Peretz Amar : Les manifestations anti-refonte doivent se dérouler dans le calme
Alors que la conduite de la police suscite des inquiétudes, le nouveau chef du district de Tel Aviv s'excuse pour des "photos inappropriées" montrant des violences policières
Le nouveau chef de la police de Tel Aviv a déclaré mardi que les manifestations contre la refonte judiciaire devraient se dérouler dans le calme, alors que les accusations de violence à l’encontre de la police se multiplient depuis le début de son mandat. De son côté, le chef de la police israélienne Kobi Shabtaï tente de rassurer les habitants de la ville blanche en assurant qu’il n’y a pas eu de changement de politique.
Shabtaï a démenti les affirmations de certains activistes selon lesquelles les actions des forces de l’ordre sont devenues plus violentes ces dernières semaines sous l’influence du ministre d’extrême-droite de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir, qui a exigé à plusieurs reprises une répression plus stricte à l’égard des manifestants. Ben Gvir est aussi à l’origine du départ du chef de la police de Tel Aviv, Amichaï (Ami) Eshed, qui s’est publiquement opposé aux demandes de Ben Gvir avant de donner sa démission des forces de l’ordre le mois dernier après plus de trente ans de service.
Peretz Amar, qui a donc remplacé Eshed, a commenté les images de policiers qui ont fait un usage excessif de la force contre des manifestants opposés à la refonte judiciaire du gouvernement.
« Je suis désolé pour ces photos inappropriées. Aucun des policiers ne voulait ces photos », a déclaré Amar lors d’une cérémonie de passation des pouvoirs des hauts responsables des forces de l’ordre dans le sud du pays.
« Les policiers travaillent tous les samedis [lors des manifestations] sous une chaleur terrible, dans des conditions insupportables. Des groupes militants ont attaqué les policiers. La manifestation aurait dû se dérouler dans le calme », a-t-il tenté de justifier.
Amar a déclaré qu’il permettrait aux manifestations d’avoir lieu, mais que la police agirait contre les « petits groupes de manifestants violents ».
« La police agit selon des principes qui lui sont dictés à l’avance. Il n’y a pas de marge de manœuvre pour un commandant de district. Chaque manifestation a deux côtés : le côté qui veut protester et le côté qui veut être libre de ses mouvements et de ses activités », a déclaré Amar.
« Les manifestations sont autorisées, et j’aiderai à ce qu’elles aient lieu, mais il y a des petits groupes qui créent un violent chaos. Ils descendent sur Ayalon [autoroute de Tel Aviv] et jettent des pierres sur les policiers. L’autoroute Ayalon doit rester ouverte, mais ce n’est pas une ligne rouge », a-t-il déclaré.
Shabtaï aurait décidé lundi que l’adjoint d’Eshed, David Filo, serait également transféré au poste de chef-adjoint du district central.
Selon les médias israéliens, il sera remplacé par Meïr Eliyahu, commandant de la Garde nationale et ancien haut responsable de la police des frontières.
Lors de la même cérémonie mardi, également en présence de Ben Gvir, Shabtaï a déclaré qu’il n’y avait pas eu de changement de politique à l’égard des manifestations en cours.
« Je veux rassurer les habitants de Tel Aviv en leur disant qu’il n’y a pas de changement de politique. Elle n’a pas changé », a déclaré Shabtaï. « Nous comprenons que nous sommes destinés à servir de brise-lames pour tous les maux de l’État d’Israël. Notre tâche consiste à préserver la démocratie. »
Shabtaï a affirmé que le chaos qui régnait lors des récentes manifestations était dû à « davantage d’incidents violents sur le terrain qui ont nécessité un recours accru à la force ».
« Nous avons agi avec sensibilité pendant les 30 semaines de manifestations. Dès que le niveau de violence augmente, nous agissons conformément à la loi », a-t-il déclaré.
« Si quelqu’un s’écarte des normes acceptées, nous enquêterons. Nous ne sommes pas au-dessus de la loi », a déclaré Shabtaï sans doute en référence aux cinq officiers faisant l’objet d’une enquête pour avoir fait un usage excessif de la force contre des manifestants opposés à la refonte judiciaire du gouvernement.
Parallèlement, des affrontements ont eu lieu à l’extérieur d’un poste de police de Jaffa mardi, lorsque deux figures clés des manifestations ont été convoquées pour être interrogées.
Amitaï Aboudi, un jeune homme de 18 ans qui aurait été agressé par un policier après avoir été menotté lors d’une manifestation la semaine dernière, est arrivé au poste pour être interrogé.
Moshe Radman, le chef du groupe de protestation représentant le secteur de la high-tech, a été convoqué au même poste et a déclaré qu’il n’avait pas été informé de la raison de sa convocation.
Une personne a été arrêtée pour avoir apparemment attaqué et blessé un officier de police, a déclaré la police. L’officier a été soigné à la main sur les lieux. Trois autres personnes ont été arrêtées pour tapage au-delà d’un niveau considéré comme raisonnable, a indiqué la police dans un communiqué.
Selon une déclaration ultérieure des groupes de protestation, Radman a été interrogé parce qu’il avait été vu tenant une fusée éclairante lors d’une manifestation samedi.
Cependant, l’avocat de Radman, Me Gonen Ben Itzhak, a déclaré que le leader de la manifestation avait pris la fusée des mains d’un autre manifestant qui la tenait de manière dangereuse, et que l’interrogatoire était « une tentative de harcèlement et de persécution inutiles de la part de la police, une continuation directe de la campagne de délégitimation contre le mouvement ».
