Pour l’Open Houses, Tel Aviv rend hommage au spécialiste de la sculpture in situ
L'événement architectural Batim Mibifnim marque le premier anniversaire de la mort de l'artiste Dani Karavan par des visites de son atelier et de ses œuvres publiques
Noa Karavan-Cohen a grandi en jouant dans le parc arboré conçu par son grand-père, l’architecte paysagiste Abraham Karavan, et qui a ensuite été nommé l’honneur de ce dernier, à quelques pas de la place Dizengoff de Tel Aviv.
Son défunt père, l’artiste Dani Karavan, avait l’habitude de se cacher parmi les oliviers, les goyaviers, les manguiers et les pamplemoussiers lorsque ses professeurs le renvoyaient de l’école voisine, ce qui arrivait fréquemment.
« Il était dyslexique », dit Mme Karavan-Cohen à propos de son père, un sculpteur de renommée.
Son atelier se trouvait dans un immeuble d’habitation construit sur le site de sa maison d’enfance à deux chambres, rue Zvi Shapira, à côté du parc.
Ce week-end, pour marquer la première année du décès de l’artiste, l’événement architectural Open Houses – appelé Batim Mibifnim en Israël – a conçu un parcours Karavan à Tel Aviv.
Des visites de son atelier et de ses sculptures in situ seront organisées, ainsi que des jardins et des boulevards conçus par son père lors de la fondation de la ville.
Durant l’événement Batim Mibifnim, qui célèbre sa 15e année et se déroule de jeudi à samedi, des centaines de bâtiments historiques, d’espaces publics, d’appartements privés et de maisons sont ouverts au public gratuitement le temps d’un week-end. Une inscription préalable est nécessaire.
Cette année, le Batim Mibifnim comprendra aussi des visites du système de transport souterrain en construction de la ville.
Une partie de ce système de métro souterrain prévoit des changements sur la place Habima à l’extérieur du centre culturel de Tel Aviv, où Karavan a conçu un espace extérieur avec un aménagement paysager qui fait écho à la conception de Tel Aviv en tant que ville-jardin. Sa famille se bat actuellement contre la société NTA Metropolitan Mass Transit, chargée de planifier le système de transport en commun de la ville.
Karavan, qui a remporté le prix d’Israël pour la sculpture en 1977, est né à Tel Aviv en 1930 et y est mort en 2021.
Il a créé quelque 80 sculptures in situ en Israël et dans le monde entier, dont la place Blanche de Tel Aviv, les reliefs muraux du tribunal de district de Tel Aviv et des installations dans les maisons mères de la Bank Hapoalim et de la Bank Leumi. Il a aussi participé au processus de désignation de la cité blanche de Tel Aviv comme site de l’UNESCO pour sa collection d’architecture Bauhaus.
Son amour pour Tel Aviv et pour l’esthétique de la ville lui vient en grande partie de son père, le premier architecte paysagiste de Tel Aviv, Avraham Karavan, qui a réalisé une grande partie du plan de la cité-jardin conçu par Sir Patrick Geddes, notamment en plantant les arbres et les fleurs qui bordent encore aujourd’hui les boulevards et les parcs de la ville.
Les parents de Dani Karavan sont arrivés d’Ukraine en Israël dans les années 1920. Ils ont d’abord vécu près du lac de Tibériade puis à Tel Aviv, passant d’une tente près de la plage au quartier yéménite et enfin à la petite maison près de la place Dizengoff, où Abraham Karavan a acheté une petite parcelle de terrain.
« Il n’y avait pas d’argent », dit Karavan-Cohen. Son père dormait sur un lit pliant dans la cuisine.
La maison a été démolie et reconstruite en 2000 en un bâtiment de quatre étages. Au premier étage se trouvaient le studio et le bureau de Karavan, qu’il utilisait chaque fois qu’il revenait en visite. Avec sa femme et ses trois filles, il a vécu en Italie de 1967 à 1980, puis s’est installé à Paris, où il a reçu des subventions de la ville, notamment pour les assistants qui travaillaient avec lui. Une grande partie de son œuvre y est restée jusqu’à ce jour.
