ailleurs, Israël a indiqué, dans un article paru dimanche, qu’il maintiendrait probablement sa politique de longue date qui interdit aux Juifs de se rendre sur le mont du Temple pendant les dix derniers jours du ramadan, en dépit de la ligne dure adoptée par le nouveau gouvernement, qui compte dans ses rangs des ministres importants qui militent depuis longtemps en faveur de l’autorisation de la prière juive sur le lieu saint.
La question s’est posée ces derniers jours de savoir si la politique allait changer, et le ministre de la Sécurité nationale d’extrême droite, Itamar Ben Gvir, a publié samedi une déclaration dans laquelle il se dit opposé à la fermeture du site aux juifs, comme le recommande l’establishment de la sécurité.
Ben Gvir a qualifié la fermeture de « capitulation devant le terrorisme » et a imputé à tort cette politique au gouvernement précédent. Le mont du Temple était fermé aux visiteurs Juifs pendant le Ramadan bien avant la coalition Bennett-Lapid, au pouvoir pendant les fêtes de Pessah l’année dernière. Cette politique était déjà en vigueur pendant le précédent mandat du Premier ministre Benjamin Netanyahu.
Ben Gvir continue, néanmoins à faire pression pour que les Juifs soient autorisés à se rendre sur le site pendant au moins l’un des dix derniers jours du Ramadan. Le ministre souhaite autoriser les visites le mercredi, dernier jour de Pessah, selon un reportage de la Douzième chaîne.
La période du Ramadan est très souvent marquée par des violences et de fortes tensions, en particulier lorsque la fête qui dure un mois coïncide avec la fête de Pessah. La mosquée Al-Aqsa est visitée par des dizaines de milliers de fidèles tout au long du mois, ce qui entraîne régulièrement un regain de tensions et de violences avec Israël.
Le mont du Temple, connu des musulmans sous le nom de Haram al-Sharif, est le site le plus sacré pour les juifs, car il abritait les anciens temples, et le troisième lieu saint de l’islam. Les tensions sur le mont du Temple ont contribué à la flambée de violence de la semaine dernière, au cours de laquelle trois personnes ont été tuées dans des attaques terroristes palestiniennes présumées et où des salves de roquettes ont été tirées sur Israël à partir du Liban, de la Syrie et de la bande de Gaza.
Dans l’interview accordée à Kan, Shabtai a rappelé que les deux premières semaines du Ramadan s’étaient déroulées de manière relativement pacifique et a accusé les extrémistes d’avoir attisé les tensions.
« La plupart des gens viennent ici pour prier et jouir de la liberté de culte, mais malheureusement une poignée de jeunes a réussi à enflammer la zone et nous avons réagi en conséquence », a-t-il déclaré.
Bien que les Palestiniens qui s’étaient barricadés à l’intérieur de la mosquée étaient munis de pierres et de pétards, Shabtai a reconnu que les policiers avaient fait un usage « un peu excessif » de la force.
« Est-ce que je suis satisfait en voyant les images qui ont été filmées ? Non. Nous enquêtons sur l’incident, nous en tirerons des leçons, nous allons comprendre ce qui s’est passé, mais à la fin, ce que les gens ont vu, c’est un bref instant d’une scène plus complexe où un très grand nombre d’officiers sont entrés et ont fait preuve de respect lors de l’incident », a déclaré Shabtai.
Un haut responsable israélien anonyme a tenu des propos similaires sur la Douzième chaîne, déclarant que les images de la police frappant les Palestiniens avaient porté un « grave préjudice » à Israël.
Le responsable a déclaré que, après avoir reçu des informations selon lesquelles plusieurs centaines de Palestiniens avaient stocké des armes à l’intérieur en vue de les utiliser contre les civils israéliens et les forces de sécurité, la police n’avait pas eu d’autre choix que d’entrer dans la mosquée.
Le haut fonctionnaire a néanmoins reconnu que la police était allée trop loin en frappant les Palestiniens comme elle l’a fait, et a déclaré que cela avait contribué à légitimer les allégations concernant la menace qui pèse sur Al-Aqsa, à galvaniser les adversaires d’Israël et à nuire de manière significative à la réputation d’Israël sur la scène internationale.
Le haut fonctionnaire a ajouté que la conduite des officiers devait être réexaminée car ils avaient reçu l’ordre préalable d’agir avec retenue.
Un autre responsable de la sécurité a souligné à la chaîne 12 que le Waqf islamique, soutenu par la Jordanie, qui administre le mont du Temple, ne prenait pas suffisamment de mesures pour réprimer les émeutiers palestiniens. Israël et le Waqf ont eu des différends ces derniers jours, le Waqf ayant refusé les appels d’Israël à prendre des mesures contre les troubles potentiels sur le site.
La chaîne 12 a également rapporté dimanche, en citant des sources au sein des services de sécurité, qu’au cours des dernières semaines, il y aurait eu trois fois plus de signaux interceptés indiquant des projets d’attaques terroristes que pendant la même période l’année dernière.
Samedi, un reportage de la chaîne indiquait que Ben Gvir et Shabtai s’étaient affrontés au sujet de l’interdiction pour les visiteurs juifs de se rendre sur le mont du Temple pendant les derniers jours du Ramadan.
Selon le reportage, Shabtai serait favorable à interdire les visiteurs juifs. Ben Gvir, qui assure la supervision de la police en tant que ministre de la Sécurité nationale, s’est heurté à plusieurs reprises à Shabtai depuis qu’il a pris ses fonctions.
Dimanche matin, les visiteurs juifs ont été autorisés à se rendre sur le mont du Temple, quelques heures après qu’un certain nombre de Palestiniens se sont barricadés à l’intérieur de la mosquée Al-Aqsa pendant la nuit, alimentant les craintes initiales d’affrontements.
La police aurait décidé de ne pas pénétrer dans le bâtiment au petit matin de dimanche, pour éviter de nouvelles scènes de violence et tout débordement potentiel.
Selon la chaîne 12, la police a reconnu que les personnes barricadées à l’intérieur « n’avaient pas apporté avec elles le genre d’objets » qui auraient pu provoquer un incident violent, et elles ont été « évacuées » au petit matin « dans un calme relatif » alors que les visiteurs juifs du mont commençaient à arriver.
Une fois les prières de l’aube terminées, la police a ouvert l’accès à l’enceinte sensible aux visiteurs juifs, sous bonne garde et par groupes d’environ 20 personnes.
Selon un groupe militant du mont du Temple, il y aurait eu 842 visiteurs juifs dimanche, et 1 041 au total pendant les vacances de Pessah – ce qui représente une augmentation de 43 % du taux moyen de visites juives.
Certains fidèles musulmans présents sur le site ont interpellé les visiteurs juifs, mais aucun acte de violence n’a été signalé.
Israël a promis à plusieurs reprises de maintenir le statu quo sur le site, selon lequel les juifs sont autorisés à le visiter – sous de nombreuses restrictions et seulement pendant des heures limitées – mais pas à y prier.
De plus en plus de Juifs sont autorisés à prier sur le site, alors que les Palestiniens alimentent la violence sur le site et se réservent de plus en plus d’endroits pour prier.