Dans un communiqué, le groupe de protestation Kaplan Force a déclaré qu’il ne pensait pas que c’était une coïncidence que Radman ait été convoqué pour être interrogé au moment où Amar était assis avec Ben Gvir lors de la cérémonie de passation des pouvoirs.
« Si le nouveau chef de Tel Aviv pense faire ce qu’Ami Eshed n’était pas prêt à faire, c’est-à-dire casser des têtes et traquer les leaders de la protestation, et qu’il pense que cela se passera tranquillement, il commet une grave erreur », peut-on lire dans la déclaration.
Radman a été détenu à plusieurs reprises, souvent pour des raisons restées obscures.
Dans une déclaration, Radman a fait remarquer que des fusées éclairantes sont souvent allumées lors de matchs de football et de manifestations, sans conséquence sur le plan légal.
La police a déclaré qu’Aboudi avait essayé d’interférer avec les tentatives des officiers de dégager les manifestants de l’autoroute Ayalon après que le gouvernement a adopté le premier texte de loi de son programme largement controversé de refonte judiciaire.
La semaine dernière, le chef de l’unité de patrouille spéciale Yasam de la police de Tel Aviv, Yaïr Hanuna, a été vu sur des images largement diffusées en train de donner un coup de poing à Aboudi, alors que le jeune homme de 18 ans avait déjà été menotté. La famille du jeune homme a déposé une plainte contre Hanuna auprès du Département des enquêtes internes de la police (PIID) du ministère de la Justice après l’incident.
הי @10elilevi
אמיתי בריליאנט בן 18 מוסר ד"ש pic.twitter.com/3e9tYk7ePy— יוסי מזרחי Yossi Mizrachi (@yosimiz1) July 25, 2023
Dans la vidéo de l’arrestation d’Aboudi, on le voit frappé et traîné par un groupe de policiers sur l’autoroute Ayalon à Tel Aviv. Sur une photo de la scène, on peut voir Hanuna apparemment souriant alors qu’il est supposé être en train de frapper Aboudi. La police a nié que Hanuna ait frappé le jeune homme après qu’il eut été maîtrisé.
Radman et Aboudi ont tous deux été relâchés plus tard dans l’après-midi de mardi.
פרסום: מפקד יס"מ תל אביב, סנ"צ יאיר חנונה, קיבל מסרים והחליט לצאת לחופשה מתפקידו. לא ברור האם ומתי יחזור אבל יש לי תחושה שהמפגינים לא יתגעגעו @N12News pic.twitter.com/VTDmJe9OVI
— יוסי מזרחי Yossi Mizrachi (@yosimiz1) July 30, 2023
Au cours des manifestations de la semaine dernière, des vidéos ont montré des policiers donnant des coups de pied à des manifestants allongés sur le sol, jetant des palettes de bois enflammées dans leur direction, traînant des militants par les cheveux et ayant recours à la violence lors de l’arrestation de personnes qui bloquaient des routes et des autoroutes, y compris celles qui n’opposaient pas de résistance à leur arrestation.
La police a également déployé des canons à eau contre des manifestants qui ne bloquaient aucune route et ne se livraient à aucune activité illégale.
Hanuni et les quatre autres policiers doivent être interrogés au siège du PIID à Tel Aviv mercredi, a rapporté la chaîne publique Kan.
Hanuna et quatre autres policiers ont été convoqués lundi pour être interrogés par les enquêteurs du ministère de la Justice sur les allégations de recours excessif à la force contre les manifestants opposés à la refonte judiciaire du gouvernement. Une trentaine de manifestants ont dû être soignés après la manifestation.
Le PIID mène l’enquête sur la manière dont les officiers ont géré la manifestation. Hanuna et les autres officiers sont soupçonnés d’avoir battu des manifestants lors de trois incidents distincts à Tel Aviv, a rapporté la Douzième chaîne.
De nombreuses plaintes ont été déposées par des manifestants contre Hanuna, notamment pour avoir cassé le nez d’un manifestant lors d’un rassemblement il y a environ deux semaines à Tel Aviv. Hanuna et les quatre autres officiers doivent être interrogés au siège du PIID à Tel Aviv mercredi.
Les agents impliqués ne portaient pas de caméra corporelle au moment de l’arrestation, ce qui est contraire au règlement, a rapporté la chaîne publique israélienne Kan.
La police a défendu le comportement de ses agents pendant les manifestations. Le ministre de la Sécurité nationale Ben Gvir, a soutenu les officiers, déclarant que le PIID essayait de « menacer le commandant du Yasam de Tel Aviv, un officier exceptionnel, uniquement parce qu’il a agi pour faire respecter la loi avec détermination ».
Samedi, des manifestants opposés à la refonte judiciaire du gouvernement ont fait circuler des tracts à plusieurs endroits de Tel Aviv avec des photos d’officiers accusés de violence, dont Hanuna.
En réponse, la police a déclaré qu’elle ouvrirait une enquête sur les soupçons d’offense aux fonctionnaires, de diffamation et d’incitation à la violence, mais le bureau de la procureure générale a rappelé dimanche que la police israélienne n’était pas autorisée à ouvrir une enquête sur les soupçons d’incitation contre les manifestants sans son aval.