Mahmoud Abbas s’attaque aux groupes terroristes au nord de la Cisjordanie
À Tubas, l'Autorité palestinienne est déterminée à contredire ses nombreux sceptiques, mais serait peu susceptible de lever l'emprise des groupes terroristes palestiniens sur la Cisjordanie

Dans la ville de Tubas, en Cisjordanie, l’Autorité palestinienne (AP) a arrêté des terroristes prêts à en découdre avec Israël et à remettre en cause son autorité, afin de montrer qu’elle peut contribuer à façonner l’avenir des Palestiniens après la guerre contre le groupe terroriste palestinien du Hamas dans la bande de Gaza.
Le dirigeant de l’AP, Mahmoud Abbas, a déployé des forces à Tubas dans le but avoué de mettre fin à l’anarchie et de priver Israël de prétextes pour lancer des raids sur la ville.
Ses adversaires, le Hamas et le groupe terroriste Jihad islamique palestinien, affirment que l’AP sert les intérêts d’Israël à un moment où ce dernier s’en prend à leurs éléments en Cisjordanie alors qu’ils combattent Israël à Gaza, ce qui ne fait qu’accentuer les vieilles divisions entre Abbas et les groupes terroristes.
Les habitants de Tubas ont déclaré que les affrontements entre les terroristes et l’AP ce mois-ci ont impliqué des mitrailleuses lourdes et des bombes dans le cadre d’une des pires manifestations de violence dont ils se souviennent.
Cette situation met en évidence la position précaire de l’AP, créée par les Accords d’Oslo de 1993 avec Israël, en tant que tremplin vers un État palestinien en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.
La solution dite des deux États semble plus éloignée que jamais, bien qu’elle soit revenue récemment sur le devant de la scène internationale comme moyen d’instaurer la paix. Israël se méfie toutefois d’Abbas et de l’AP, qu’il accuse d’incitation au terrorisme dans son système scolaire et de verser des allocations aux terroristes emprisonnés et aux familles des terroristes tués.

La faction laïque du Fatah d’Abbas a également présenté récemment ses condoléances pour le « martyre » du chef du Hamas, Yahya Sinwar, saluant comme « un grand leader national » l’instigateur du pogrom perpétré par le groupe terroriste palestinien du Hamas le 7 octobre 2023, au cours duquel quelque 6 000 Gazaouis dont 3 800 terroristes dirigés par le Hamas ont pris d’assaut le sud d’Israël, tué plus de 1 200 personnes, principalement des civils, enlevé 251 otages de tous âges – commettant de nombreuses atrocités et perpétrant des violences sexuelles à grande échelle.
Dans le cadre de la guerre contre le Hamas à Gaza, Israël a également lancé plusieurs raids antiterroristes en Cisjordanie, en particulier dans le nord. L’armée israélienne a arrêté quelque 5 250 Palestiniens recherchés en Cisjordanie, dont plus de 2 050 affiliés au Hamas.
Selon le ministère de la Santé de l’AP, plus de 716 Palestiniens de Cisjordanie ont été tués au cours de cette période. Tsahal affirme que la grande majorité d’entre eux étaient des terroristes armés tués lors d’échanges de tirs, des émeutiers qui se sont heurtés aux troupes ou des terroristes qui menaient des attaques.
L’AP, basée à Ramallah, a contrôlé la bande de Gaza jusqu’en 2007, jusqu’à ce que le Hamas a férocement chassé les forces loyales à Abbas. Elle est désormais confinée à la gestion de certaines parties de la Cisjordanie, souvent en coordination avec les forces de sécurité israéliennes, qui contrôlent le territoire.
Les États-Unis ont exprimé leur souhait de voir la guerre contre le Hamas se terminer par l’unification de la bande de Gaza et de la Cisjordanie sous l’égide d’une Autorité palestinienne réformée et revitalisée.
Pour Abbas, 88 ans, la campagne de Tubas vise en partie à affaiblir l’emprise du Hamas et du Jihad islamique palestinien sur le nord de la Cisjordanie, dans ce que son Fatah considère comme une tentative soutenue par l’Iran de saper sa position, selon des responsables du Fatah et des sources de sécurité.
Il s’agit également de réfuter les critiques qui considèrent l’AP comme inefficace – une réputation qui a éclipsé les contacts diplomatiques menés par les États-Unis sur le rôle qu’elle pourrait éventuellement jouer à Gaza, selon un ancien responsable de la sécurité de l’AP et un analyste.
Un porte-parole du Département d’État américain s’est refusé à tout commentaire sur l’opération de Tubas, mais a indiqué que la coopération américaine en matière de sécurité avec l’AP comprenait un financement, une formation et de l’équipement.

