Levin fustige les « propagandistes », rejette une loi pour protéger les journalistes
Le ministre de la Justice s'en prend à la Douzième et à la Treizième chaînes, déclare que les médias israéliens sont pires que ceux d'un régime totalitaire
Le ministre de la Justice Yariv Levin a attaqué mercredi deux des plus importantes chaînes de télévision israéliennes, lors d’une discussion sur un projet de loi destiné à assurer une protection aux journalistes.
« Ce sont des propagandistes qui font de la propagande, cela n’a rien à voir avec du journalisme », a déclaré Levin à propos des Douzième et Treizième chaînes, les deux principales chaînes d’information commerciales grand public.
C’est la dernière attaque en date contre les médias de la part d’un membre important de la coalition du Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui accuse depuis longtemps la presse de partialité, la dépeignant comme un bastion de la gauche de mèche avec les autorités qui tentent d’écarter le Likud du pouvoir.
Les journalistes ont défendu leur travail et condamné les critiques, accusant les hommes politiques d’encourager les agressions à leur égard.
La législation à l’étude, proposée par le député Idan Roll (Yesh Atid), prévoit des peines plus sévères pour les attaques contre les journalistes.
Levin a déclaré qu’il ne soutiendrait pas la législation de Roll. « Je vous suggère de venir exiger une véritable liberté de la presse ici [en Israël] (…) et non la diffusion de propagande flagrante », a-t-il déclaré. Levin a affirmé que l’atmosphère médiatique en Israël est « pire que ce qui existe dans les pays totalitaires ».
« Là-bas, les gens savent que les émissions ne sont que pure propagande politique. Ici, cela se fait sous le couvert de journalisme professionnel », a-t-il poursuivi.
S’adressant à la presse, Levin a déclaré : « Pour qui pensez-vous travailler ? Personne ne croit [vos] histoires ».
Les propos du ministre de la Justice ont été condamnées par le Conseil de la presse israélienne (IPC), qui a déclaré que ce dernier donnait son feu vert aux attaques contre les journalistes qui ne suivent pas la ligne du gouvernement.
« Nous regrettons que le ministre de la Justice d’Israël traite ainsi ceux sans lesquels une véritable démocratie ne peut exister, alors même que les tentatives de nuire aux journalistes se multiplient », a déclaré l’IPC.
Le mois dernier, une équipe de journalistes qui faisait un reportage à Tel Aviv a été agressée au gaz poivré par un homme qui les a appelés Al-Jazeera, faisant écho à un tweet d’un ministre du gouvernement qui a fulminé contre un titre mal formulé qui semblait accuser Netanyahu d’avoir ordonné des frappes aériennes sur des femmes et des enfants.
Au moment des faits, le ministre des Communications Shlomo Karhi, qui voulait renforcer la Quatorzième chaîne, résolument pro-Netanyahu, au détriment de ses rivales, avait décrié les attaques contre les journalistes. « La violence ne peut pas être utilisée et les émissions ne peuvent pas être perturbées, même si elles vous déplaisent. Cela n’est tout simplement pas acceptable. La seule façon d’influer sur les reportages tendancieux et biaisés dans les médias est d’utiliser la télécommande », a-t-il déclaré.
Fin avril, lors d’un grand rassemblement de la droite exhortant le gouvernement à reprendre le processus législatif de sa réforme largement controversée du système judiciaire, une bouteille en verre a été lancée sur les journalistes de la Treizième chaîne qui couvraient la manifestation, les manquant de peu.
Un mois plus tôt, avant un autre rassemblement de droite, une équipe de la Treizième chaîne avait été attaquée par des membres du groupe d’extrême droite La Familia, envoyant le reporter Yossi Eli à l’hôpital pour une côte cassée et des dommages présumés à la rate, et blessant à la tête le caméraman Avi Cashman. À la suite de cette attaque, la chaîne a déclaré qu’elle fournirait aux équipes de journalistes deux gardes du corps lorsqu’elles couvriraient les manifestations liées à la législation controversée.
Mardi, des centaines de manifestants ont organisé une manifestation houleuse devant le domicile de Levin, en promettant d’intensifier les protestations contre l’avancement d’un projet de loi visant à limiter le pouvoir de la Cour Suprême de Justice en matière de révision des décisions du gouvernement.
La police a arrêté six des manifestants qui ont brûlé des pneus et tenté de bloquer la route à Modiin, la ville natale de Levin, provoquant des échauffourées lorsque certains manifestants ont essayé d’empêcher les voitures de patrouille de la police de partir.
Levin a par la suite publié une déclaration ferme dans laquelle il affirmait que « par chance ou par miracle », les manifestants n’avaient mis le feu à aucun des appartements de son immeuble, et semblait accuser la police d’avoir été intentionnellement lente à réagir.