Lorsque Noa Karavan-Cohen, la fille aînée, est rentrée en Israël pour s’engager dans l’armée en 1981, elle a vécu dans la maison familiale comme jeune soldate, puis comme étudiante universitaire. Ses deux jeunes sœurs ont également utilisé la maison à la fin de leur adolescence et dans leur vingtaine.
Au fil des ans, toutes les maisons de cette rue bordée de jardins tranquilles ont été progressivement démolies et reconstruites en immeubles d’habitation plus grands, entourant le parc conçu par son grand-père, planté de buissons fleuris et de jacarandas violets.
« La maison manque toujours à ma mère. Elle nous manque à tous », a déclaré Karavan-Cohen. « Tous nos amis venaient… Ce n’était pas chic, mais c’était authentique. »
Les organisateurs de Batim Mibifnim ont proposé des visites pour marquer le premier anniversaire de la mort de son père, le 29 mai de l’année dernière. « Ils voulaient faire visiter le studio ainsi que les endroits publics. Nous avons dit : ‘Bien sûr' », a déclaré Mme Karavan-Cohen.
« La maison n’a jamais été un lieu saint où les gens ne pouvaient pas entrer », a-t-elle ajouté. « Papa aimait les gens et il aimait que des gens viennent ici – les jeunes artistes, les journalistes. »
Il était très Israélien, dit Karavan-Cohen, malgré les nombreuses années où il a étudié et travaillé à l’étranger.
Karavan a appris à marcher dans le sable de Tel Aviv, dit-elle, et c’est devenu son premier matériau de sculpture. Il s’est familiarisé avec la technique des fresques murales à Florence à la fin des années 1950 et a voulu la ramener à Tel Aviv.
À son retour dans la ville en 1956, il a été chargé de réaliser des peintures murales au tribunal de district de Tel Aviv. Lorsqu’il a réalisé qu’il ne pouvait pas faire de fresques sur du ciment, il a créé des bas-reliefs en ciment.
Une grande partie de son travail à Tel Aviv gravitait autour de ses amis de toujours, le célèbre architecte Yaakov Rechter et le beau-frère de Rechter, l’ingénieur Micha Peri. Rechter était marié à l’actrice Hanna Maron, que Karavan a rencontrée alors qu’elle fabriquait des décors de théâtre, et Maron a présenté Karavan à son mari.
C’est Peri qui a inspiré Karavan pour son travail emblématique au Monument de la Brigade Neguev, conçu à la mémoire des membres de la Brigade Palmach Neguev qui sont morts en combattant pour la création de l’État d’Israël en 1948.
Le monument Neguev a été construit entre 1963 et 1968 ; fait de béton brut, il couvre 10 000 mètres carrés. Une tour fait allusion à une tour de guet, tandis qu’un tunnel de canalisation très apprécié des visiteurs symbolise un canal d’eau dans le Néguev qui était défendu par les soldats.
« Il ne pouvait pas expliquer comment ni pourquoi il l’avait conçu ainsi », a déclaré Karavan-Cohen, qui n’était alors qu’un bébé et qui se souvient seulement d’un chien nommé Negba que Peri avait ramené du site. « Le terme in situ n’existait pas encore à l’époque. »
Douze visites et activités sont proposées pendant le week-end Batim Mibifnim, dont le studio de Karavan, ses œuvres à la Bank Hapoalim et à la Bank Leumi, une conférence en soirée à l’Institut français sur les réfugiés, un sujet qui lui tenait à cœur, des activités pour les enfants sur la place Habima, des bas-reliefs au tribunal de district de Tel Aviv, la place Blanche et deux visites de la ville blanche guidées par des amis de la famille et des experts.
Malgré la perspective architecturale de l’événement, Dani Karavan n’était pas un architecte, même si on le décrivait souvent comme tel, a déclaré Mme Karavan-Cohen.
« Il n’a jamais étudié l’architecture », a-t-elle déclaré. « Il se qualifiait lui-même d’artiste, plus précisément de sculpteur. »
Pour plus d’informations sur les dates et les horaires de Batim Mibifnim et des sites Dani Karavan, rendez-vous sur le site de Batim Mibifnim. (Certaines visites, notamment celles de l’atelier, sont déjà complètes.)
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