Pologne : le Congrès juif européen dénonce un rituel de Pâques antisémite
Une grande marionnette antisémite de Judas Iscariot a à nouveau été brûlée cette année dans le village de Pruchnik

Vendredi, les habitants d’une petite ville polonaise, Pruchnik, ont célébré le Vendredi saint en fabriquant une grande marionnette antisémite de Judas Iscariot avant de la frapper, de la pendre à un arbre puis de la brûler, a rapporté le Congrès juif européen.
La marionnette reprenait des stéréotypes juifs et portait une pancarte indiquant « Judas 2023 », a indiqué l’organisation.
Ce rituel pascal cherche à symboliser un procès public de Judas, qui selon la tradition chrétienne a trahi Jésus et l’a livré aux Romains, avant sa crucifixion. Le Vendredi saint marque le jour où Jésus aurait été crucifié.
Après le « procès » symbolique où la marionnette est condamnée à mort, son exécution a lieu par pendaison, et le « cadavre » est ensuite promené dans les rues pendant que des enfants et des adultes le frappent avec des bâtons, lui infligeant 30 coups. La cérémonie se termine avec les résidents brûlant la marionnette.
Le rituel, connu sous le nom de « jugement de Judas », remonte au 18e siècle et a été pratiqué jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale. Il a depuis été abandonné, sauf dans quelques villages. Il n’était plus pratiqué à Pruchnik, jusqu’en 2019. Dans certains cas, par le passé, la marionnette était marquée comme étant juive à l’aide d’une Etoile de David sur son bras.
‼️#Antisemitism on display in Poland‼️
Residents of Pruchnik recently staged a disturbingly #antisemitic demonstration in which they hung and burned a doll that featured #Jewish stereotypes, along with a sign reading "Judas 2023".#StandUpToHatred#BreakTheHate pic.twitter.com/a4jBa5twbQ
— StandWithUs (@StandWithUs) April 10, 2023
La cérémonie avait suscité une condamnation mondiale en 2019, conduisant la municipalité à annoncer la fin de la tradition. Pourtant, à nouveau la semaine dernière, des individus ont accroché la même effigie aux abords de la ville et l’ont incendiée. Les autorités municipales ont dû intervenir en retirant la poupée de la zone.
« La récurrence d’incidents antisémites tels que celui-ci, quelques semaines seulement après que les gouvernements polonais et israélien ont signé un accord visant à normaliser les relations et à rétablir les voyages de jeunes en Pologne, est profondément troublante », a réagi Meir Bolka, président de J-nerations, organisation pour la préservation de l’héritage juif en Europe de l’Est, et chercheur à l’Institut de recherche sur la Shoah de l’université Bar-Ilan.
« Il est évident que le gouvernement polonais n’a pas réussi à s’attaquer aux racines de cette haine envers les Juifs. S’il attend des étudiants israéliens qu’ils apprennent les souffrances du peuple polonais pendant la Shoah, ils doivent aussi enseigner que les Juifs, y compris ceux qui se rendent en Pologne sous l’apparence de Juifs hassidiques, ne sont pas responsables de la mort de Jésus », a-t-il ajouté.
La Pologne, qui était le foyer de la plus grande communauté juive d’Europe avant l’occupation de l’Allemagne nazie (1939-1945), a vu une forte augmentation des incidents antisémites au cours des dernières années.
Première terre d’accueil des Juifs jusqu’au 20e siècle, la Pologne envahie et occupée par l’Allemagne nazie a vu périr six millions de ses habitants pendant la Deuxième Guerre mondiale dont trois millions de Juifs. Aujourd’hui, la communauté juive de Pologne compte entre 8 000 et 12 000 membres, selon des estimations.