Maher qualifie le BDS de « saleté de test de pureté »; Tlaib appelle à son boycott
La membre du Congrès a déclaré que le mouvement anti-Israël est "centré sur l'égalité et la liberté", après que l'animateur TV a dénoncé le mouvement et sa vision "superficielle"
JTA — Fille d’immigrés palestiniens, ex-avocate, la démocrate Rashida Tlaib ne siège au Congrès américain que depuis janvier mais s’est déjà fait un nom à coups de polémiques autour d’Israël et de ses appels, parfois tonitruants, à destituer Donald Trump.
Mais ce samedi, elle a appelé au boycott de l’émission du comédien Bill Maher, « Real Time », diffusée sur HBO, après qu’il a qualifié le mouvement Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS) contre Israël de « saleté de test de pureté ».
Tlaib a déclaré dans un tweet qu’elle est « lasse des types qui discréditent une forme d’expression centrée sur l’égalité et la liberté ».
Aux côtés de la deuxième élue musulmane du Congrès, la démocrate Ilhan Omar, Rashida Tlaib a fait la semaine dernière la Une des médias internationaux lorsqu’Israël a refusé d’autoriser leur visite sur son territoire.
Toutes deux ont été accusées par certains d’antisémitisme, en raison notamment de leur soutien à la campagne internationale de boycott d’Israël.
« Le BDS est une saleté de test de pureté pour les gens qui veulent se montrer « alerte » mais qui, en réalité, ont dormi pendant les cours d’histoire », a déclaré Maher dans son émission de vendredi soir.
Maybe folks should boycott his show.
I am tired of folks discrediting a form of speech that is centered on equality and freedom. This is exactly how they tried to discredit & stop the boycott to stand up against the apartheid in S. Africa. It didn't work then and it won't now. https://t.co/Oa49ZVfrVN
— Rashida Tlaib (@RashidaTlaib) August 17, 2019
« Je pense que c’est très superficiel de penser que les Juifs en Israël sont majoritairement blancs et que les Palestiniens sont majoritairement marrons, et donc ils sont forcément innocents et les Juifs ont forcément tort », a-t-il ajouté. « Comme si l’occupation avait surgi de nulle part, que ce peuple ‘totalement pacifique’ s’est retrouvé occupé. Et c’est sans parler des intifadas et les attentats-suicides et les roquettes et les je-ne-sais-combien de guerres. »
Maher a cité le fondateur du BDS, Marwan Barghouti, qui affirmait que « aucun Palestinien, aucun Palestinien rationnel, pas un Palestinien vendu, n’acceptera d’Etat juif en Palestine » et a demandé pourquoi cela n’était pas relayé dans les médias américains.
https://youtu.be/-EHlj5nAxJM
« La membre du Congrès Omar dit des choses du genre « tout tourne autour des Benjamins« , « Israël hypnotise le monde » et « Puisse Allah réveiller le peuple et les aider à voir le mal que fait Israël ». Elle s’est excusée pour cela, mais c’est dit : les Juifs contrôlent le monde, contrôlent l’argent. Je peux comprendre qu’elles ne soient pas accueillies en héroïnes » en Israël, a-t-il conclu.
La mère de Maher est juive, et il se revendique publiquement comme étant à moitié juif.
Rashida Tlaib, farouche opposante de Trump et critique d’Israël
Se décrivant comme une « guerrière progressiste », Rashida Tlaib est âgée de 43 ans.
Née à Detroit dans une famille palestinienne, Rashida Tlaib est la première élue au Congrès américain d’origine palestinienne ainsi que l’une des deux premières femmes musulmanes à siéger à la Chambre des représentants.
Déjà, en 2009, elle fut la première musulmane à siéger à l’Assemblée de l’Etat du Michigan.
Estimant que le boycott est « un droit et une partie de notre combat historique pour la liberté et l’égalité », Tlaib a défendu son soutien à ce mouvement, rejetant toute accusation d’antisémitisme.
Elle défend en outre la solution d’un seul Etat pour Israéliens et Palestiniens, ce qui lui vaut également des critiques.
« Séparés tout en étant égaux ne marche pas », avait-elle expliqué en citant l’exemple de la lutte contre la ségrégation aux Etats-Unis, dans un entretien accordé au site In These Times en 2018.
Appel virulent à destituer Trump
Après plusieurs retournements, Rashida Tlaib a finalement annoncé vendredi qu’elle renonçait à rendre visite à sa grand-mère, Muftia, en Cisjordanie, en dénonçant les « conditions oppressives » imposées, selon elle, par Israël.
« Lorsque j’ai remporté l’élection pour siéger au Congrès américain, de nombreux Palestiniens, surtout ma grand-mère, ont eu un sentiment d’espoir, l’espoir d’avoir enfin une voix. Je ne peux pas laisser le gouvernement israélien (…) utiliser mon profond désir de voir ma grand-mère, peut-être pour la dernière fois, comme un levier politique », a-t-elle expliqué.
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Aînée d’une famille de 14 enfants, mère de deux enfants, Rashida Tlaib évoque souvent avec fierté sa famille, racontant son enfance modeste à Detroit, bastion de l’automobile du nord des Etats-Unis où les hivers sont redoutables.
« Ses deux jeunes fils sont à l’origine de sa passion indéfectible pour aider à améliorer la vie » des gens, est-il écrit sur son site officiel.
En 2018, alors qu’elle était avocate pour une organisation oeuvrant à la défense des « pauvres et des travailleurs », elle avait fait campagne sur un programme progressiste en l’emportant aisément dans sa circonscription, un bastion démocrate où les républicains n’avaient pas présenté de candidat.
Dès sa campagne puis à Washington, elle n’a cessé d’appeler à lancer une procédure de destitution contre Donald Trump, parfois dans des termes virulents.
Elle avait ainsi fait scandale quelques heures seulement après avoir prêté serment au Congrès en lâchant devant des proches, lors d’une soirée célébrant sa victoire : « Nous allons destituer ce fils de pute ! ».
Largement relayée, la vidéo de ce moment avait provoqué l’indignation du camp républicain, Donald Trump lui-même dénonçant des propos « honteux ».
« Elle s’est déshonorée et (…) a déshonoré sa famille », avait déclaré le républicain.
Déjà, lors de la campagne présidentielle de 2016, Rashida Tlaib avait apostrophé Donald Trump en pleine conférence à Detroit… mais dans des termes plus policés, avant d’être expulsée de la salle.
« J’ai dit à Trump que ‘nos enfants méritent mieux que cela’ et je lui ai demandé de leur donner un meilleur exemple. Je l’ai supplié de lire la Constitution américaine », avait-elle expliqué dans le journal Detroit Free Press.
Face aux critiques qui avaient jugé ce comportement « inapproprié », elle avait répondu : « Je trouve inapproprié que les Américains ne s’élèvent pas contre le discours et les tactiques emplis de haine de Trump ».