Rothman prépare la loi sur le réexamen judiciaire en Commission de la Knesset
L'amendement à la Loi fondamentale interdisant l'utilisation de la notion juridique de "raisonnabilité" devrait être présenté mercredi devant la Commission de la Constitution
Jeremy Sharon est le correspondant du Times of Israel chargé des affaires juridiques et des implantations.
Le député Hatzinout HaDatit Simcha Rothman, président de la Commission de la Constitution, du droit et de la justice, a rendu public, mardi, un texte de loi qui restreindrait de manière importante les possibilités de réexamen judiciaire des décisions prises par le gouvernement.
Selon la législation – qui consiste en un amendement apporté à la Loi fondamentale : Le système judiciaire – les tribunaux, et notamment la Haute-cour, ne pourront plus tenir d’audience sur la « raisonnabilité » des décisions gouvernementales ou invalider les décisions prises par le Premier ministre, le cabinet, les ministres ou autres responsables élus sur la base de la notion juridique de « raisonnabilité ».
Le projet de loi devait être présenté dès mercredi devant les membres de la Commission de la Constitution, du droit et de la justice – mais la coalition a finalement annoncé, mardi soir, que la discussion serait reportée dans le sillage de l’attentat terroriste meurtrier qui a été commis à l’implantation d’Eli. Elle avait fait savoir, cette semaine, qu’elle voulait faire approuver cet amendement et l’ancrer dans le marbre de la loi dans les six semaines à venir, avant la fin de la session estivale de la Knesset, fin juillet.
Rothman et le ministre de la Justice Yaricv Levin – les deux principaux artisans du plan de refonte du système israélien de la Justice – ont affirmé que l’utilisation de la « raisonnabilité », qui permet aux tribunaux d’estimer si les considérations prises en compte lors d’une décision gouvernementale ou ministérielle l’ont été suffisamment, offre à la Haute-cour une capacité trop grande d’intervention dans des décisions qui devraient être seulement du ressort du gouvernement ou des responsables élus.
Au début de l’année, la Haute-cour de justice avait estimé que la nomination d’Aryeh Deri, leader du Shas, aux postes de ministre de la Santé et de ministre de l’Intérieur était « déraisonnable à l’extrême » au vu de ses condamnations criminelles passées et de sa promesse faite de quitter la Knesset dans le cadre d’une négociation de peine, en 2022.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, à ce moment-là, avait juré de réintégrer légalement Deri au cabinet par le biais du projet gouvernemental de refonte du système judiciaire – en privant les juges de la notion juridique de « raisonnabilité », et ce même si des obstacles juridiques devraient se présenter encore avant que le chef ultra-orthodoxe ne fasse son retour au cabinet.
Le député de l’opposition Gideon Saar, lui-même ancien ministre de la Justice, a dit mardi qu’il était favorable à la limitation de la notion juridique de « raisonnabilité » s’agissant d’évaluer les décisions politiques prises par le gouvernement – mais il a dit souhaitable de la maintenir concernant les nominations à des postes politiques.
« Pour les décisions politique, la Cour n’a pas le poids supplémentaire, les connaissances supplémentaires ou les capacités supplémentaires lui permettant de mieux décider les choses que ceux qui ont été élus », a-t-il commenté.
« Mais pour les nominations corrompues, il n’y a pas de raison de limiter l’usage de la ‘raisonnabilité’ – et ce ne serait pas une bonne chose pour le public », a poursuivi Saar qui a noté qu’il s’agissait là du positionnement adopté par l’opposition pendant les négociations de compromis entamées à la résidence du président.
Le projet de loi soumis par Rothman, a continué Saar, « est beaucoup plus large, s’élargissant à toutes les décisions prises par un responsable élu », notamment au sein des commissions de la Knesset et lors des élections municipales, « et je pense que c’est quelque chose de très, très extrême et de surcroît, de très, très dangereux ». »
Saar a noté que la formulation actuelle de la loi est « beaucoup plus radicale que le positionnement qui a été adopté par les représentants de la coalition pendant les pourparlers à la résidence du président ».
La décision prise par la coalition de faire avancer certains éléments de son plan de refonte radicale du système judiciaire sonne probablement le glas des négociations accueillies, au cours des trois derniers mois, par le président Isaac Herzog, des discussions qui visaient à trouver un compromis avant d’être mises en pause.
Herzog a fait une déclaration lundi, appelant les partis à revenir à la table des négociations malgré les lignes rouges franchies par les uns et par les autres.
« J’ai toujours cru – et je le crois aujourd’hui plus que jamais – que le dialogue est la meilleure solution pour l’État d’Israël. Je répète mon appel à la responsabilité nationale, à continuer le dialogue fructueux et substantiel qui a eu lieu ces derniers mois dans le cadre de la résidence du président », a-t-il dit.
Carrie Keller-Lynn et le Times of Israel ont contribué à cet article.