Pour l’escrimeur olympique juif Nick Itkin, c’est à l’histoire des siens qu’il doit sa médaille de bronze
Ses parents, originaires d'Ukraine, ont émigré aux États-Unis ; le jeune médaillé lorgne déjà sur l'or pour les prochains Jeux, qui se dérouleront à Los Angeles, sa ville natale, en 2028
Nick Itkin n’a pas pu retenir son émotion. Quelques instants après avoir remporté une médaille de bronze en escrime dans la catégorie fleuret individuel masculin aux Jeux olympiques de Paris, ses larmes ont commencé à couler.
« Je pense aux quatre dernières années, à tout ce que j’ai vécu pour arriver à ça », a confié au Times of Israel ce jeune homme de 24 ans originaire de Los Angeles.
« On s’entraîne tellement, on fait tellement de compétitions, tellement de sacrifices, tout ça pour ce combat. Alors, quand on a enfin la médaille autour du cou, c’est un grand moment de soulagement, on peut enfin profiter du moment présent. Mes amis et mes proches n’ont pas cessé de m’encourager : après tant d’années d’efforts et de sacrifices, c’est la récompense. »
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Sur les vingt escrimeurs membres de la délégation américaine présente à Paris, six sont Juifs ou d’origine juive.
Itkin est, parmi eux, le seul à avoir remporté une médaille individuelle à Paris ; Jackie Dubrovich et Maia Weintraub, membres de l’équipe féminine de fleuret, ayant décroché la médaille d’or par équipe sous la conduite des stars Lee Kiefer et Lauren Scruggs, qui ont terminé respectivement première et deuxième de la compétition individuelle.
La passion d’Itkin pour l’escrime et sa judéité lui vient de son père Michael, lui-même fils d’un rescapé de la Shoah ukrainien, qui a émigré aux États-Unis dans les années 1990. À l’époque, l’Ukraine faisait partie de l’Union soviétique.
Michael Itkin était escrimeur professionnel à Kiev, et sa femme Tatyana, elle aussi originaire de Kiev, était entraîneur de gymnastique rythmique.
« Quand mes parents sont arrivés ici, ils ont fait tout un tas de jobs difficiles, pour s’habituer à la vie aux États-Unis et apprendre la langue », poursuit Itkin, qui avait déja participé aux Jeux olympiques de Tokyo en 2020 et remporté une médaille de bronze par équipe au fleuret, en plus de finir 12e en individuel.
« Ils ont fini par reprendre leur activité d’entraîneurs et, en 2004, mon père a ouvert son club d’escrime à Los Angeles », ajoute Itkin. « La moitié du club est dédié à l’escrime, l’autre moitié à la gymnastique rythmique et sportive. Mon père s’occupe de l’escrime et ma mère, de la GRS. »
Il se souvient qu’après l’école, lorsqu’il était enfant, sa sœur aînée Julia – membre de l’équipe américaine de gymnastique rythmique et sportive – et lui allaient directement au club de sport, où ils passaient le reste de la journée. Après avoir fait ses devoirs, il regardait les escrimeurs s’entraîner.
Un beau jour, à l’âge de 7 ans, il décide de s’y mettre.
« J’ai fini par me dire : ‘OK, le moment est venu.’ J’ai mis un masque et c’est comme ça que j’ai commencé l’escrime. Je me suis tellement amusé. C’est comme ça que tout a commencé pour moi », confie Itkin.
Avec l’aide de son père, Itkin a vite progressé et sa passion pour le sport n’a fait que croitre lorsqu’il a commencé la compétition. Après le lycée, il a étudié à l’Université de Notre-Dame, où il a remporté deux titres universitaires consécutifs en fleuret, en 2018 et 2019, tout en obtenant un diplôme en commerce et sciences politiques.
Puis il y a eu des compétitions nationales et les titres remportés lors de la Coupe du monde. Il devient le premier escrimeur américain à remporter une médaille individuelle lors de deux championnats du monde consécutifs, avec une médaille de bronze en 2022 et une d’argent en 2023. Cette année, il a été un temps premier au classement mondial avant de reculer avant Paris, à la deuxième place.
À Paris, il a failli ne pas se qualifier pour les demi-finales.
Au fleuret, le combat se termine lorsque l’un des adversaires marque 15 points. Lors de son match de quart de finale contre l’Italien Guillaume Bianci, il s’est retrouvé à égalité, 14-14, avec son adversaire, avec pour le vainqueur une chance de médaille et le perdant, la fin des Jeux.
« Je savais qu’il fallait tenir bon nerveusement : c’est à la fin des combats que se font les plus folles remontadas. Tout se jouait sur cette touche. Il y avait tellement d’énergie et de pression. Quand j’ai remporté le point, j’étais très heureux parce que cela m’ouvrait des perspectives de médailles », confie Itkin, qui a perdu en demi-finale contre un autre Italien, par 15 à 11, avant de l’emporter en petite finale, pour la médaille de bronze, sur un adversaire japonais par 15 à 12.
Pour Itkin, ces Jeux au Grand Palais, devant près 8 000 spectateurs très en voix, sont le cadre rêvé. Le mieux, confie-t-il, a été de pouvoir partager ce moment, la réalisation de son rêve d’enfant, avec son père.
« Mon père est mon entraîneur depuis que je suis tout petit. Je sais tout ce que cela signifie pour lui », assure Itkin. « On pourrait même dire que c’est plus important pour lui que pour moi. Lors de mes combats, chaque fois que je me retournais, je le voyais, plus ou moins nerveux, plus ou moins heureux. Je savais ce qu’il ressentait. Ce fut un moment très spécial. »
À Tokyo, le COVID l’avait privé d’une grande partie de ce qui fait l’expérience olympique, aussi est-il ravi d’avoir pu assister à un grand nombre de compétitions à Paris, une fois la sienne terminée, avant la cérémonie de clôture et son retour chez lui, le 12 août.
Désormais, toute son attention se porte sur 2028 et la chance d’une vie. Non seulement les prochains Jeux se dérouleront dans son pays, mais aussi dans sa ville natale. Le village des athlètes se trouvera d’ailleurs à quelques pâtés de maisons de chez lui.
« Je veux tellement cette médaille d’or. Quel meilleur endroit que chez moi ? », s’exclame-t-il.
En 2022, Itkin s’est rendu en Israël avec son père et ses proches après avoir remporté sa première médaille au championnat du monde.
« C’était un grand moment pour mon père », confie Itkin. « D’aussi loin que je me souvienne, il avait toujours voulu faire ce voyage. Pouvoir découvrir la culture israélienne, voir Jérusalem, c’était très important pour notre famille. »
Itkin assure connaitre le seul escrimeur olympique israélien, Yuval Shalom Freilich, âgé de 29 ans et originaire de Jérusalem, qui a remporté le championnat d’Europe d’escrime en 2019 et terminé 19e à l’épée à Paris.
Mais, explique Itkin, dans la mesure où Freilich et lui concourent dans des disciplines différentes, des circuits différents, il ne le voit que rarement, lors des Jeux olympiques ou des championnats du monde.
Itkin espère revenir un jour en Israël, et peut-être même donner un peu de son temps pour faire connaitre son sport aux jeunes d’Israël.
« Nous aiderons les jeunes qui s’intéressent à l’escrime », conclut-il.
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