Shas menace la coalition si le nouveau chef de la Dixième chaîne n’est pas limogé
Rami Sadan, un proche de Netanyahu, dément avoir tenu des propos racistes ; des politiciens voient sa nomination comme une tentative d'influencer la rédaction
Sue Surkes est la journaliste spécialisée dans l'environnement du Times of Israel.
Le parti Shas a menacé mardi de provoquer une crise de coalition à moins que le Premier ministre Benjamin Netanyahu ne limoge immédiatement le nouveau chef des informations de la Dixième chaîne à propos de remarques racistes qu’il aurait prononcées contre Shas et son chef, Aryeh Deri.
Rami Sadan, un proche de la famille Netanyahu, a été cité mardi matin par le journal Haaretz comme ayant qualifié, la veille, Deri de voleur et comme ayant fait une référence stéréotypée sur la base du parti composée de Juifs séfarades originaires d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient.
« Tant que [le tir] ne sera pas rectifé, les élus du mouvement voteront à la Knesset comme ils l’entendent » au lieu d’obéir à la discipline de coalition, lit-on dans un communiqué du Shas. « La population mizrahi a cessé de se taire ».
Haaretz a rapporté que Sadan, un ancien professionnel de relations publiques et de lobbying qui a été nommé lundi à son nouveau poste, a déclaré au conseil d’administration des informations de la Dixième chaîne : « Reconnaissons la vérité : Comme vous, je fais partie de l’élite, je déteste le mouvement Shas et ce voleur Aryeh Deri. Mais, en tant qu’élite, nous devons élargir l’audience de la chaîne et nous adresser au public du Shas, à Massouda de Sderot ».
New Channel 10 News board chairman sparks furor with anti-Shash remarks https://t.co/p5l4uijZZS pic.twitter.com/kIP9HKWZfe
— Haaretz.com (@haaretzcom) June 7, 2016
« Massouda de Sderot » est un stéréotype faisant référence à une personne d’origine séfarade vivant dans les villes périphériques d’Israël. Il a été inventé par Alex Giladi, le premier directeur de la chaîne Keshet (un des operateurs de la Deuxième chaîne), pour dire que Keshet offrirait des programmes s’adressant à Monsieur tout le monde en Israël, « à Massouda Cohen de Sderot et aussi à Moshe Rabinowitch de Yavne’el. »
La référence à l’égard de Deri comme étant un voleur renvoie à la condamnation du dirigeant du Shas pour corruption, pour laquelle il a purgé une peine de prison de 22 mois.
Les propos de Sadan ont été transmis à Haaretz par l’une des personnes présentes lors de la réunion du conseil d’administration, qui les a décrits comme « honteux et exaspérants ». La source a déclaré : « une odeur d’autoritarisme, d’arrogance et de racisme flottait » dans la pièce.
Un proche de Sadan a nié qu’il avait fait la déclaration et a attribué l’information à une tentative de semer la discorde entre les partis ultra-orthodoxes. « Les citations qui m’ont été attribuées sont des mensonges », a-t-il déclaré au site ultra-orthodoxe Kikar Hashabat.
L’information a déclenché une tempête de critiques dans le monde politique, le ministère de la Communication, dirigé par Netanyahu, demandant à la Seconde Autorité pour la télévision et la radio, qui supervise les franchises de radiodiffusion, de se pencher sur les remarques.
En réponse aux propos de Sadan, Deri a déclaré que les électeurs du parti ne sont pas des « excédents de bagages », mais « des centaines de milliers de Séfarades qui ont décidé de se rassembler et de relever la tête pour vaincre des cas comme Rami Sadan dans le monde. Nous sommes ici pour rester et nous n’allons pas laisser passer des remarques comme celle-là ».
Qualifiant Sadan de « raciste pathétique », la deputée Shelly Yachimovich (Union sioniste) a décrit sur sa page Twitter le président de la Dixième chaîne comme « le bras de Balfour pour imposer le silence » – une référence à la résidence officielle du Premier ministre, située rue Balfour, à Jérusalem. Elle a ajouté : « Malheur aux doigts qui ont approuvé cette nomination ».
גזען עלוב ממתיק סוד: שונא את מסעודה אבל צריך אותה. לוביסט, מאכער, זרוע השתקה של בלפור, אוי לאצבעות שאישרו את המינוי pic.twitter.com/mDUgHlAITz
— שלי יחימוביץ (@Syechimovich) June 7, 2016
Yair Lapid, le chef de file de Yesh Atid a publié un communiqué les déclarations « racistes et haineuses » de Sadan.
Sadan a été nommé par le conseil d’administration de la Dixième chaîne lors d’un vote lundi soir, recevant le soutien des actionnaires majoritaires et du directeur général du site Nana10, selon Haaretz. Sa nomination a été perçue comme une tentative de donner à Netanyahu une influence sur les informations de la chaîne.
Se référant à Sadan comme « une sorte de bras long dans la salle de rédaction », Matan Hodorov, qui représente les journalistes de la Dixième chaîne, a dit qu’il y avait beaucoup de gens à la réunion du conseil d’administration qui ont entendu ses propos.
Hodorov a dit mardi à la radio de l’armée : « Nous ne tolérerons aucune odeur de racisme ». Il a déclaré qu’il était inapproprié que le président de la chaîne soit un « publiciste, un proche de politiciens et un raciste » et a présenté ses excuses aux téléspectateurs séfarades, dont il a dit qu’ils constituaient une partie importante de l’audience de la chaîne. « Nous ne sommes pas une élite, les électeurs du Shas constituent une partie importante de notre public et sont parmi ceux qui travaillent dans la rédaction », a-t-il précisé.
Hodorov a affirmé que Sadan n’était pas le principal candidat pour le poste, mais a néanmoins été nommé par le conseil par une décision éclair.