Plus de 200 000 personnes aux manifestations pro-démocratie en Israël
Les principaux alliés d'Israël, y compris Washington, ont remis en question les projets visant à donner plus de pouvoir aux politiques et à réduire le rôle de la Cour suprême
Plus de 200 000 Israéliens (au moment de la publication de cet article) se sont rassemblés samedi en Israël pour continuer à protester contre la refonte judiciaire voulue par le gouvernement, avant une semaine cruciale qui devrait être marquée par d’autres dispositions législatives et de nouvelles manifestations de masse.
Les manifestations se succèdent chaque semaine depuis la présentation en janvier par le gouvernement de Benjamin Netanyahu, l’un des plus à droite de l’histoire d’Israël, d’un projet de réforme qui divise le pays.
Suscitant l’inquiétude dans le pays mais aussi à l’étranger, la refonte vise à accroître le pouvoir des élus sur celui des magistrats. Selon ses détracteurs, elle met en péril le caractère démocratique de l’Etat d’Israël.
« Nous sommes ici aujourd’hui pour manifester et joindre notre voix aux centaines de milliers, voire aux millions, d’Israéliens qui soutiennent les valeurs sur lesquelles ce pays a été fondé », comme la « démocratie » et la « tolérance », a déclaré à Tel Aviv, Daniel Nisman, 36 ans, qui travaille dans le secteur de la high-tech, en danger avec la refonte judiciaire.
מתחילים עוד ערב של מחאות. אלפי מפגינים יחלו בקרוב לצעוד מכיכר הבימה למוקד המרכזי בקפלן. הפגנות נוספות יתקיימו ביותר ממאה מוקדים – בהם לראשונה גם רמלה. נמשיך לעדכן פה וב-@WallaNews pic.twitter.com/HgBjcVvIrZ
— אורי סלע Uri Sela (@uri_sela) March 25, 2023
« De plus en plus d’Israéliens se réveillent », a estimé Josh Drill, 26 ans et porte-parole d’un des mouvements de protestation, dit « des parapluies ». « Nous n’allons pas vivre dans une dictature », a-t-il déclaré.
« Les lois qui sont adoptées actuellement sont des lois qui visent à faire du gouvernement le seul maître à bord et à détruire la séparation des pouvoirs », a indiqué de son côté Daphne Oren-Magidor, 41 ans, historienne.
A Jérusalem, des milliers de manifestants ont défilé devant la résidence du président Isaac Herzog.
Pour Harriet Scher, 80 ans, les réformes « affecteront surtout les personnes à la marge : les lesbiennes, les gays et la population arabe. Ce ne sera pas bon pour le pays s’ils (les politiciens) ont un contrôle total sur la Cour suprême », a-t-elle ajouté.
Les principaux alliés d’Israël, y compris Washington, ont remis en question les projets visant à donner plus de pouvoir aux politiques et à réduire le rôle de la Cour suprême.
Même le président américain Joe Biden a exprimé ses « inquiétudes » concernant ces réformes judiciaires, a déclaré mercredi la porte-parole de la Maison Blanche, Karine Jean-Pierre.
קפלן
לעולם לא נכנע pic.twitter.com/aCrPaM88fH— nevo dan (@nevodan1) March 25, 2023
Netanyahu et ses alliés d’extrême droite et ultra-orthodoxes estiment nécessaire ce projet de réforme pour rétablir un rapport de force équilibré entre les élus et la Cour suprême, qu’ils jugent politisée.
Les députés israéliens devraient se prononcer la semaine prochaine sur un des éléments centraux de la réforme, au cœur des inquiétudes de ses détracteurs, prévoyant le changement dans le processus de nomination des juges.
Dans une allocution télévisée, le ministre de la Défense Yoav Gallant (Likud) a appelé samedi à stopper la législation de refonte judiciaire afin de tenir des pourparlers avec l’opposition.
S’exprimant lors du principal rassemblement à Tel-Aviv, l’historien Yuval Noah Harari a déclaré samedi soir que les fonctionnaires et les forces militaires devaient obéir aux tribunaux et non au gouvernement, si Israël devait se retrouver au milieu d’une crise constitutionnelle.
S’adressant à Netanyahu, Harari a déclaré : « Nous savons que vous êtes responsable de tout ce qui se passe. Vous n’êtes pas un émissaire. Vous n’êtes certainement pas un ange. Après 2 000 ans, nous nous souvenons encore de pharaon. Et nous nous souviendrons de vous. Aucune rue, place ou aéroport ne portera votre nom. Mais nous raconterons l’histoire de l’homme qui a essayé de nous asservir et qui a échoué. »
« Vous êtes entouré de gens sans colonne vertébrale. Mais nous avons des épines dorsales… Nous ne serons pas des esclaves. L’année prochaine, nous serons des gens libres », a-t-il ajouté.
S’exprimant lors du même rassemblement, Shikma Bressler, physicienne de renommée mondiale et leader de la contestation qui a été brièvement arrêtée jeudi, a prévenu que le plan du gouvernement visant à prendre le contrôle du comité chargé de choisir les juges, « est le premier domino sur la voie de la dictature ».