Pays-Bas : Polémique alors que le gouvernement vend des pièces de F-35 à Israël
Amsterdam a également annoncé mercredi l’envoi d’un navire militaire vers Chypre, où il sera prêt à apporter une éventuelle aide humanitaire à Gaza
Les Pays-Bas ont reçu une commande de pièces détachées d’avion F-35 d’Israël à la mi-octobre, a rapporté le quotidien néerlandais NRC.
Informée de cette commande, l’administration du ministère des Affaires étrangères aurait mis en garde contre la transaction, avertissant que la guerre à Gaza, déclenchée après l’assaut terroriste du Hamas le 7 octobre contre le sud d’Israël, pourrait violer les lois de la guerre. La ministre des Affaires étrangères, Hanke Bruins Slot, et celle au Commerce extérieur, Liesje Schreinemacher, n’ont néanmoins pas bloqué la commande et ont donné leur feu vert à l’exportation des pièces d’avions.
Par la livraison de la commande, effectuée auprès de l’entrepôt régional européen de F-35, situé sur la base aérienne de Woensdrecht, le gouvernement des Pays-Bas aurait voulu maintenir ses bonnes relations avec Israël et les États-Unis, fournisseurs du F-35.
Alors que le ministère des Affaires étrangères explique aujourd’hui que le gouvernement débattait de l’idée de soumettre des « livraisons spécifiques » du programme F-35 à des « contrôles supplémentaires », la livraison a suscité l’indignation de députés et de juristes, a rapporté NRC.
« Malgré les avertissements, [le gouvernement] continue de fournir des pièces [de F-35] à Israël par peur de nuire aux relations avec Israël et les États-Unis. Incroyable », a écrit le député socialiste Jasper van Dijk sur X. Il dénonce le fait que les « contrôles supplémentaires » n’ont été annoncés qu’après la commande de la mi-octobre et les révélations de NRC.
« Les Pays-Bas doivent partir du principe que tout ce qu’ils fournissent sera utilisé dans des frappes aériennes disproportionnées, sans faire de distinction entre les civils et les combattants du Hamas. Les Pays-Bas contribuent sciemment à des crimes de guerre », a déclaré Liesbeth Zegveld, professeur de droit international à l’université d’Amsterdam.
Comme ailleurs, la guerre entre Israël et le Hamas cause aux Pays-Bas de larges divisions dans la société et accentue le clivage politique. Si les partis de droite soutiennent en majorité le droit d’Israël à la légitime défense, ceux de gauche appellent à un cessez-le-feu et dénoncent des crimes de guerre.
En 2022, Israël a importé des Pays-Bas dans le cadre du programme F-35 des pièces pour un montant total de 2,3 millions d’euros.
Entre 2004 et 2020, les Pays-Bas ont refusé à 29 reprises un permis d’exportation de biens militaires vers Israël, car les commandes allaient à l’encontre de la politique étrangère néerlandaise.
Le Premier ministre néerlandais Mark Rutte rencontrera cette semaine le Premier ministre Benjamin Netanyahu pour la deuxième fois depuis le début de la guerre, après des réunions à Doha visant notamment à aider dans la libération des otages du Hamas.
Les Pays-Bas ont également annoncé mercredi l’envoi d’un navire militaire vers Chypre, où il sera prêt à apporter une éventuelle aide humanitaire à Gaza. Le patrouilleur côtier MS. Holland doit partir mi-novembre et arrivera dans la région d’ici la fin du mois, a indiqué un responsable de la marine néerlandaise. « Il s’agit en réalité plutôt d’un prépositionnement au cas où une aide humanitaire ou des évacuations seraient nécessaires », a précisé auprès de l’AFP Alex Kranenburg.
« Aucune décision n’a encore été prise », a-t-il insisté, expliquant qu’il « faudra d’abord créer certaines conditions préalables ».
L’île de Méditerranée orientale tente de mettre en place un couloir maritime humanitaire afin de fournir une aide au territoire palestinien.
Le Premier ministre Mark Rutte était par ailleurs en déplacement en Israël pour une deuxième rencontre avec Benjamin Netanyahu en quelques semaines.
Lors cet échange, Mark Rutte a déclaré aux médias néerlandais avoir appelé son homologue israélien à « montrer que ce qu’il fait est (…) proportionné ».
Selon M. Rutte, Israël ne s’oppose pas « par avance » à l’envoi d’aide humanitaire vers la bande de Gaza, mais ne veut pas que les marchandises soient utilisées à des fins terroristes, ont rapporté ces médias.
M. Rutte s’était dans la matinée entretenu avec les autorités qataries. Cette conversation « a soulevé un certain nombre de questions » qu’il a voulu partager avec M. Netanyahu, avait-t-il précisé auprès du média public NOS.