Le gouverneur de Tubas, Ahmed al-Asaad, a déclaré que l’AP avait décidé de frapper d’une « main de fer » ce qu’il a décrit comme l’anarchie et le désordre.
Deux membres de la sécurité de l’AP ont été blessés lorsque leurs forces ont combattu les éléments du « Bataillon de Tubas », un groupe terroriste dominé par le Jihad islamique palestinien, et ont arrêté au moins trois de ses terroristes, dont son chef.
L’impasse
Ahmed al-Asaad a déclaré que l’AP répondait aux préoccupations de la population, citant l’exemple d’une bombe qui avait été récemment placée près d’une école – vraisemblablement en préparation d’une attaque contre les troupes israéliennes.
« Nous ne voulons pas – sous le slogan de la résistance [nom que se donnent les groupes terroristes anti-Israël] ou sous tout autre slogan – détruire notre pays et détruire Tubas », a-t-il affirmé.
« Notre approche est claire, tout comme celle du président : l’approche de la résistance pacifique et populaire et la sauvegarde de la sécurité et de l’ordre », a-t-il déclaré lors d’une interview accordée à l’agence Reuters.
L’AP a remanié ses activités dans divers domaines, ce qui a permis d’apaiser certaines des inquiétudes exprimées par les pays fournisseurs d’aide.
Dans l’ensemble, l’effort de revitalisation a été « plutôt bien accueilli », a indiqué un diplomate européen.

Samedi, des dizaines d’agents de sécurité de l’AP ont encerclé un bâtiment près de Tubas où deux terroristes du Bataillon de Tubas étaient retranchés, l’un d’entre eux, Obada al-Masri, menaçant de se faire exploser, a déclaré une source au fait de l’incident.
« Nous avons négocié avec lui pendant près de cinq heures », a raconté son père, Abdel Majid al-Masri, qui avait été appelé sur les lieux pour aider à convaincre son fils de se rendre.
Il a indiqué que son fils avait fini par accepter après avoir reçu la garantie qu’il serait détenu à Tubas plutôt que dans une autre prison de l’AP où il avait déjà été incarcéré et où il avait subi des mauvais traitements.
Masri s’est dit soulagé que son fils ait été placé sous la garde de l’AP plutôt que tué par les soldats israéliens, qui ont également effectué des raids à Tubas à la recherche de terroristes et qui avaient déjà emprisonné son fils pendant trois ans.

Son fils avait choisi « la voie de la lutte pour libérer la Palestine », a-t-il affirmé, rejetant les accusations de l’AP selon lesquelles les terroristes de ce bataillon étaient engagés dans l’anarchie.
Le Jihad islamique palestinien a condamné l’opération, déclarant que les forces de l’AP semblaient chercher à éliminer la « résistance » à Israël et que leurs méthodes n’étaient pas différentes.
Des fruits à portée de main
Lorsque Reuters s’est rendu à Tubas cette semaine, les forces de sécurité de l’AP étaient fortement déployées, avec un point de contrôle sur une route menant à la ville, qui s’est avérée être calme.
Ghaith al-Omari, expert des affaires de l’AP à l’Institut de Washington pour la politique du Proche-Orient, a déclaré que la campagne de Tubas était une tentative bien nécessaire de l’AP pour s’affirmer dans une partie de la Cisjordanie où son contrôle avait été « quasi-nul ».
« L’AP comprend que personne ne la considère comme capable de gérer Gaza et tout le monde cite le fait qu’elle ne peut même pas gérer le nord de la Cisjordanie », a déclaré Omari, qui a conseillé Abbas et son prédécesseur, Yasser Arafat.
« Mais une opération ne fait pas une réputation », a ajouté Omari, en soulignant que Tubas représentait un « fruit à portée de main » et que le Hamas et le Jihad islamique palestinien y ont moins d’influence qu’à Jénine, un véritable bastion du terrorisme palestinien et également situé dans le nord de la Cisjordanie.
Avec le soutien des États-Unis, les forces de sécurité de l’AP, fortes de
35 000 hommes, ont été reconstituées après la prise de contrôle de Gaza par le groupe terroriste palestinien du Hamas en 2007.

Cependant, l’Institut de Washington a déclaré dans une note politique de juillet que pour que l’AP puisse assumer la gouvernance à Gaza, elle aurait besoin d’un recrutement, d’un équipement, d’un contrôle et d’une formation approfondis, un processus qui, selon lui, prendrait des années.
Israël, qui accuse l’AP de soutenir le terrorisme, a également rejeté l’idée d’une gouvernance de l’AP à Gaza.
Tout en refusant de commenter le rôle potentiel des forces de sécurité de l’AP dans la Gaza d’après-guerre, le porte-parole du Département d’État américain a réaffirmé qu’une paix durable à Gaza « doit inclure une gouvernance dirigée par les Palestiniens et une unification de Gaza avec la Cisjordanie sous l’égide de l’Autorité palestinienne ».
En Cisjordanie, le principal problème est que les forces de sécurité de l’AP sont « vraiment, vraiment impopulaires dans le nord », a déclaré Omari.
Un sondage d’opinion réalisé en septembre a montré que 89 % des Palestiniens de Cisjordanie souhaitent la démission d’Abbas et que le Hamas y bénéficie d’un soutien plus important que le Fatah. Les sondages du Palestinian Center for Policy and Survey Research ont toujours montré que Marwan Barghouti, un dirigeant du Fatah emprisonné par Israël pour de multiples meurtres, remporterait tout vote présidentiel.
« Pour assurer une sécurité efficace, il faut à la fois des capacités, mais aussi de la crédibilité et de la légitimité », selon Omari.
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